REC – Sûretés et garanties du recouvrement – Cautionnement – Obligations mises à la charge de la caution – Obligations de couverture et de paiement

1

Le contrat de cautionnement comporte deux obligations mises à la charge de la caution : une
obligation de couverture qui naît dès la souscription de l’acte et définit le cadre de la garantie accordée au créancier et une obligation de paiement, qui constitue l’objet même de l’engagement et
peut, sous certaines conditions, se trouver éteinte.

I. L’obligation de couverture

10

L’obligation de couverture permet de déterminer l’étendue de la dette garantie par la caution.

Aux termes de l’article
2290 du
code civil, le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le
débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.

Par ailleurs, l’article 2292 du même
code
, qui prévoit qu’on ne peut étendre le cautionnement au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté, pose le principe de l’interprétation stricte du cautionnement.

20

Lorsque la caution s’est seulement obligée pour une somme déterminée en principal, son
engagement ne s’étend pas aux intérêts et accessoires
(Cass civ.
1re
9 décembre 1986
, n°85-13.252 et
16 juin 1987,
n°86-12.051).

Les accessoires, tels qu’ils ont été définis ci-dessus, ne sont en effet pris en charge par la
caution qu’à la condition d’avoir été mentionnés dans l’acte de cautionnement lui-même.

Les limites étant fixées, en matière de cautionnement d’une somme déterminée, par la mention
manuscrite qui fait état de cette somme, l’acte souscrit doit contenir une clause manuscrite indiquant d’une façon explicite et non équivoque que la caution s’engage à payer les intérêts et
accessoires de la dette garantie (Cass. civ.
1re
3 mai 1984,
n°82-13.858 et
13 octobre 1987,
n°85-18.419).

30

En outre, le cautionnement souscrit par une personne physique par acte sous seing privé envers
un créancier professionnel, est, sous peine de nullité, limité dans son montant. Ce montant couvre le paiement du principal, des intérêts, pénalités et intérêts de retard
(Code de la consommation, art. L341-2).

Il doit contenir la mention manuscrite suivante : « En me portant caution de X… dans la
limite de la somme de … couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de … je m’engage à rembourser au prêteur les sommes
dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même ».

Remarque : Le prêteur s’entend ici du comptable public

II. L’obligation de paiement

40

Lorsque les conditions de sa mise en œuvre sont réunies
(BOI-REC-GAR-20-40-30), l’obligation de paiement qui pèse sur la caution permet au créancier de réclamer à l’intéressé le montant de la dette garantie.

50

Elle ne saurait échapper à la responsabilité qui lui incombe en se prévalant du changement
intervenu dans une situation qui avait déterminé son engagement.

Est ainsi sans incidence sur l’obligation de la caution envers le créancier :

– la rupture du lien conjugal entre le débiteur et la caution
(Cass. com. 19 janvier 1981, n°79-11.339) ;

– le changement de structure de la société débitrice, sans création d’une personne morale
nouvelle (Cass.
com.
9 décembre 1997, n°95-14.115
) ; sauf convention contraire, l’obligation de la caution subsiste
(Cass.
com.
20 février 2001 n°97-21.289
) ;

– la cessation des fonctions de gérant, caution de la société n’emporte pas, à elle seule,
la libération de cette caution, sauf si celle-ci a fait desdites fonctions la condition déterminante de son engagement
(Cass. com.
28 mai 2002, n° 98-00.281 et
14
o
ctobre
2008,
n°07-16.947).

III. Extinction de l’obligation de paiement

La caution est en droit d’opposer une exception d’extinction de la dette principale ou de se
prévaloir de la perte du bénéfice de la subrogation.

A. Remise ou extinction de la dette du débiteur

60

L’article
2313 du code civil prévoit que la caution peut opposer au créancier toutes
les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et sont inhérentes à la dette.

