Tribunal judiciaire de Évreux, le 19 juin 2025, n°23/01402

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Rendu par le juge aux affaires familiales, le jugement du Tribunal judiciaire d’Évreux du 19 juin 2025 ordonne l’ouverture des opérations liquidatives de la communauté dissoute par un divorce prononcé en 2022. Les ex‑époux demeurent en indivision sur un immeuble, occupé par l’un d’eux, et ne parviennent pas à conclure un partage amiable. Le litige porte sur l’organisation du partage judiciaire, l’étendue de la mission notariale, l’indemnité d’occupation et la licitation du bien immobilier.

La procédure a été engagée à la demande de l’un des ex‑époux, l’autre n’ayant pas constitué avocat, la décision étant réputée contradictoire. Le juge ouvre les opérations de comptes, liquidation et partage, désigne un notaire et un juge commis, fixe un cadre opérationnel précis et ordonne, à défaut d’accord, la vente sur licitation avec séquestre du prix. Le débat oppose, en substance, la thèse d’un partage sous contrôle juridictionnel renforcé à celle d’une poursuite de l’indivision sans vente forcée. La question posée est celle de l’office du juge aux affaires familiales dans la conduite du partage judiciaire post‑divorce et des conditions d’une licitation immédiate. La solution consacre un pilotage serré de la procédure par le juge et le notaire, avec, d’une part, l’encadrement des diligences et des délais et, d’autre part, la mise en œuvre de mesures coercitives proportionnées, dont la licitation et l’indemnité d’occupation.

I. L’office du juge et l’architecture des opérations liquidatives

A. L’ouverture des opérations et la mission du notaire commis

Le jugement articule la phase notariale autour d’obligations claires, gage d’efficacité procédurale. Il est ainsi énoncé que « DIT que le notaire devra dresser un projet d’état liquidatif dans le délai d’un an à compter de sa saisine, en donner lecture aux parties et recueillir leurs dires ; ». Le délai imparti structure le calendrier et prévient l’enlisement, tout en garantissant le contradictoire par la lecture et la collecte des dires.

L’autorité du juge s’appuie sur un notaire outillé et responsable. Le jugement rappelle à bon escient que « RAPPELLE que le notaire perçoit directement ses émoluments auprès des parties et qu’il lui est interdit de recevoir un acte dont le coût n’a pas été provisionné ; ». La règle responsabilise les parties, conditionne la poursuite des opérations et évite une mission notariale dépourvue de moyens. Enfin, la détermination de la date de jouissance, élément clef des comptes, est soulignée sans ambiguïté: « RAPPELLE que la date de jouissance divise devra être déterminée dans l’état liquidatif ; ». L’ensemble inscrit la mission dans une logique de prévisibilité et de sécurité juridique.

B. Le contrôle juridictionnel et les instruments de contrainte

Le juge commis reçoit un pouvoir de supervision destiné à prévenir inertie et obstruction. Le jugement pose que « RAPPELLE que le notaire commis doit rendre compte des difficultés rencontrées au juge commis et peut solliciter de lui toute mesure de nature à faciliter le déroulement des opérations (injonctions, astreintes, désignation d’un expert en cas de désaccord, désignation d’un représentant à la partie défaillante, conciliation en sa présence devant le juge, vente forcée d’un bien…) ; ». La palette de leviers couvre les besoins usuels des partages contentieux et favorise un traitement pragmatique des blocages.

Ce contrôle s’adosse aux mécanismes textuels de représentation de l’indivisaire défaillant. Le jugement cite expressément que « RAPPELLE que les dispositions de l’article 841-1 du code civil énoncent que  » si le notaire commis pour établir l’état liquidatif se heurte à l’inertie d’un indivisaire, il peut le mettre en demeure, par acte extrajudiciaire, de se faire représenter. Faute pour l’indivisaire d’avoir constitué mandataire dans les trois mois de la mise en demeure, le notaire peut demander au juge de désigner toute personne qualifiée qui représentera le défaillant jusqu’à la réalisation complète des opérations  » ; ». L’articulation notaire–juge commis neutralise l’inertie et sécurise la poursuite des diligences sans réitérer des assignations stériles. Il est ajouté que « DIT que le Notaire arrêtera les comptes entre les parties ; », ce qui confirme l’économie du dispositif: initiative notariale, contrôle juridictionnel, puis, si nécessaire, tranchage judiciaire des seuls désaccords résiduels.

II. Les mesures substantielles: indemnité d’occupation et licitation

A. L’indemnité d’occupation et la discipline des dires

La décision intègre une indemnité d’occupation due par l’indivisaire occupant, prenant effet à une date antérieure et courant jusqu’à jouissance divise, vente ou libération effective. Ce mécanisme, conforme aux principes de l’indivision, rétablit l’équilibre patrimonial en créditant l’indivision d’une créance compensatrice. La sécurité des comptes appelle une discipline rigoureuse du contradictoire des dires. Le jugement précise à cet égard: « RAPPELLE que le procès-verbal de dires dressé par le notaire est le plus exhaustif possible, il reprend tous les points d’accord et de désaccord subsistant entre les parties et il est rappelé aux parties que ce qui n’aura pas été consigné dans leurs dires sera réputé ne plus faire difficulté et sera irrecevable dans la suite de la procédure en application de l’article 1374 du Code de procédure civile ; ». L’avertissement, ferme, rationalise le contentieux ultérieur et impose aux parties une loyauté procédurale.

L’économie générale du contrôle est, en outre, circonscrite pour prévenir la dérive des débats. Le jugement énonce ainsi: « RAPPELLE que la compétence du tribunal sera alors limitée aux désaccords subsistants mentionnés dans le rapport du juge commis ; ». Le périmètre du litige est borné par les dires, puis par le rapport, ce qui renforce l’efficacité du partage judiciaire et limite les demandes tardives, hors cause et hors temps.

B. La licitation judiciaire, ses garanties et la préservation des intérêts indivis

Faute d’accord, la licitation est ordonnée avant partage, dans le strict respect du cadre procédural de la vente forcée. Le cahier des charges inclut une clause protectrice des droits indivisaires, reproduite en ces termes: « DIT que le cahier des charges de la vente contiendra la clause suivante :  » En cas de vente de droits indivis, comme en cas de licitation de biens indivis, chaque indivisaire peut se substituer à l’acquéreur dans un délai d’un mois à compter de l’adjudication par déclaration au greffe du tribunal ayant constaté la vente  » ; ». La substitution post‑adjudication assure une ultime possibilité de conservation des droits au meilleur prix, tout en ne paralysant pas la vente.

La chaîne de distribution du prix et la publicité répondent à une exigence de transparence et d’efficacité. Le prix est sécurisé par un séquestre, tandis que les mesures de publicité sont détaillées et adaptées aux usages des ventes judiciaires. L’ordonnance s’inscrit dans une logique de mise en concurrence suffisante, favorable à la valorisation de l’actif indivis. Enfin, la décision encourage le règlement amiable parallèle en rappelant la possibilité de clôturer la procédure en cas de partage amiable, ce qui maintient ouverte la voie d’une résolution négociée malgré la dynamique contentieuse.

Ce jugement propose une mise en ordre méthodique des partages post‑divorce. Il combine, de manière cohérente, un pilotage juridictionnel effectif, une mission notariale responsabilisée et des mesures substantielles proportionnées, afin d’aboutir à un partage utile dans des délais maîtrisés.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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