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Le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage constitue l’une des voies procédurales issues de la réforme du 26 mai 2004, permettant aux époux de mettre fin à leur union sans avoir à établir de faute. Le tribunal judiciaire de Dijon, par un jugement rendu le 13 juin 2025, offre une illustration de cette procédure dans son application quotidienne.
Une épouse de nationalité marocaine née en 1981 et un époux de nationalité française né en 1970 se sont mariés le 14 septembre 2019 au Maroc. Les époux ont signé un procès-verbal d’acceptation du principe de la rupture du mariage les 1er et 5 juin 2024. Une ordonnance d’orientation et de mesures provisoires a été rendue le 13 septembre 2024. L’affaire a été appelée à l’audience en chambre du conseil du 14 avril 2025.
Les deux époux sollicitaient le prononcé de leur divorce sur le fondement de l’article 233 du code civil. Aucune demande de prestation compensatoire n’a été formulée. Les parties n’ont pas davantage saisi le juge de questions relatives à la liquidation de leur régime matrimonial.
La question posée au juge aux affaires familiales était celle de savoir si les conditions du divorce accepté étaient réunies et quels effets devaient être attachés au prononcé de cette décision.
Le tribunal prononce le divorce dans les conditions de l’article 234 du code civil. Il ordonne la mention du divorce en marge des actes d’état civil. Il reporte au 20 juin 2024 la date des effets du divorce entre époux concernant leurs biens. Le juge constate la révocation de plein droit des avantages matrimoniaux et invite les parties à procéder au partage de leur régime matrimonial devant notaire.
Cette décision permet d’examiner les conditions du divorce accepté telles qu’elles résultent de la volonté concordante des époux (I) avant d’analyser les effets patrimoniaux attachés au prononcé du divorce (II).
I. Le prononcé du divorce fondé sur l’acceptation du principe de la rupture
Le divorce accepté repose sur une manifestation de volonté des époux dont le juge vérifie la régularité (A), ce qui conduit à un prononcé dépourvu de tout examen des causes de la mésentente (B).
A. La double acceptation du principe de la rupture
Le divorce prévu aux articles 233 et 234 du code civil suppose que les deux époux acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci. En l’espèce, le tribunal relève l’existence d’un « procès-verbal d’acceptation du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci signé par les époux les 1er et 5 juin 2024 ».
Cette acceptation revêt un caractère irrévocable conformément à l’article 233 alinéa 2 du code civil. Le décalage de quatre jours entre les deux signatures traduit le caractère personnel de l’engagement de chaque époux. La présence de deux avocats distincts, l’un pour l’épouse et l’autre pour l’époux, garantit que chacun a pu bénéficier d’un conseil indépendant avant de consentir à la rupture.
Le procès-verbal constitue le socle de la procédure. Son existence dispense le juge de rechercher si des faits imputables à l’un ou l’autre des époux justifieraient le divorce. La brièveté du mariage, célébré en septembre 2019, n’affecte pas la recevabilité de la demande dès lors que l’acceptation est régulièrement constatée.
B. L’abstention judiciaire quant aux motifs de la rupture
L’article 234 du code civil prévoit que le juge prononce le divorce s’il « acquiert la conviction que chacun des époux a donné librement son accord ». Le tribunal de Dijon prononce le divorce « dans les conditions de l’article 234 du code civil », formule qui atteste de la vérification opérée.
Le juge ne motive pas le divorce par référence à des griefs. Il se borne à constater la régularité formelle de l’acceptation. Cette abstention caractérise le divorce accepté par opposition au divorce pour faute. Elle préserve la dignité des époux en évitant l’exposé public de leurs différends.
La procédure s’est déroulée en chambre du conseil, ce qui garantit la confidentialité des débats. Le jugement est prononcé publiquement mais son contenu se limite aux effets juridiques du divorce. Les motifs de la décision apparaissent d’ailleurs occultés dans l’expédition, ce qui confirme la discrétion attachée à cette forme de divorce.
Le prononcé du divorce emporte des conséquences patrimoniales que le jugement organise selon les règles issues de la réforme de 2016.
II. Les effets patrimoniaux du divorce prononcé
Le jugement fixe la date des effets du divorce entre époux (A) et tire les conséquences de l’absence de demande de prestation compensatoire et de partage (B).
A. Le report de la date des effets patrimoniaux
Le tribunal « reporte au 20 juin 2024 la date de prise d’effet du présent jugement dans les rapports entre les époux en ce qui concerne leurs biens ». L’article 262-1 du code civil permet au juge de fixer cette date à la cessation de la cohabitation et de la collaboration.
Le choix du 20 juin 2024 correspond vraisemblablement à la date à laquelle les époux ont cessé de vivre ensemble ou de collaborer économiquement. Cette date est postérieure de quelques semaines à la signature du procès-verbal d’acceptation. Elle est antérieure de près de trois mois à l’ordonnance d’orientation du 13 septembre 2024.
Le report présente un intérêt pratique considérable. Il détermine la composition de l’actif et du passif de la communauté ou de l’indivision selon le régime matrimonial applicable. Les acquisitions et les dettes postérieures à cette date relèvent du patrimoine propre de chaque époux.
Le tribunal constate également « la révocation de plein droit des avantages matrimoniaux qui ne prennent effet qu’à la dissolution du mariage ou au décès de l’un des époux ». Cette révocation résulte de l’article 265 du code civil. Elle s’applique sauf volonté contraire des époux, laquelle n’a pas été exprimée en l’espèce.
B. L’absence de demande relative aux effets pécuniaires du divorce
Le tribunal « constate l’absence de demande de prestation compensatoire ». Cette mention revêt une importance particulière. L’article 270 du code civil prévoit que la prestation compensatoire est destinée à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux.
L’absence de demande peut s’expliquer par plusieurs facteurs. La durée du mariage, inférieure à cinq ans, limite généralement les écarts de niveau de vie. Les époux ont pu considérer qu’aucune disparité significative ne résultait de la rupture. Il est également possible qu’ils aient renoncé à toute demande dans un souci d’apaisement.
Le tribunal invite par ailleurs « les parties à saisir, au besoin, le notaire de leur choix pour procéder au partage amiable de leur régime matrimonial ». Cette invitation résulte de l’article 267 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 23 mars 2019. Le juge du divorce ne peut plus ordonner la liquidation et le partage, sauf accord des parties sur le projet de liquidation.
En l’absence de saisine du juge sur ce point, les époux conservent la maîtrise du règlement de leurs intérêts patrimoniaux. Le jugement précise qu’en cas d’échec du partage amiable, une procédure de partage judiciaire pourra être engagée par voie d’assignation. Cette indication pratique oriente les parties vers les démarches ultérieures.
Le partage des dépens par moitié entre les époux traduit l’équilibre de cette procédure consensuelle, où aucune partie n’apparaît comme principalement responsable de la rupture.