Cour de justice de l’Union européenne, le 7 juin 2012, n°C-132/11

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le 7 juin 2012, une décision relative au principe de non-discrimination en fonction de l’âge.

Une convention collective dispose que le passage à une catégorie salariale supérieure exige trois années d’ancienneté au sein de la société employeuse.

L’expérience acquise par le personnel dans d’autres filiales du même groupe économique n’est pas comptabilisée pour le classement initial des nouveaux salariés.

Le Landesgericht d’Innsbruck a accueilli, le 10 décembre 2010, la demande d’un organe de représentation du personnel visant à inclure l’ancienneté de groupe.

L’Oberlandesgericht d’Innsbruck a ensuite interrogé la juridiction européenne sur la conformité de cette restriction conventionnelle avec les exigences du droit de l’Union.

Le litige porte sur la qualification de discrimination indirecte d’une clause limitant la reprise de l’ancienneté à la seule expérience chez l’employeur actuel.

La Cour juge que cette règle ne constitue pas une discrimination car elle repose sur un critère étranger à l’âge biologique des travailleurs concernés.

L’analyse de la neutralité du critère retenu (I) précède l’étude de la portée de la protection contre les discriminations liées à l’âge (II).

I. L’identification d’un critère de différenciation neutre au regard de l’âge

Les partenaires sociaux sont tenus de respecter les prescriptions de la directive créant un cadre général pour l’égalité de traitement en matière d’emploi.

La clause définit les règles d’accès à l’emploi et de rémunération, entrant ainsi dans le champ d’application matériel du texte européen de référence.

A. L’objectivité de la condition liée à l’expérience interne

La juridiction relève que la disposition conventionnelle entraîne une différence de traitement fondée sur la seule date du recrutement par l’entreprise de navigation.

Le refus de prendre en compte les services accomplis ailleurs s’applique uniformément à tous les membres du personnel sans considération de leur âge réel.

La neutralité de cette condition interne doit maintenant être examinée au regard du lien éventuel avec l’âge des salariés au moment de l’embauche.

B. L’absence de lien indissociable avec la maturité des salariés

La mesure est « indépendante de l’âge de ce membre du personnel au moment de son recrutement » par la société aérienne désignée au principal.

La Cour écarte l’existence d’une discrimination directe puisque le critère ne se fonde sur aucun événement lié au temps biologique ou à l’âge.

L’analyse de l’objectivité du critère permet d’aborder la qualification juridique retenue par les juges européens face au mécanisme classique de l’ancienneté d’entreprise.

II. Une interprétation stricte de la notion de discrimination indirecte

L’interdiction des discriminations indirectes protège les travailleurs contre des pratiques apparemment neutres produisant des effets préjudiciables pour un groupe d’âge donné.

Toutefois, une telle qualification juridique nécessite la preuve d’un désavantage particulier subi par des personnes appartenant à une tranche d’âge déterminée.

A. La dissociation entre l’ancienneté d’entreprise et l’âge biologique

Le classement salarial dépend uniquement de l’expérience acquise auprès du dernier employeur, ce qui constitue un critère de gestion du personnel tout à fait classique.

L’éventuel passage à une catégorie supérieure à un âge plus avancé ne suffit pas à caractériser une rupture illicite de l’égalité de traitement.

L’absence de désavantage systématique pour les travailleurs âgés justifie la validation de la clause litigieuse par la juridiction siégeant à Luxembourg.

B. Le maintien de l’autonomie des négociations collectives

Le droit de l’Union « ne s’oppose pas à une disposition d’une convention collective » privilégiant la fidélité des salariés à leur employeur unique.

Cette solution préserve la liberté des partenaires sociaux tout en limitant l’extension excessive du concept de discrimination indirecte fondée sur l’âge.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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