Cour de justice de l’Union européenne, le 8 septembre 2011, n°C-89/10

La Cour de justice de l’Union européenne a rendu une décision fondamentale le 8 septembre 2011 à la suite d’un renvoi préjudiciel. Ce litige opposait un particulier et une société commerciale à l’État membre devant le Tribunal de première instance de Bruxelles. Les requérants sollicitaient le remboursement de taxes perçues au titre d’un système de financement relatif à la santé animale. La juridiction nationale s’interrogeait sur la conformité d’un délai de prescription de cinq ans réservé aux seules créances publiques. Elle questionnait également la disparité des délais applicables aux actions en répétition de l’indu engagées entre des personnes privées. La question portait enfin sur l’influence d’un arrêt préjudiciel ultérieur sur le point de départ du délai de forclusion. La Cour affirme que « le droit de l’Union ne s’oppose pas » à l’application de délais raisonnables de prescription. Elle souligne que ses arrêts d’interprétation possèdent une valeur déclarative qui n’affecte pas le déclenchement du délai national. L’étude portera d’abord sur la validité des délais nationaux avant d’analyser le régime juridique du point de départ du délai.

I. La validité des délais de prescription nationaux encadrée

A. Le respect des principes d’équivalence et d’effectivité

L’ordre juridique interne désigne les juridictions compétentes et règle les modalités procédurales des recours en l’absence de réglementation européenne harmonisée. Ces modalités ne doivent pas être moins favorables que celles régissant les recours similaires fondés sur le seul droit interne. Elles ne doivent pas non plus rendre pratiquement impossible l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union. La Cour rappelle que la « fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion » respecte le droit européen. Un délai de cinq ans protège la sécurité juridique du contribuable et de l’administration sans entraver l’accès effectif au juge. Cette conformité globale n’exclut pas une analyse spécifique de la différence de traitement instaurée entre débiteurs publics et privés.

B. La licéité d’une disparité de délais selon la nature du débiteur

L’État peut opposer un délai de forclusion dérogatoire au régime commun de l’action en répétition de l’indu entre particuliers. Cette différence de traitement est admise si le délai s’applique uniformément aux recours fondés sur le droit de l’Union. Le principe d’effectivité n’est pas méconnu même si le délai de prescription est plus avantageux pour l’administration fiscale. L’intermédiaire ayant perçu la taxe doit toutefois conserver la possibilité juridique de se retourner contre l’État membre après le remboursement. Les particuliers agissant comme intermédiaires peuvent ainsi réclamer les montants indûment acquittés si l’action en garantie demeure possible. La validité intrinsèque du délai de prescription conduit à s’interroger sur les modalités temporelles de son application effective.

II. La stabilité du point de départ du délai de prescription

A. Le caractère purement déclaratif de l’interprétation préjudicielle

La détermination du point de départ du délai de prescription relève en principe de la compétence exclusive du droit national. La constatation par les juges d’une violation du droit de l’Union est sans incidence sur le déclenchement de ce délai. Un arrêt rendu sur renvoi préjudiciel possède une « valeur non pas constitutive mais purement déclarative » selon une jurisprudence établie. Ses effets remontent à la date d’entrée en vigueur de la règle de droit interprétée dans l’ordre juridique de l’Union. L’existence d’une décision européenne postérieure n’interrompt pas le cours du temps pour les créances nées antérieurement. L’absence d’effet constitutif de l’arrêt préjudiciel justifie alors le maintien de la forclusion pour garantir la sécurité juridique.

B. La préservation de la sécurité juridique face à l’illégalité

L’autorité nationale peut exciper de l’écoulement du délai sauf si son comportement propre prive totalement une personne de ses droits. La forclusion ne peut être opposée que si le justiciable disposait d’une possibilité réelle de faire valoir ses prétentions. La fixation du point de départ à la naissance de la créance n’empêche pas l’exercice des recours juridictionnels effectifs. La sécurité juridique impose que les situations acquises ne soient pas perpétuellement remises en cause par de nouvelles interprétations. Cette solution garantit enfin la stabilité des budgets publics tout en respectant l’autonomie procédurale des différents États membres.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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