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L’hospitalisation psychiatrique sous contrainte constitue l’une des atteintes les plus significatives à la liberté individuelle que le droit français autorise en dehors de la matière pénale. Le Tribunal judiciaire d’Évry-Courcouronnes, par ordonnance du 19 juin 2025, statue sur la poursuite d’une mesure d’hospitalisation complète à la demande d’un tiers, dans le cadre du contrôle systématique prévu par l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique.
Une personne a été admise en hospitalisation complète à la demande d’un tiers au sein d’un établissement de santé. Conformément aux dispositions légales, le directeur de l’établissement a saisi le juge des libertés et de la détention dans le délai de douze jours suivant l’admission afin que celui-ci statue sur la régularité et le bien-fondé de la mesure.
Le directeur de l’établissement de santé a déposé une requête enregistrée au greffe le 17 juin 2025, sollicitant l’autorisation de poursuivre la mesure. Le ministère public, absent à l’audience, a transmis ses réquisitions le 18 juin 2025. La personne hospitalisée a comparu à l’audience du 19 juin 2025, assistée de son avocat. Le débat s’est tenu en chambre du conseil afin de préserver l’intimité de la vie privée de l’intéressé.
Le patient, assisté de son conseil, contestait vraisemblablement la poursuite de son hospitalisation, tandis que l’établissement de santé soutenait que les conditions légales demeuraient réunies pour maintenir la mesure.
La question posée au juge était de déterminer si les conditions de fond et de forme justifiant la poursuite de l’hospitalisation complète à la demande d’un tiers étaient satisfaites au regard des exigences du code de la santé publique.
Le magistrat déclare la requête recevable et ordonne la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète. Les dépens sont laissés à la charge de l’État.
Cette décision invite à examiner successivement l’office du juge dans le contrôle de l’hospitalisation sous contrainte (I), puis les garanties procédurales encadrant la privation de liberté pour motif psychiatrique (II).
I. L’office du juge dans le contrôle de l’hospitalisation sous contrainte
Le contrôle juridictionnel de l’hospitalisation psychiatrique répond à une exigence constitutionnelle (A) et s’exerce selon des modalités précisément définies par la loi (B).
A. Le fondement constitutionnel du contrôle judiciaire
L’article 66 de la Constitution confie à l’autorité judiciaire la garde de la liberté individuelle. Cette exigence a conduit le législateur, sous l’impulsion du Conseil constitutionnel, à instaurer un contrôle systématique des mesures d’hospitalisation psychiatrique sans consentement. La décision du Conseil constitutionnel du 26 novembre 2010 a censuré l’absence d’intervention du juge judiciaire dans le régime alors applicable.
La loi du 5 juillet 2011, modifiée par celle du 27 septembre 2013, a instauré le mécanisme actuellement en vigueur. L’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique impose au juge des libertés et de la détention de statuer dans un délai de douze jours suivant l’admission en hospitalisation complète. Cette intervention précoce vise à garantir que nul ne soit privé de liberté sans le contrôle d’un magistrat.
L’ordonnance du 19 juin 2025 s’inscrit dans ce cadre. Le magistrat désigné, en l’espèce le vice-président chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de liberté, exerce une compétence d’attribution. Son intervention n’est pas facultative mais obligatoire, la poursuite de l’hospitalisation au-delà du douzième jour étant subordonnée à sa décision expresse.
B. L’étendue du contrôle exercé par le magistrat
Le juge vérifie la régularité de la procédure d’admission et le bien-fondé du maintien de la mesure. S’agissant d’une hospitalisation à la demande d’un tiers, il contrôle l’existence des certificats médicaux requis, la qualité du tiers demandeur et le respect des délais. Il apprécie également si les troubles mentaux de la personne rendent impossibles son consentement et nécessitent des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante.
En l’espèce, le magistrat déclare la requête recevable, ce qui suppose que les conditions formelles de la saisine étaient réunies. La requête du directeur d’établissement a été enregistrée le 17 juin 2025, soit dans le délai légal. L’ordonnance est rendue le 19 juin 2025, avant l’expiration du délai de douze jours à compter de l’admission.
Le dispositif de la décision révèle que le juge a estimé les conditions du maintien satisfaites. L’absence de motivation publiée ne permet pas d’identifier les éléments médicaux sur lesquels il s’est fondé. Cette circonstance, tenant à l’occultation des motifs pour protéger la vie privée du patient, illustre la tension entre transparence judiciaire et protection de données sensibles.
II. Les garanties procédurales encadrant la privation de liberté psychiatrique
La procédure suivie devant le juge des libertés et de la détention assure le respect des droits de la défense (A) et s’inscrit dans un équilibre délicat entre impératifs sanitaires et protection des libertés (B).
A. Le respect des droits de la défense
La personne hospitalisée bénéficie de garanties procédurales substantielles. Elle doit être informée de la procédure et de son droit à l’assistance d’un avocat. En l’espèce, le patient a comparu personnellement à l’audience, assisté de son conseil. Cette comparution permet au juge d’apprécier directement l’état de la personne et de recueillir ses observations.
Le débat s’est tenu en chambre du conseil, conformément à l’article L. 3211-12-2 du code de la santé publique. Cette exception au principe de publicité des audiences se justifie par la nature des informations médicales évoquées. L’ordonnance relève expressément qu’il « résulterait de la publicité des débats une atteinte à l’intimité de la vie privée de la personne faisant l’objet de soins ». Cette formulation reprend les termes légaux et témoigne du souci de protéger la dignité du patient.
Le ministère public, bien qu’absent physiquement, a participé à la procédure par le dépôt de réquisitions écrites. Son avis éclaire le juge sur l’appréciation de l’ordre public et le respect des garanties légales. La représentation de l’établissement de santé par un préposé complète le contradictoire.
B. L’équilibre entre protection de la santé et sauvegarde des libertés
L’hospitalisation sans consentement répond à une double finalité. Elle vise à protéger la personne atteinte de troubles mentaux contre les conséquences de sa pathologie. Elle tend également à prévenir les risques que son état peut faire courir à autrui. Le juge doit apprécier si ces objectifs justifient le maintien d’une mesure par nature attentatoire à la liberté d’aller et venir.
La décision du Tribunal judiciaire d’Évry-Courcouronnes autorise la poursuite de l’hospitalisation, ce qui suppose que le magistrat a considéré les conditions légales toujours réunies. Cette appréciation repose sur les certificats médicaux produits, lesquels doivent décrire l’état mental du patient et justifier la nécessité des soins sous contrainte.
La portée de cette ordonnance demeure limitée dans le temps. L’article L. 3211-12-1 impose un nouveau contrôle avant l’expiration d’un délai de six mois. Le patient conserve par ailleurs la faculté de saisir le juge à tout moment pour demander la mainlevée de la mesure. Ces garanties successives traduisent la volonté du législateur de soumettre toute privation de liberté psychiatrique à un examen juridictionnel renouvelé.
L’ordonnance commentée illustre le fonctionnement ordinaire du contrôle judiciaire des hospitalisations sous contrainte. Elle témoigne de l’effectivité des garanties instaurées par le législateur pour concilier impératifs de santé publique et protection des libertés fondamentales. La décision laisse toutefois en suspens les questions de fond, les motifs ayant été occultés pour préserver l’intimité du patient.