Les pourvois formés au nom de l’État par les ministres sont dénommés recours alors que ceux qui
émanent d’une autre personne qu’un ministre sont appelés requêtes.
I. Dépôt et présentation des pourvois
A. Lieu de dépôt
1
Les recours et les requêtes et, en général, toutes les productions des parties sont déposées au
secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat.
B. Présentation
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Sauf dispositions contraires, l’introduction du pourvoi en cassation suit les règles relatives à
l’introduction de l’instance de premier ressort (code de justice administrative (CJA), art. R821-6).
En application des dispositions des articles
R411-2 du CJA et R411-2-1 du CJA,
le contribuable qui introduit un pourvoi doit acquitter la contribution pour l’aide juridique prévue par l’article 1635 bis
Q du CGI ou justifier qu’il bénéficie de l’aide juridictionnelle, à peine d’irrecevabilité de sa requête.
Les requêtes et mémoires doivent, à peine d’irrecevabilité, être accompagnés en vue des
communications, de copies en nombre égal à celui des autres parties en cause, augmenté de deux (CJA, art.
R411-3).
Toujours à peine d’irrecevabilité, copie de la décision attaquée doit, sauf impossibilité
justifiée, être jointe au pourvoi (CJA, art. R412-1)
C. Enregistrement
20
Les requêtes sont enregistrées par le secrétaire du contentieux. Elles sont en outre marquées,
ainsi que les pièces qui y sont jointes, d’un timbre indiquant la date de leur arrivée (CJA, art. R413-5).
Le secrétaire du contentieux délivre aux parties un certificat qui constate l’arrivée de la
requête au greffe. Sur leur demande, il certifie le dépôt des différents mémoires (CJA, art. R413-6).
II. Délai d’introduction des pourvois
A. Principes
1. Délai de présentation
30
Sauf disposition contraire, les arrêts des cours administratives d’appel peuvent être déférés
à la censure du Conseil d’Etat dans le délai de deux mois à dater de leur notification (CJA, art. R821-1).
Ainsi, en l’absence de dispositions spécifiques, les pourvois dirigés à l’encontre des arrêts
avant-dire droit doivent être introduits dans ce délai de deux mois.
Cf; en ce sens
CE, arrêt du 8 septembre 1999, n°127376.
La notification de l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel est constatée par l’avis
de réception postal de la lettre recommandée contenant cet arrêt.
Concernant le pourvoi en cassation en matière de sursis à exécution, le délai est, toutefois,
de quinze jours (CJA, art. R811-19).
Ce délai de quinze jours est également applicable en matière de référés, qu’il s’agisse des
référés liés à l’urgence, à l’exception du référé-injonction (CJA, art. R523-1) ou ceux non liés à l’urgence
(CJA, art. R533-3 et CJA, art.
541-5).
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Les requêtes enregistrées après la date d’expiration du délai de recours sont irrecevables. La
déchéance encourue pour inobservation des délais ne peut être combattue par aucune excuse.
Le contribuable ne peut utilement combattre la forclusion qui lui est opposée qu’en apportant
la preuve d’un retard anormal de transmission par le service de la Poste.
Remarque : Requête adressée à un tribunal administratif ou à une cour
administrative d’appel. En pareil cas, en vertu des articles R351-1 à R351-9 du CJA instituant une procédure de
règlement des questions de compétence (cf. BOI-CTX-ADM-30-30), la date à retenir pour apprécier la recevabilité du recours est celle de son enregistrement au secrétariat
de la juridiction, qui, saisie à tort, procède ou aurait dû procéder à la transmission du dossier au Conseil d’Etat
(CE, arrêt du 21 juin 1974, req. n°
90285).
2. Cas particulier : demande d’aide juridictionnelle
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En application des dispositions de l’article
article R441-1 du CJA, les parties peuvent, le cas échéant, réclamer le bénéfice de l’aide juridictionnelle prévue par
la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.
Une demande d’aide juridictionnelle est interruptive de délai de recours
(décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, art.
39).
Ainsi, en cas de pourvoi devant le Conseil d’Etat, la réception d’une demande d’aide juridictionnelle par le bureau établi près de cette juridiction interrompt le délai de recours.
