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Par un jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Dunkerque, 10 septembre 2025, la dissolution du mariage a été prononcée sur le fondement de l’altération définitive du lien conjugal. La décision règle aussi la date des effets patrimoniaux, la révocation des avantages matrimoniaux, l’usage du nom, ainsi que les modalités relatives à l’enfant mineure.
Les époux, mariés en 2018 sans contrat, vivent séparés depuis le printemps 2024, l’un ayant quitté le domicile pour un logement distinct. Un enfant, née en 2015, réside avec sa mère depuis l’ordonnance de mesures provisoires du 25 juin 2024. Une mesure d’assistance éducative en milieu ouvert a été renouvelée antérieurement par le juge des enfants, dont la procédure a été consultée.
L’assignation en divorce, délivrée le 15 mars 2024 sans indication de fondement, a conduit à des mesures provisoires relatives au logement, à un véhicule, et à l’enfant. À l’audience au fond du 18 juin 2025, chacun a conclu au divorce sur le même fondement, a présenté des propositions patrimoniales et a sollicité la reconduction de l’arrangement parental. La clôture est intervenue le 20 mai 2025, la décision étant rendue par mise à disposition.
La question principale porte sur la caractérisation de l’altération définitive du lien conjugal en présence d’une instance introduite sans motif et d’une séparation acquise depuis plus d’un an à la date du prononcé. Elle concerne aussi la fixation des effets patrimoniaux à une date antérieure, la portée des demandes de style dans les écritures, et la validation des accords relatifs à l’enfant au regard de l’intérêt supérieur.
Le juge retient l’écoulement du délai d’un an au jour de la décision, prononce le divorce, fixe les effets patrimoniaux à une date précise au printemps 2024, rappelle la révocation de plein droit des avantages matrimoniaux, et reconduit l’organisation parentale. Les mesures relatives à l’enfant sont exécutoires de droit à titre provisoire, les dépens étant mis à la charge du demandeur initial.
I – Le sens de la décision
A – L’altération définitive du lien conjugal appréciée au prononcé
Le juge rappelle la règle selon laquelle, lorsque l’instance est introduite sans indiquer le motif, le délai d’un an s’apprécie au jour du prononcé. La séparation matérielle est datée du printemps 2024, ce que corroborent des éléments objectifs produits aux débats. Le délai d’un an était donc acquis à la date du jugement, sans ambiguïté.
La motivation est nette et dépourvue d’équivoque, en cohérence avec les articles 237 et 238 du code civil. Elle contient une formule essentielle, qui exprime le syllogisme retenu: « Dès lors, le délai d’un an étant acquis, il y a lieu de prononcer le divorce pour altération définitive du lien conjugal. » La solution s’inscrit dans la ligne de la réforme, qui substitue un critère temporel et factuel à l’exigence d’un grief.
La portée de la formule est double. D’une part, elle acte la suffisance d’une séparation objectivée et durable, appréciée in fine au jour du jugement. D’autre part, elle neutralise le débat probatoire sur les causes du conflit, dès lors que la communauté de vie a cessé et qu’un an s’est écoulé.
B – La détermination de la date des effets patrimoniaux
Le juge use de la faculté de l’article 262-1 pour fixer les effets du divorce entre époux à une date antérieure, correspondant à la fin de la cohabitation et de la collaboration. Il opte pour une date au mois de mai 2024, un mois après le départ, ce qui est justifié par les éléments du dossier et l’économie des relations patrimoniales.
Cette fixation concrétise l’objectif de réalisme assigné par le texte: l’arrêt du fonctionnement commun doit être pris en compte au plus près de sa réalité. Le dispositif le formule sans détour: « DIT que la date des effets du divorce dans les rapports entre les époux quant à leurs biens est fixée à la date du 08 mai 2024 ». Le choix concilie l’exigence de sécurité avec la chronologie de la séparation.
Le jugement rappelle enfin que « le divorce emporte révocation de plein droit des avantages matrimoniaux » ne prenant effet qu’à la dissolution du régime ou au décès. La mention, fidèle au texte, clarifie l’extinction des libéralités matrimoniales et leur exception en cas de volonté maintenue, qui n’était pas caractérisée ici.
II – Valeur et portée
A – La rigueur procédurale: l’écartement des formules de style
La décision s’ouvre sur un rappel ferme de la portée des demandes de style. La phrase citée, directement inspirée de la jurisprudence, mérite d’être relevée: « Il convient de rappeler que les demandes de “donner acte”, de “dire et juger” ou de “constater”, expressions synonymes, n’ont, en ce qu’elles se réduisent en réalité à une synthèse des moyens développés dans le corps des écritures, aucune portée juridique ». Cette mise au point, soutenue par Cass. 3e civ., 16 juin 2016, n° 15-16.469, évite l’encombrement du dispositif et renforce la lisibilité.
Sa valeur est pratique et normative. Pratique, car elle recentre le jugement sur les véritables prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, seules susceptibles d’emporter décision. Normative, car elle rappelle que la motivation se nourrit des moyens, mais que le dispositif ne reprend que les demandes qui appellent une solution. Cette rigueur protège l’autorité de la chose jugée, en évitant l’inutile.
La cohérence systémique est réelle. En matière familiale, la précision du dispositif conditionne l’exécution et la compréhension par les parties. Écarter les formules performatives, dépourvues d’effet propre, participe d’une bonne administration de la justice et d’une pédagogie contentieuse utile.
B – L’intérêt de l’enfant et l’effectivité des liens
Le juge examine l’accord parental à l’aune des critères de l’article 373-2-11, en rappelant la pratique antérieure, l’aptitude des parents et les renseignements recueillis dans la procédure d’assistance éducative. Le constat d’un souhait d’intensification des liens avec le père et d’une bonne relation contribue à l’analyse d’intérêt. Le raisonnement s’achève par une approbation claire: « Par conséquent, il y a lieu d’entériner leur accord selon les modalités détaillées dans le dispositif. »
La solution présente deux mérites. Elle stabilise une organisation éprouvée, combinant résidence habituelle et exercice régulier d’un droit de visite et d’hébergement. Elle assure aussi l’entretien de l’enfant au moyen d’une contribution modeste, indexée selon l’indice des prix, ce qui prévient l’érosion monétaire. Le choix d’une intermédiation financière favorise la sécurisation des flux.
L’effectivité est renforcée par l’exécution provisoire de droit propre aux mesures relatives à l’enfant. La motivation rappelle l’essentiel et en tire la conséquence utile: « En l’espèce, il y a lieu de rappeler que seules les mesures relatives à l’enfant sont exécutoires de droit à titre provisoire. » Cette affirmation garantit la continuité des liens et l’immédiateté de la protection, sans préjudice des voies de recours.
L’économie générale de la décision est ainsi équilibrée. Le prononcé du divorce repose sur un critère temporel maîtrisé. Les effets patrimoniaux sont ajustés à la réalité de la séparation. L’accord parental est validé par une motivation contextualisée, et son exécution est sécurisée par la règle procédurale adéquate.