Par un arrêt rendu le 9 décembre 2021, la Cour de justice de l’Union européenne précise les modalités de rémunération des congés annuels. La juridiction interprète ici l’article 7 de la directive 2003/88 relative à l’aménagement du temps de travail au sein des États membres. Un agent public, placé en incapacité de travail partielle pour maladie, bénéficiait d’une rémunération réduite à soixante-dix pour cent pour ses heures d’inactivité. Lors de ses congés annuels, son employeur a maintenu ce niveau de rémunération réduit en application de la réglementation nationale alors en vigueur. Le requérant a contesté cette décision devant le tribunal d’Overijssel, lequel a décidé d’interroger la Cour de justice à titre préjudiciel. La question posée porte sur la conformité d’une pratique nationale tenant compte de la réduction de salaire liée à la maladie pour calculer l’indemnité. La Cour juge que le droit de l’Union s’oppose à ce que la rémunération versée au titre du congé soit diminuée par l’incapacité antérieure. Elle souligne que le travailleur doit bénéficier de sa rémunération ordinaire pendant sa période de repos et de détente nécessaire à sa santé.
**I. L’affirmation du droit au maintien de la rémunération ordinaire**
**A. L’assimilation de l’incapacité à une période de travail effectif**
La Cour rappelle d’abord que le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l’Union européenne contemporain. Elle souligne que ce droit présente une « double finalité », visant le repos du travailleur et la disposition d’un temps de loisirs effectif. Les juges considèrent que les travailleurs absents pour maladie doivent être assimilés à ceux ayant effectivement travaillé durant la période de référence considérée. La survenance d’une maladie est jugée imprévisible et indépendante de la volonté de l’intéressé selon une jurisprudence désormais constante et très rigoureuse. Cette assimilation interdit donc de réduire les droits au congé annuel minimal garanti au motif que le salarié n’a pu accomplir ses tâches. L’absence pour raison médicale ne saurait constituer un obstacle à l’acquisition de droits complets à un repos annuel intégralement rémunéré par l’employeur.
**B. L’exigence d’une situation économique comparable**
Le juge européen précise ensuite que le terme « congé annuel payé » impose le maintien de la rémunération habituelle durant le temps du repos. Le travailleur doit être placé dans une situation « comparable aux périodes de travail » s’agissant du salaire global versé par son administration employeuse. La structure de la rémunération relève certes du droit national, mais elle ne doit pas nuire aux conditions économiques de la détente nécessaire. La Cour rejette l’argument consistant à maintenir simplement le salaire réduit perçu juste avant le départ en congé annuel de l’agent public concerné. Une telle pratique subordonnerait le droit au repos à une obligation de travail effectif à temps plein, ce qui est contraire à la directive. Le niveau de l’indemnité doit correspondre à ce que l’intéressé aurait perçu s’il avait pu exercer ses fonctions sans cette incapacité temporaire.
**II. La protection du droit au repos contre les contingences de l’incapacité**
**A. Le rejet d’une conditionnalité liée à l’activité réelle**
La décision souligne que la valeur du droit au congé ne saurait fluctuer selon que le travailleur est ou non en situation d’incapacité. Autoriser une variation de l’indemnité ferait dépendre le bénéfice de ce droit social de la date choisie pour exercer le repos annuel obligatoire. La Cour affirme que les droits doivent être fixés sans tenir compte de la réduction de salaire consécutive à une maladie imprévisible et involontaire. Elle rappelle que l’absence pour cause médicale doit être comptée dans la période de service pour le calcul de la rémunération afférente au congé. Cette position garantit que les aléas de santé n’affectent pas la substance même des garanties minimales offertes par le droit de l’Union européenne. L’interprétation retenue privilégie ainsi une protection uniforme des travailleurs indépendamment des modalités de rémunération fixées par les législations ou les pratiques nationales.
**B. La portée protectrice de la décision pour l’effectivité du congé**
L’objectif majeur de la juridiction est d’éviter que le travailleur ne soit incité à renoncer à son congé pour des raisons purement financières. Si la rémunération de congé était inférieure au salaire ordinaire perçu lors des périodes d’activité, le risque de renoncement serait alors bien réel. La Cour écarte la prémisse selon laquelle le maintien de la situation économique immédiate suffirait à respecter les exigences de la directive européenne précitée. Cette jurisprudence renforce l’effectivité du droit au repos en déconnectant son indemnisation des baisses de revenus subies durant les phases d’incapacité prolongée. Elle confirme ainsi la primauté de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs sur les considérations de nature purement économique. Le droit au congé payé demeure un acquis social intouchable dont les modalités de calcul ne sauraient être détournées par l’employeur.