Tribunal judiciaire de Lille, le 23 juin 2025, n°24/02672

Rendu par le Tribunal judiciaire de Lille, pôle social, le 23 juin 2025 (n° RG 24/02672), ce jugement tranche un litige portant sur l’ouverture du droit à l’allocation aux adultes handicapés. La formation vise expressément le cadre légal applicable en indiquant: « Vu les articles L 821-1, L 821-2 et D 821-1 du code de la sécurité sociale, ». Le demandeur contestait un refus d’attribution et sollicitait la reconnaissance de son droit au titre du régime de l’article L 821-2. L’organisme défendeur s’y opposait en contestant les conditions médico‑administratives, notamment l’intensité des limitations fonctionnelles et leur impact sur l’accès à l’emploi.

La procédure révèle une instruction effective, avec débats en chambre du conseil et recours à une consultation médicale dont il est « RAPPELLE que les frais de la consultation médicale seront pris en charge ». Le juge statue contradictoirement, déclare la demande recevable, et retient l’ouverture du droit à l’AAH, sous conditions. La question de droit, strictement circonscrite, portait sur la réunion des conditions d’attribution de l’AAH au titre de l’article L 821-2 et, corrélativement, sur le point de départ et la durée d’ouverture du droit. La juridiction répond en ces termes: « DÉCLARE recevable la demande » et « DIT que, sous réserve des conditions administratives exigées, […] est en droit de percevoir l’allocation adultes handicapés prévue par l’article L 821-2 du code de la sécurité sociale à compter du 1er mars 2024 et pour une durée de 2 ans ».

I. Le fondement et le contrôle judiciaire de l’AAH au titre de l’article L 821-2

A. Le choix du régime de l’article L 821-2 et ses exigences légales
Le jugement s’inscrit clairement dans le champ de l’article L 821-2, ce que confirme la mention de « l’allocation adultes handicapés prévue par l’article L 821-2 du code de la sécurité sociale ». En retenant ce fondement plutôt que l’article L 821-1, la juridiction admet implicitement un taux d’incapacité compris entre 50 % et 79 %, assorti d’une restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi. La référence conjointe à l’article D 821-1 éclaire le barème d’appréciation du handicap et le bornage temporel usuel des droits. Le sens de la décision réside ainsi dans une lecture orthodoxe des textes: le juge vérifie l’existence d’atteintes fonctionnelles significatives et leur effet concret sur l’accès à l’emploi, condition cardinale du régime L 821-2.

B. La preuve médico‑sociale et l’office du juge du pôle social
La décision met en évidence un contrôle effectif de la situation, s’appuyant sur une consultation médicale dont il est « RAPPELLE que les frais de la consultation médicale seront pris en charge ». Le recours à cet avis éclaire la méthode: la juridiction substitue son appréciation à celle de l’organisme, au regard d’éléments médicaux, fonctionnels et contextuels. Ce contrôle, pleinement conforme à l’office du juge du contentieux social, garantit une vérification concrète de la restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi. L’admission de la recevabilité, puis de l’ouverture du droit, traduit la conviction judiciaire que les éléments probatoires satisfont les exigences cumulatives du régime L 821-2.

II. La mise en œuvre du droit reconnu: date d’effet, durée et réserves administratives

A. Le point de départ et la durée: un bornage conforme au droit positif
La juridiction fixe l’ouverture du droit « à compter du 1er mars 2024 et pour une durée de 2 ans », ce qui assoit clairement la portée temporelle de la décision. Le choix d’un point de départ certain, exprimé au premier jour d’un mois civil, s’aligne sur les pratiques du contentieux des prestations et sur la logique de mensualisation. La durée retenue, bornée à deux ans, se concilie avec la vocation du régime L 821-2 à encadrer des situations susceptibles d’évolution. Ce bornage ménage un réexamen régulier de la situation fonctionnelle et de la restriction d’accès à l’emploi, en adéquation avec le cadre réglementaire rappelé par l’article D 821-1.

B. La réserve des conditions administratives et la répartition des compétences
La formule « sous réserve des conditions administratives exigées » souligne la dualité des conditions d’attribution, distinguant l’appréciation médico‑fonctionnelle du contrôle de recevabilité administrative. La juridiction reconnaît le droit au principe de la prestation, tout en laissant à l’organisme la vérification des paramètres de gestion: résidence, âge, cumul et surtout ressources. Cette réserve exprime une articulation ordonnée des compétences, respectueuse du rôle de l’organisme payeur et des textes gouvernant l’ouverture, la liquidation et la suspension des droits. Elle confère à la décision une portée immédiatement opératoire, sans empiéter sur les vérifications de gestion, et renforce la sécurité juridique des intéressés.

En définitive, la décision, solidement ancrée sur les textes visés, concilie un contrôle juridictionnel substantiel des conditions médico‑fonctionnelles avec un bornage temporel précis et une réserve de gestion conforme à la répartition des compétences. Elle illustre une mise en œuvre pragmatique du régime L 821-2, qui sécurise l’accès à la prestation tout en préservant l’orthodoxie administrative.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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