Un nouveau délai de deux mois court à compter du jour de la réception par l’intéressé de la
notification de la décision du bureau d’aide juridictionnelle. Mais, bien entendu, cette règle ne vaut que si la demande d’aide juridictionnelle est présentée dans le délai de deux mois.
Bien qu’il ait été enregistré au secrétariat du Conseil d’Etat après l’expiration du délai
d’appel de deux mois, le pourvoi d’un contribuable ne peut être regardé comme tardif dès lors que le requérant a déposé dans le délai de deux mois précité une demande d’aide juridictionnelle auprès du
bureau d’aide juridictionnelle (CE, 27 novembre 1964, RO, p. 195).
La requête présentée par un contribuable dans les deux mois ayant suivi la notification de
la décision qui a rejeté sa demande d’admission au bénéfice de l’aide juridictionnelle n’est pas recevable dès lors qu’elle ne contient pas l’exposé des faits et moyens sur lesquels le requérant
entend fonder son pourvoi. La production, postérieurement au délai de deux mois précité, d’un mémoire ampliatif contenant lesdits faits et moyens ne saurait couvrir le vice de forme susvisé (CE, 30
janvier1970, req. n° 76854, RJ, n° IV, p. 16).
3. Computation des délais
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En l’état actuel de la jurisprudence, les délais fixés par la loi pour saisir le Conseil
d’Etat doivent être considérés comme des délais francs, en ce sens que ni le jour du point de départ (jour de réception de la notification de la décision attaquée), ni le jour de l’échéance ne doivent
être retenus pour la computation des délais.
Par ailleurs, les délais se calculent de quantième à quantième, quel que soit le nombre de
jours composant les mois compris dans les délais. Ils expirent à 24 heures.
Exemple n° 1: Si la notification a été reçue par le contribuable le 18 mai, le
délai de deux mois expire le 18 juillet à 24 heures ; mais le jour de l’échéance ne devant pas être compté, le dernier jour utile pour saisir le Conseil d’Etat est le lendemain, 19 juillet.
De même, si la notification a eu lieu le 30 décembre, le 31 décembre, le 30 juin ou le 31
juillet, le Conseil d’Etat devra être saisi au plus tard le 1er mars dans les deux premiers cas, le 31 août dans le troisième, et le 1er octobre dans le dernier cas.
Mais conformément à la règle posée par
l’article 642 du Code de procédure civile (C. proc. civ.), si le dernier jour du délai est un samedi, un dimanche ou un jour
férié [sont jours fériés : le dimanche, le 1er janvier, le lundi de Pâques, le 1er mai, le 8 mai, l’Ascension, le lundi de la Pentecôte, le 14 juillet, le 15 août, le
1er novembre, le 11 novembre et le 25 décembre] ou chômé, le délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Exemple n° 2 : Si dans les conditions prévues par l’exemple n°1 le 19 juillet
est un samedi, le dernier jour utile est le lundi 21 juillet.
B. Délais spéciaux de distance
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Le délai général de deux mois ouvert aux contribuables pour se pourvoir en cassation des
décisions rendues par les cours administratives d’appel est augmenté des délais prévus à l’article 643 du C. proc. civ :
– un mois pour les personnes qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à
La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, à Saint-Pierre-et-Miquelon, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et
antarctiques françaises ;
– deux mois pour celles qui demeurent à l’étranger.
C. Présentation d’un mémoire complémentaire
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Lorsque le pourvoi mentionne l’intention du requérant ou du ministre de présenter un mémoire
complémentaire, la production annoncée doit parvenir au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la requête a été enregistrée
(CJA, art. R611-22, al. 1er).
Ce délai est réduit à un mois, lorsque le pourvoi est dirigé contre une
décision juridictionnelle statuant sur des conclusions à fin de sursis à exécution (CJA, art. R611-23, al. 1er).
Il est de quinze jours lorsque le pourvoi en cassation est dirigé contre une
décision prise par le juge des référés, sauf s’il s’agit des procédures visées aux articles L552-1 du CJA et
L552-2 du CJA (CJA,
art. R611-23, al. 2).