Elle est ainsi fondée à faire valoir que la dette du redevable se trouve éteinte par l’une des
causes prévues par l’article 1234 du
code civil (notamment le paiement, la remise de dette, la compensation, la
prescription).

70

Pour les causes d’extinction liées à l’existence d’une procédure collective (cf section 4 –
Incidences d’une procédure collective- BOI-REC-GAR-20-40-40)

1. Le paiement

80

La caution peut invoquer les règles prévues aux articles
1253 et 1256 du code
civil
qui sont relatives à l’imputation des paiements faits par le débiteur principal
(Cass. civ. 19 janvier 1994,
n°92-12585).

Par ailleurs, des précisions ont été apportées par la jurisprudence :

Lorsqu’un cautionnement ne garantit qu’une partie de la dette, les paiements partiels faits
par le débiteur principal s’imputent d’abord, sauf convention contraire, sur la portion de la dette non cautionnée
(Cass. com. 5 novembre 1968, Bull. civ. IV n°
306 p. 275
et 28 janvier 1997,
n°94-19.347).

Lorsqu’un même cautionnement garantit plusieurs dettes d’une même personne envers un
créancier unique, à défaut de stipulation contraire convenue entre la caution et le créancier, celui-ci impute le paiement partiel qu’il reçoit de la caution en fonction de son propre intérêt
(Cass. com. 13 décembre 1988,
n°86-18.901).

Enfin, si le redevable reste débiteur de plusieurs dettes échues aux mêmes dates, lorsqu’un
cautionnement garantit une dette et non l’autre, l’imputation des paiements du redevable s’effectue sauf expression de la volonté de ce dernier, sur la dette cautionnée car, par cette imputation, le
débiteur se libère à la fois vis-à-vis du créancier et des cautions et non du seul créancier
(Cass. civ.
1re
29 octobre 1963, Bull. civ. I n° 462 p. 393
).

2. Les remises

90

Aux termes de l’article 1287 du
code civil, les remises ou décharges conventionnelles accordées au
débiteur principal libèrent la caution.

3. La prescription

100

La prescription acquise au débiteur principal éteint le cautionnement.

Par ailleurs, la renonciation par le débiteur à la prescription ne saurait faire renaître
l’obligation de la caution.

4. Défaut de déclaration à la procédure collective ouverte à l’encontre du redevable principal

110

Antérieurement à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, le
défaut de déclaration dans le délai légal au passif du redressement ou de la liquidation judiciaire du débiteur principal, prévue par l’article 53 dernier alinéa de la loi du 25 janvier 1985, pouvait
être opposé au créancier dès lors qu’il avait pour sanction une extinction de la créance
(Cass.
com
. 17 juillet 1990,
89-13.439
et 6 décembre 1994,
n°93-12.321).

120

Depuis la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, le défaut de
déclaration dans le délai légal au passif d’une procédure collective n’entraîne plus, au regard de l’article L622-26 du code de
commerce
, l’extinction de la créance.

Il résulte des dispositions de
l’article L622-26 du code de commerce, que la défaillance du
créancier ayant pour effet, non d’éteindre la créance, mais d’exclure son titulaire des répartitions et dividendes, cette sanction ne constitue pas une exception inhérente à la dette, susceptible
d’être opposée par la caution, pour se soustraire à son engagement
(Cass.
com. 12 juillet 2011,
09-71.113).

Dès lors, le défaut de déclaration dans le délai légal au passif d’une procédure
collective du débiteur principal, ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer au créancier.

B. Bénéfice de la subrogation

130

Aux termes de l’article
2314 du
code civil, la caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits,
hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de la caution.

1. Conditions de la décharge

140

Pour que le bénéfice de la subrogation puisse être opposée au créancier, trois conditions
doivent être réunies : une faute du créancier, entraînant un dépérissement de droits préférentiels, ce dépérissement faisant naître un préjudice pour la
caution
.

