Tribunal judiciaire de Chartres, le 17 juin 2025, n°24/00788

Une ordonnance de référé du 17 juin 2025, rendue par le juge des contentieux de la protection de Chartres, tranche un litige locatif autour d’une clause résolutoire. Un bail d’habitation porte sur un appartement à Chartres pour un loyer modeste, avec des impayés récurrents malgré un versement ponctuel récent. Un commandement de payer du 22 juillet 2024, reproduisant la clause résolutoire, est suivi d’une assignation en référé signifiée le 5 décembre 2024. Le représentant de l’occupant sollicite des délais, propose un échelonnement de cent euros mensuels, tandis que le bailleur s’en rapporte sur ce point.

La préfecture est saisie dans les délais légaux, la CCAPEX également, et l’audience se tient le 13 mai 2025 avant délibéré au 17 juin. La question est de savoir si la clause résolutoire, réputée acquise après expiration du délai suivant commandement, peut voir ses effets suspendus au regard de l’article 24. Se posait aussi l’articulation temporelle de la loi du 27 juillet 2023, d’application immédiate, avec un commandement visant l’ancienne rédaction. Le juge constate que « le bail s’est trouvé résilié de plein droit à compter du 23 septembre 2024 » du fait des impayés non régularisés. Il retient néanmoins que « il convient de suspendre les effets de la clause résolutoire » au regard de la reprise du loyer courant et d’une capacité d’apurement. À défaut de respect des délais, il fixe « à titre provisionnel le montant de l’indemnité d’occupation mensuelle due à compter du 23 septembre 2024 ». La dette « sera apurée par mensualités de 100,00 euros », sous peine de reprise des effets et d’expulsion avec le concours de la force publique. La décision rappelle que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire ».

I. Le sens et la technique retenus

A. Recevabilité et office du référé

Le juge vérifie d’abord les formalités protectrices et retient la recevabilité de l’action. Il constate la dénonciation préfectorale plus de six semaines avant l’audience, ainsi que la saisine préalable de la CCAPEX. L’office du référé est assumé avec sobriété, sur le terrain de l’urgence et de l’absence de contestation sérieuse, pour ordonner des mesures proportionnées et provisoires.

Le dispositif le rappelle explicitement en renvoyant le fond: « AU PRINCIPAL, RENVOYONS les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront ». Cette formule situe la décision dans le cadre des articles 834 et 835 du code de procédure civile, sans excéder les pouvoirs de la juridiction. La provision sur arriéré et l’indemnité d’occupation répondent à l’exigence d’une obligation non sérieusement contestable, appréciée à partir des pièces et de l’actualisation des comptes.

B. Clause résolutoire: acquisition et suspension

Le juge constate l’acquisition légale de la clause résolutoire, en reprenant l’économie de l’article 24. Il souligne que « Le commandement de payer délivré le 22 juillet 2024 reproduisait la clause résolutoire insérée au bail et les dispositions exigées à l’article 24 de la loi du 6 Juillet 1989 ». Constatant l’absence de régularisation dans les deux mois, il énonce que « le bail s’est trouvé résilié de plein droit à compter du 23 septembre 2024 ».

La décision articule ensuite ce constat avec le pouvoir d’octroi de délais, conditionné à la reprise du loyer courant et à la capacité d’apurement. Elle motive ainsi la suspension: « il convient de suspendre les effets de la clause résolutoire » sous réserve du respect d’un échelonnement réaliste. Le dispositif dessine un régime clair et incitatif: « DISONS qu’en cas de respect […] la résiliation du bail sera réputée n’avoir jamais été acquise ». À l’inverse, « DISONS qu’à défaut d’un seul versement à son échéance […] la résiliation reprendra tous ses effets ».

II. Valeur et portée de la solution

A. Règles transitoires et application dans le temps

La décision tranche la délicate question temporelle en ces termes: « Il sera donc fait application des dispositions de la Loi du 06 juillet 1989 dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la Loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 ». Le raisonnement s’ancre dans la référence matérielle du commandement, qui reproduit l’ancienne rédaction, notamment quant au délai de régularisation.

Cette option se défend par la sécurité juridique, même si l’affirmation d’une application immédiate des textes nouveaux pouvait inviter à distinguer entre règles de forme et de fond. Le choix de ne pas bouleverser l’acte de poursuite déjà délivré évite une insécurité sur l’issue du commandement. L’enjeu est circonscrit, car la juridiction corrige l’effet automatique par la suspension adossée à des critères stricts.

B. Enjeux pratiques et équilibre des intérêts

La solution concilie l’exigence de paiement et la prévention des expulsions. Le juge encadre l’occupation postérieure par une indemnité, « à titre provisionnel », afin d’éviter toute gratuité de l’occupation en cas de défaillance. Le créancier obtient une provision significative et la garantie d’une reprise des effets en cas de manquement minimal.

La portée pratique est nette. Conditionner l’éviction à un échec du plan donne une perspective de régularisation durable, sans renoncer à l’effectivité des clauses contractuelles. L’affirmation selon laquelle « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire » renforce l’exécution, tout en laissant place à l’ajustement au fond si nécessaire. L’équilibre atteint se montre opératoire pour la gestion des impayés d’habitation.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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