Cour de justice de l’Union européenne, le 4 juillet 2013, n°C-233/12

La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 4 juillet 2013, précise les modalités de coordination des régimes de retraite. Un ressortissant national, après avoir exercé une activité salariée dans son pays d’origine, intègre une organisation internationale située sur le territoire d’un autre État membre. Ayant sollicité le transfert du capital représentatif de ses droits à pension vers le régime de son nouvel employeur, il se heurte au refus de l’administration nationale. Le litige est porté devant le Tribunale di la Spezia en Italie, lequel saisit la juridiction de Luxembourg d’une question préjudicielle le 16 avril 2012. L’intéressé soutient que ce refus constitue une entrave à la libre circulation, tandis que l’organisme de sécurité sociale invoque l’absence de convention internationale. La Cour doit déterminer si le droit de l’Union impose le transfert du capital ou la totalisation des périodes d’activité pour l’ouverture des droits. Elle juge que si le transfert n’est pas obligatoire, la prise en compte des périodes d’emploi au sein de l’organisation internationale s’impose.

**I. L’absence d’obligation de transfert du capital représentatif des droits à pension**

**A. L’inapplicabilité du statut des fonctionnaires de l’Union européenne**

La Cour souligne que la faculté de transfert prévue par le statut des fonctionnaires ne s’étend pas aux agents des organisations internationales. L’Office européen des brevets constitue une organisation régie par le droit international, distincte des institutions ou organes de l’Union soumis au régime statutaire commun. Par conséquent, les dispositions obligatoires du droit de l’Union ne produisent pas d’effets directs sur les relations entre cet organisme et un État membre. Le règlement propre à cette organisation subordonne d’ailleurs expressément le transfert de capital à « la permission de l’organisme qui gère le régime de pension ». L’absence d’une telle autorisation au niveau national empêche ainsi le recours automatique aux mécanismes financiers prévus pour les seuls agents de l’Union.

**B. Le silence des traités sur les mécanismes de transfert financier**

Le droit primaire ne prévoit aucune règle relative au transfert du capital représentant les droits déjà acquis lors de la coordination des systèmes. Les articles 45 TFUE et 48 TFUE reposent traditionnellement sur le principe de la totalisation des périodes d’assurance plutôt que sur des transferts financiers. L’article 48 TFUE dispose que le législateur adopte les mesures nécessaires pour assurer aux travailleurs migrants la « totalisation […] de toutes périodes prises en considération ». Dès lors, aucune obligation de prévoir une faculté de transfert de capital vers une organisation internationale ne pèse sur les États membres. L’exercice de la libre circulation des travailleurs n’implique pas nécessairement la conclusion de conventions internationales spécifiques pour organiser ces flux financiers particuliers.

**II. L’exigence impérative de totalisation des périodes d’assurance**

**A. L’identification d’une entrave à la libre circulation des travailleurs**

Le refus de prendre en compte les périodes d’activité au sein de l’organisation internationale peut néanmoins constituer une restriction à la mobilité professionnelle. Un travailleur risquerait de perdre ses droits à pension si la législation nationale exige une durée minimale de cotisation pour l’ouverture d’un droit. Cette situation est « susceptible d’entraver l’exercice du droit à la libre circulation » en dissuadant les citoyens d’accepter un emploi dans un autre État. L’absence de raisons d’intérêt général invoquées par l’organisme national empêche de justifier une telle différence de traitement par rapport aux travailleurs mobiles. La protection du travailleur migrant impose donc de neutraliser les effets négatifs résultant de l’impossibilité technique de transférer le capital financier acquis.

**B. La consécration du droit à une prestation de vieillesse effective**

La juridiction de Luxembourg affirme que l’article 45 TFUE s’oppose à une réglementation nationale excluant la prise en compte des périodes d’emploi international. Le mécanisme de totalisation doit permettre au ressortissant de l’Union de cumuler ses périodes d’activité en Italie avec celles accomplies auprès de l’organisation. L’institution nationale doit alors calculer la prestation de vieillesse en intégrant ces durées d’affiliation pour vérifier si le seuil minimal d’ouverture est atteint. Cette solution garantit l’effet utile des libertés fondamentales sans pour autant contraindre l’État à modifier la nature financière de ses engagements de prévoyance. La liberté de circulation est préservée dès lors que le travailleur conserve le bénéfice de son passé professionnel lors de la liquidation finale.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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