En cas d’urgence, ces délais peuvent être réduits par décision du président de
la sous section à laquelle le pourvoi initial a été attribué. Dans ce cas, la décision est notifiée au signataire de la requête
(CJA, art. R611-24, al. 1er).
Enfin, le requérant ou le ministre à qui le dossier a été communiqué en vue de
la production d’un nouveau mémoire est tenu de le restituer dans le délai qui lui a été imparti lors de la communication
(CJA, art. R611-25).
Le délai imparti pour produire le mémoire complémentaire annoncé dans une requête sommaire
est un délai franc (CE, arrêt du 5 janvier
1985, n° 52969) qui n’est assorti d’aucun délai de distance
(CE, arrêt du 13 janvier 1984,
n°50187).
Lorsque l’une des parties est tenue de produire un mémoire complémentaire ou
de rétablir le dossier qui lui a été communiqué en vue de cette production, l’examen préalable d’admission du pourvoi (cf. BOI-CTX-ADM-30-30) est différé jusqu’à
l’accomplissement de cette obligation, sous réserve que le délai prévu par les articles
R611-22,
R611-23, R611-24 et
R611-25 du CJA ne soit pas expiré.
A défaut, la partie qui a manqué à son obligation est réputée s’être désistée
de l’instance, même si elle s’est exécutée après l’expiration du délai qui lui était imparti.
Le Conseil d’Etat donne acte de ce désistement dans les formes prévues par
l’article R822-5 du CJA.
III. Forme et contenu des pourvois
90
Pour être recevables en la forme et produire leur plein effet, les pourvois au Conseil d’Etat
doivent réunir un certain nombre de conditions.
A. Forme des pourvois
1. Forme matérielle des pourvois
100
Le Conseil d’Etat est saisi par voie de pourvoi en cassation émanant soit du contribuable soit
du ministre.
Les pourvois en cassation sont des demandes qui, en l’absence de disposition particulière
réglant leur présentation, peuvent être établis sous forme de simple lettre.
2. Qualité pour agir
a. Pourvoi du ministre
110
Les recours devant le Conseil d’Etat présentés au nom de l’Administration doivent être signés
par le ministre ou par un fonctionnaire ayant reçu délégation à cet effet.
À cet égard, le directeur général des Finances publiques a, en toutes matières entrant dans
ses attributions, délégation permanente de signature du ministre intéressé pour la présentation des défenses et observations adressées au Conseil d’Etat sur les requêtes introduites contre
l’administration ainsi que sur les recours formés par l’administration devant le Conseil d’Etat.
Le directeur général des Finances publiques peut, à son tour, déléguer cette signature à un ou
plusieurs fonctionnaires de ses services ayant au moins le grade d’administrateur civil de deuxième classe ou un grade équivalent .
Le recours au ministère d’un avocat au Conseil d’Etat n’est pas nécessaire, sauf dans le cas
où des observations orales doivent être présentées à l’audience (CJA, art. R432-4).
b. Pourvoi du contribuable
120
Seuls les avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ont qualité pour se pourvoir en
cassation au nom d’un contribuable (CJA, art. R821-3).
Une requête introductive présentée sur papier à en-tête d’un avocat au Conseil d’Etat mais
non signée est régularisée par la présentation de mémoires ultérieurs dûment signés par cet avocat
(CE, arrêt du 1er juillet 1991, n°61065).
Lorsque la notification de la décision de la cour administrative d’appel ne comporte pas la
mention, au demeurant obligatoire, de la nécessité de présenter un pourvoi en cassation par le ministère d’un avocat, le requérant est invité par le Conseil d’Etat à régulariser sa requête
(CE, 7 juin 1989, n° 106365).
En revanche, est irrecevable un recours en cassation contre un arrêt de cour administrative
d’appel dès lors qu’il est présenté sans ministère d’avocat et que l’arrêt mentionnait l’obligation d’un tel ministère pour se pourvoir en cassation (CE, CAPC, séance du 6 février 1991, n° 118660).
