Cour de justice de l’Union européenne, le 7 novembre 2024, n°C-588/22

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu, le six octobre deux mille vingt-cinq, une décision majeure concernant le régime des aides d’État. Ce litige s’inscrit dans le cadre de la crise sanitaire mondiale ayant gravement perturbé l’économie nationale d’un État membre de l’Union. Un projet de recapitalisation d’un transporteur aérien fut notifié à l’autorité de contrôle par le gouvernement de l’État membre concerné. L’institution déclara la mesure compatible avec le marché intérieur au titre de l’article cent sept, paragraphe trois, sous b, du traité. Une société concurrente introduisit un recours en annulation devant le Tribunal de l’Union européenne, lequel rejeta l’intégralité de sa demande en première instance. La requérante sollicite désormais l’annulation de cet arrêt en invoquant plusieurs erreurs de droit relatives à l’appréciation du dispositif de soutien. Le litige porte sur la faculté pour l’autorité de contrôle de déroger à ses propres encadrements réglementaires lors de crises économiques systémiques. La juridiction rejette le pourvoi et confirme ainsi la légalité de l’intervention publique de soutien au profit du transporteur national. L’analyse de cette décision suppose d’examiner la validation du cadre spécifique des aides avant d’aborder la confirmation du régime juridique dérogatoire.

I. La validation du cadre spécifique des aides destinées à remédier à une perturbation économique grave

A. La contribution autonome de l’aide à la restauration de l’économie nationale

La juridiction précise que l’article cent sept, paragraphe trois, sous b, n’exige pas qu’une mesure remédie seule à la perturbation économique. Elle affirme qu’une aide peut contribuer « à remplir l’objectif expressément visé à ladite disposition sans pour autant suffire à elle seule à atteindre cet objectif ». Cette interprétation téléologique préserve l’effet utile de la dérogation en évitant d’imposer des charges financières insupportables aux États membres. Les autorités nationales peuvent valablement choisir de soutenir une seule entreprise présentant une importance systémique pour la stabilité de l’économie. La nécessité de la mesure est établie dès lors que le bénéficiaire identifié rencontre des difficultés graves menaçant sa solvabilité immédiate.

B. L’admissibilité des dérogations aux lignes de conduite générales de l’autorité de contrôle

L’institution peut s’écarter de ses règles de conduite dans des circonstances spécifiques exceptionnelles invoquées par les autorités d’un État membre. La décision confirme que le non-respect de certaines exigences de l’encadrement temporaire ne suffit pas à démontrer l’existence de doutes sérieux. La juridiction valide l’inadaptation de certains mécanismes de hausse de rémunération lorsque la structure du capital de l’entreprise reste inchangée. Le maintien du statu quo ante justifie l’absence de mesures incitant l’État à réduire sa participation au capital social du bénéficiaire. La présence d’investissements privés concomitants limite les risques de distorsions de concurrence excessives au sein du marché intérieur. La compréhension de ces spécificités matérielles conduit naturellement à envisager le régime juridique global applicable à ces interventions.

II. La confirmation du régime juridique dérogatoire applicable aux mesures individuelles

A. L’absence d’obligation de mise en balance des intérêts concurrentiels

L’article cent sept, paragraphe trois, sous b, ne contient aucune obligation de pondérer les effets positifs et négatifs de l’aide. La juridiction souligne une différence textuelle fondamentale avec le paragraphe trois, sous c, de la même disposition du traité de fonctionnement. Les mesures concourant à ces objectifs sont réputées assurer « un juste équilibre entre leurs effets bénéfiques et leurs effets négatifs sur le marché intérieur ». L’autorité de contrôle n’est donc pas tenue d’effectuer une nouvelle appréciation de ces intérêts lors de son examen de compatibilité. Cette solution consacre la primauté de l’efficacité des mesures de sauvegarde sur la rigueur absolue des principes généraux du droit européen.

B. La prévalence du régime spécial des aides sur les principes généraux d’ordre public

L’aide individuelle instaure une différence de traitement inhérente à son caractère sélectif sans méconnaître pour autant le principe de non-discrimination. Le traité établit des dérogations spécifiques constituant des « dispositions particulières » au sens de l’article dix-huit relatif à la nationalité. Les entraves éventuelles à la libre prestation des services sont tolérées si elles sont indissolublement liées à l’objet de l’aide. La requérante doit prouver l’existence d’effets restrictifs dépassant ceux qui découlent directement de l’octroi d’un avantage sélectif validé. La juridiction conclut à la régularité de la motivation de l’acte attaqué malgré la brièveté de certaines justifications économiques fournies.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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