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Par ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Lyon le 13 juin 2025, le juge des libertés et de la détention rejette une quatrième prolongation de rétention administrative. La décision intervient au regard des articles L. 741-3 et L. 742-5 du CESEDA, qui encadrent strictement la durée et les cas d’exception permettant un maintien prolongé.
Les faits sont simples et documentés. Une obligation de quitter le territoire a été notifiée le 31 mars 2025, suivie d’un placement en rétention le même jour. Après une mainlevée ordonnée le 3 avril 2025, la Cour d’appel de Lyon, le 5 avril 2025, a infirmé et fixé une première prolongation de vingt-six jours. Une nouvelle prolongation, le 29 avril 2025, pour trente jours, a été confirmée par la Cour d’appel de [Localité 4], le 30 avril 2025. Une troisième prolongation exceptionnelle de quinze jours a été décidée le 29 mai 2025.
Par requête du 12 juin 2025, l’autorité administrative sollicite une nouvelle prolongation exceptionnelle de quinze jours, en invoquant l’absence persistante de laissez-passer consulaire malgré de nombreuses relances. La défense oppose l’absence d’éléments probants quant à une délivrance « à bref délai » et conteste la caractérisation d’une menace à l’ordre public.
La question posée est précise. Les diligences administratives, en l’absence d’indice objectif de délivrance imminente du document de voyage, ou la seule production d’un signalement policier sans suites, permettent-elles de satisfaire aux cas limitativement prévus par l’article L. 742-5 pour une quatrième prolongation exceptionnelle ? Le juge répond négativement, au double visa du temps strictement nécessaire et du caractère exceptionnel des hypothèses légales. Il rappelle que « Il résulte de l’article L. 741-3 du CESEDA qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet. » Il constate ensuite qu’« il ne peut être établi que la délivrance du laissez-passer consulaire nécessaire à l’exécution de la mesure d’éloignement puisse intervenir à bref délai », et que « ces deux pièces ne permettent pas de caractériser la menace à l’ordre public ». En conséquence, « les critères des dispositions de l’article L. 742-5 du CESEDA ne sont pas remplis ».
I. Les conditions strictes de la quatrième prolongation
A. Le temps strictement nécessaire et la charge des diligences
Le juge place le contrôle sous l’exigence cardinale de proportion temporelle. En citant que « Il résulte de l’article L. 741-3 du CESEDA qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ », il rappelle l’office du contrôle de nécessité. La référence au devoir de diligence ne suffit pas si elle demeure formelle. Des relances répétées, restées sans effet, ne démontrent pas la perspective concrète d’un éloignement, faute d’éléments objectivés sur l’échéance.
La décision clarifie la charge probatoire. L’autorité administrative doit établir un horizon temporel crédible, et non la seule intensité de ses démarches. La mention des relances des 15 avril, 7 mai, 23 mai, 5 juin et 11 juin 2025 atteste d’une activité, mais ne prouve pas un résultat à attendre dans un délai rapproché. Le contrôle de nécessité demeure donc insatisfait lorsque la perspective d’éloignement reste hypothétique.
B. L’exigence d’un « bref délai » objectivé
Le cœur de l’exception de l’article L. 742-5 réside dans l’anticipation fiable de la délivrance des documents de voyage. Le juge retient expressément qu’« il ne peut être établi que la délivrance du laissez-passer consulaire nécessaire à l’exécution de la mesure d’éloignement puisse intervenir à bref délai ». Cette formule exige un élément positif, tel un rendez-vous programmé, une confirmation consulaire, ou un échange précis sur les délais.
La décision souligne l’absence de pouvoir de contrainte sur les autorités étrangères, mais refuse d’en déduire un droit à la prolongation par défaut. L’exception ne se présume pas ; elle se prouve. Sans indice tangible sur une délivrance imminente, la quatrième prolongation excède l’économie du texte et heurterait le principe du temps strictement nécessaire.
II. Les motifs exceptionnels et leurs enseignements
A. Une menace pour l’ordre public strictement caractérisée
Le juge exige, pour retenir la menace, un contenu factuel précis et actuel. Il énonce que « la menace actuelle, réelle et suffisament grave affectant un intérêt fondamental de la société n’est pas plus établie ». Il ajoute que « ces deux pièces ne permettent pas de caractériser la menace à l’ordre public », la seule signalisation ne suffisant pas sans indications sur les suites judiciaires ni éléments circonstanciés.
Ce standard préserve la finalité de la rétention, qui n’est pas une mesure de sûreté autonome. La menace doit être actualisée, documentée, et rattachée à des faits dont la matérialité et le contexte sont établis. En l’absence de telles précisions, la condition exceptionnelle fondée sur l’ordre public ne peut justifier une prolongation supplémentaire.
B. Portée pratique : preuve renforcée et contrôle de proportion
La solution consacre un dualisme probatoire. D’une part, sur le « bref délai », il faut un signal consulaire vérifiable, dépassant la simple itération de relances. D’autre part, sur l’ordre public, il faut une démonstration circonstanciée, et non un simple indice isolé. À défaut, « les critères des dispositions de l’article L. 742-5 du CESEDA ne sont pas remplis ».
La portée est nette. La quatrième prolongation demeure une véritable exception, subordonnée soit à une entrave imputable à l’intéressé, soit à une perspective d’éloignement objectivement imminente, soit à une menace solidement étayée. À défaut, la rétention cesse d’être strictement nécessaire, et le juge réaffirme son contrôle concret, déjà amorcé par la Cour d’appel de Lyon le 5 avril 2025 et confirmé sur la durée par la Cour d’appel de [Localité 4] le 30 avril 2025, dans le respect de l’économie du CESEDA et de la finalité de l’éloignement.