Cour de justice de l’Union européenne, le 8 février 2018, n°C-181/17

    La Cour de justice de l’Union européenne, le 8 février 2018, statue sur la validité d’une norme nationale restreignant l’accès à la profession de transporteur routier. La Commission européenne reproche à un État membre d’imposer aux entreprises la possession d’au moins trois véhicules pour obtenir une autorisation de transport public. Après une mise en demeure et un avis motivé restés sans effet, la Commission a saisi la Cour d’un recours en manquement contre l’État concerné. Le litige porte sur l’interprétation du règlement (CE) n° 1071/2009 fixant les conditions communes pour exercer l’activité de transporteur de marchandises par route. La question posée est de savoir si un État peut exiger un nombre minimal de véhicules supérieur aux prescriptions du droit de l’Union. La Cour déclare qu’en « exigeant des entreprises qu’elles disposent au moins de trois véhicules pour obtenir une autorisation de transport public, l’État membre a manqué aux obligations qui lui incombent ». L’analyse portera sur l’encadrement rigoureux de l’accès à la profession avant d’examiner la protection du marché contre les obstacles étatiques disproportionnés.

**I. L’encadrement rigoureux de l’accès à la profession de transporteur**

**A. Le caractère exhaustif des critères du règlement n° 1071/2009**

    Le règlement n° 1071/2009 harmonise les conditions d’exercice pour garantir une concurrence loyale et une liberté d’établissement effective entre les entreprises européennes. L’article 3 énumère quatre conditions impératives, dont l’honorabilité, la capacité financière, la compétence professionnelle et l’existence d’un établissement stable et effectif. Cette réglementation vise à supprimer les disparités nationales qui pourraient fausser les conditions de concurrence au sein du marché intérieur du transport.

**B. L’incompatibilité de l’exigence nationale d’un parc automobile minimal**

    La législation nationale imposait un seuil de trois véhicules, dépassant ainsi les exigences matérielles prévues par le droit dérivé pour prouver l’établissement stable. La Cour souligne qu’en « exigeant des entreprises qu’elles disposent au moins de trois véhicules », l’État ajoute une condition non prévue par le texte européen. Cette mesure exclut indûment les petits opérateurs du marché et fragilise l’uniformité des règles communes applicables au secteur du transport routier. Le respect scrupuleux des conditions d’établissement posées par le législateur européen garantit ainsi l’absence de barrières injustifiées au sein de l’espace économique.

**II. La protection du marché intérieur contre les obstacles étatiques disproportionnés**

**A. La prohibition des conditions additionnelles entravant la liberté d’établissement**

    Les États membres ne peuvent pas restreindre l’accès à une activité économique par des critères arbitraires non justifiés par des objectifs d’intérêt général. L’article 5, sous b), du règlement précise que l’entreprise doit disposer de véhicules, mais n’autorise aucunement la fixation d’un nombre minimal obligatoire. La solution retenue confirme que la volonté d’organisation économique nationale doit s’effacer devant le principe de primauté du droit de l’Union européenne.

**B. La portée limitée de la marge de manœuvre des États dans les domaines harmonisés**

    L’arrêt renforce la sécurité juridique des opérateurs en interdisant aux autorités nationales de durcir unilatéralement les conditions d’accès aux professions réglementées. Cette jurisprudence assure une application homogène du règlement n° 1071/2009 et prévient les discriminations fondées sur la taille ou la structure des entreprises. La décision marque ainsi la volonté du juge de sanctionner toute dérive protectionniste susceptible de fragmenter l’espace économique commun.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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