B. Contenu des pourvois
130
Tout pourvoi au Conseil d’Etat doit contenir l’exposé sommaire des faits et moyens, les
conclusions, les nom et domicile des parties (CJA, art. R411-1) et être accompagné de la décision attaquée (cf.
I-B).
1. Désignation des parties
140
Le pourvoi doit, bien entendu, comporter les indications indispensables pour identifier le
contribuable, c’est-à-dire son nom et l’adresse de sa résidence.
Cependant, la mention de l’adresse du requérant ne constitue pas une formalité exigée à peine
d’irrecevabilité, puisque la signature de l’avocat au Conseil d’Etat vaut élection de domicile en son cabinet.
2. Indication de la décision attaquée
150
Outre les mentions indispensables à l’identification des parties, le pourvoi comporte
l’indication de la décision attaquée.
Il précise, le cas échéant, les chefs de la décision auxquels le pourvoi est limité.
3. Exposé des moyens
160
Les moyens de cassation énoncés dans le mémoire du demandeur ne peuvent être que des moyens de
droit qui, eux-mêmes, ne sont recevables que s’ils ont été préalablement soumis aux juges du fond.
Les parties ne peuvent donc présenter des moyens nouveaux.
Toutefois, sont recevables :
– les moyens nouveaux tirés de la décision soumise à l’appréciation du Conseil d’Etat :
En ce sens : pour l’insuffisance de motivation
CE,arrêt du 10 avril 1991, n° 107683, pour
la contradiction de motifs : CE, arrêt du 15
janvier 1992, n° 110457 ;
– les moyens d’ordre public même s’ils n’ont pas été soulevés devant les juges du fond dès
lors que ceux-ci avaient l’obligation de les examiner d’office (exemple : incompétence, méconnaissance du champ d’application de la loi).
– le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés
garantis par la Constitution (cf procédure dite de la « question prioritaire de constitutionnalité », cf. BOI-CTX-DG-20-60-10)
4. Conclusions
170
Dans les conclusions, le requérant expose l’objet de la demande.
Toutefois, le juge de cassation se bornant, le cas échéant, à annuler la décision déférée, des
conclusions à fin de réformation sont irrecevables.
Il en va de même, s’agissant de conclusions à fin d’expertise.
Enfin, les conclusions nouvelles sont également irrecevables devant le juge de cassation dès
lors que celui-ci ne peut statuer sur une question qui n’a pas été préalablement examinée par les juges du fond.
5. Productions
a. Production de copies du pourvoi
180
Ainsi qu’il a déjà été évoqué au paragraphe n°10, les pourvois au Conseil d’Etat, ainsi
d’ailleurs que les mémoires produits postérieurement doivent être accompagnés, en vue de leur communication, de copies, en nombre égal à celui des autres parties en cause, augmenté de deux
(CJA, art. R411-3).
En cas de nécessité, le président de la sous-section chargée de l’instruction, exige des
parties intéressées la production de copies supplémentaires (CJA, art. R411-4).
b. Production de la décision déférée
190
Il est rappelé (cf. I-B) que les pourvois au Conseil d’Etat
doivent, obligatoirement, être accompagnés de la décision faisant l’objet du pourvoi (CJA, art. R412-1).
La non-production de la décision attaquée entraîne l’irrecevabilité de la requête, lorsque la
notification de ladite décision mentionnait l’obligation de joindre copie de cette dernière à l’appui du pourvoi (CJA,
art. R751-5, al 1) et ce, sans invitation à régulariser de la part du juge.
Dans l’hypothèse où cette mention ne figurait pas dans la notification, l’irrecevabilité ne
peut être opposée sans invitation préalable à régulariser.
c. Productions diverses
200
En cas de nécessité, le président de la section du contentieux peut enjoindre aux redevables
de produire, en plus des copies visées ci-dessus, copie, sur papier libre, des pièces jointes aux requêtes ou aux mémoires
(CJA, art. R412-2).
Par ailleurs, lorsque leur nombre, leur volume ou leurs caractéristiques font obstacle à la
production de copies des pièces jointes, les pièces sont communiquées aux parties au secrétariat du contentieux ou à la préfecture
(CJA, art. R412-3).