S’agissant de la faute du créancier, l’article
2314 s’applique aussi bien au cas où la faute consiste en un acte positif, tel que la mainlevée d’une hypothèque
(Cass. civ.
1re,
6 juin 2001
,
98-22.640)
ou en une abstention tel que le défaut de renouvellement d’une inscription hypothécaire
(Cass. com.
5 juillet 2005, n°04-12.770)

La disparition des sûretés doit toutefois être imputable au créancier ou à son mandataire.
La caution n’est donc pas déchargée si la perte des droits et garanties attachés à la créance n’est pas le fait exclusif du créancier
(Cass.
c
iv. 3 mars
1998
,
n°96-12.685).

Les droits dont la perte permet à la caution de bénéficier de l’article
2314 sont ceux susceptibles de conférer à leur titulaire un avantage particulier pour le recouvrement de leur créance.

C’est ainsi, par exemple, qu’a été retenue la perte d’une hypothèque
(Cass. civ.
1
re
6 juin 2001, n°98-22.640
), d’un nantissement de fonds de commerce
(Cass. com. 23 novembre 2004, n°03-16.196)
ou d’un privilège
(Cass.
civ.
1
re
3 avril 2007, n°06-12.531
)

En revanche, la simple prorogation du terme consentie par le créancier au débiteur
(Code civil, art.
2316) ou le fait de ne pas poursuivre celui-ci à l’échéance
(Cass. civ. 3 mai 1995, n°93-11.300) ne
permet pas à la caution de se prévaloir de l’article 2314 du
code civil.

De même, la perte du droit de gage général qu’a tout créancier à l’encontre de son débiteur
ne peut justifier l’application de l’article 2314, dans la mesure où le droit de gage général ne confère aucun droit préférentiel au
créancier (Cass.
com. 8 juin 1999, n°96-13.333)

Selon l’article 2314, la
caution n’est libérée, lorsque la subrogation aux droits, privilèges et hypothèques du créancier ne peut plus s’opérer en sa faveur, que si ces garanties existaient antérieurement au cautionnement ou
si le créancier s’était engagé à les prendre
(Cass.
c
om.
25 novembre
2008
,
07-19.182).

Toutefois, la caution se trouve dégagée de son obligation lorsqu’elle pouvait, au moment où
elle s’est engagée, normalement croire que le créancier prendrait les garanties que la loi attache à sa créance
(Cass.
c
iv.
1
re
9 mai
1994
,
9121.162).

Le bénéfice de subrogation ne joue que si un préjudice a été subi par la caution et si
celle-ci aurait pu tirer un profit effectif des droits, hypothèques et privilèges susceptibles de lui être transmis par subrogation
(Cass. civ.
1re
25 juin 1980,
n°79-11591,
Cass.
c
om. 27 février 1996, n°94-14.313).

Si la caution perd le droit à répartition des dividendes du fait que le créancier a omis de
déclarer sa créance à une procédure collective, la caution doit démontrer qu’elle a subi un préjudice pour s’exonérer de son engagement. Il n’y a préjudice que si le droit à répartition aurait permis
au créancier d’être désintéressé.
(Cass.
com. 12 juillet 2011,
09-71.113).

2. Mise en œuvre du bénéfice de la subrogation

150

Il appartient à la caution d’indiquer quel droit précis, susceptible de permettre une
subrogation, a été perdu du fait de la seule inaction du créancier
(Cass. civ.
1
re
22 mai 2002,
n
°99-17.245).

Il appartient à la caution qui invoque l’extinction de son engagement de rapporter la
preuve que la subrogation a été rendue impossible par le fait du créancier
(Cass. civ.
1
re
13 novembre 1996, n°94-16.475
).

Mais, il revient au créancier, pour ne pas encourir la déchéance de ses droits contre la
caution, d’établir que la subrogation qui est devenue impossible par son inaction n’aurait pas été efficace
(Cass. civ. 3e, 4 décembre 2002,
n°01-03.567
).

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture