La Cour de justice de l’Union européenne, par un arrêt rendu le 6 octobre 2025, apporte des précisions majeures sur la portée de la clause de standstill. Un ressortissant d’un État tiers, bénéficiant d’un titre de séjour temporaire, a sollicité l’octroi d’une autorisation de séjour permanent auprès des autorités nationales compétentes. L’administration a rejeté sa demande au motif qu’il ne satisfaisait pas aux nouvelles conditions de durée de séjour et d’emploi imposées par la législation. Le tribunal municipal de Copenhague du 31 mars 2020 a d’abord connu du litige avant que la cour d’appel de la région Est ne statue. Saisie en dernier ressort, la Cour suprême du 1er mars 2022 a décidé de surseoir à statuer pour interroger la juridiction européenne sur la validité du durcissement législatif. Il s’agit de savoir si le renforcement des critères d’obtention d’un séjour permanent constitue une mesure interdite par l’accord d’association liant l’Union à un État tiers. Les juges de Luxembourg affirment qu’une telle réforme ne constitue pas une restriction prohibée dès lors qu’elle préserve le droit effectif au séjour et à l’emploi. L’étude s’articulera autour de l’exclusion du titre permanent de la protection conventionnelle (I) et de la reconnaissance corollaire de l’autonomie normative des États membres (II).
I. L’exclusion du titre de séjour permanent du champ de la clause de standstill
A. Le maintien des droits de séjour et d’accès à l’emploi
La Cour souligne que le refus d’un titre permanent « n’a pas pour effet d’empêcher ces derniers de continuer à exercer leur activité professionnelle ». Le travailleur conserve en effet ses prérogatives acquises au titre de l’emploi régulier sans que sa situation juridique ne soit fondamentalement dégradée par la réforme. Cette approche limite l’empire de la clause de standstill aux seules mesures affectant directement l’accès au marché du travail ou le séjour qui en est le corollaire. La décision garantit ainsi que les droits déjà reconnus par l’accord d’association restent inchangés malgré l’introduction de nouvelles exigences pour des statuts de séjour plus stables.
B. Une interprétation restrictive de la notion de nouvelle restriction
L’arrêt précise qu’une réglementation durcissant l’accès à la résidence permanente « ne constitue pas une nouvelle restriction » au sens de l’article 13 de la décision n°1/80. Cette interprétation repose sur l’idée que le droit à la libre circulation n’est pas entravé tant que le séjour temporaire demeure possible pour le travailleur. La juridiction européenne refuse d’assimiler toute modification des conditions de résidence à une atteinte aux droits fondamentaux garantis par les accords d’association entre l’Union et ses partenaires. Cette stabilité des droits fondamentaux autorise dès lors une distinction nette entre le droit au travail et l’accès à un statut de résident privilégié.
II. L’autonomie des États membres dans la définition du statut d’intégration
A. La distinction entre citoyenneté européenne et statut de travailleur tiers
Le juge européen rappelle que le régime de la libre circulation des citoyens de l’Union « ne peut être transposé automatiquement » aux travailleurs bénéficiant d’accords d’association. Cette distinction fondamentale permet aux États membres d’imposer des conditions d’intégration plus strictes sans violer leurs engagements internationaux relatifs à la stabilité du droit au séjour. Ainsi, le droit à la résidence permanente ne découle pas directement de la clause de standstill mais reste soumis aux appréciations souveraines des autorités nationales compétentes. L’objectif de favoriser l’intégration réussie des ressortissants étrangers justifie alors que des critères de durée de séjour et d’emploi plus exigeants soient légalement mis en place.
B. La préservation de la souveraineté nationale sur la résidence de longue durée
La solution adoptée confirme que les États membres conservent une marge de manœuvre substantielle pour définir les critères d’accès à une résidence de longue durée sur leur territoire. Cette décision restreint par conséquent les espoirs d’une assimilation complète entre les travailleurs d’États tiers et les citoyens européens en ce qui concerne la stabilité du séjour. L’arrêt marque une volonté de ne pas étendre indéfiniment les garanties conventionnelles au détriment de la maîtrise des flux migratoires et des politiques nationales d’intégration sociale. La Cour valide ainsi la possibilité pour un gouvernement de modifier ses lois sur l’immigration sans s’exposer systématiquement à une censure fondée sur le principe de non-régression.