Tribunal judiciaire de Lyon, le 14 juin 2025, n°25/02243

Rendue le 14 juin 2025, la décision, prise sous l’intitulé de la Cour d’appel de [Localité 2], statue sur une seconde demande de prolongation d’une rétention administrative. Un intéressé, frappé d’une interdiction définitive du territoire depuis 2017, a été placé en rétention le 16 mai 2025, puis maintenu une première fois pour vingt‑six jours le 19 mai. L’autorité administrative a saisi la juridiction le 13 juin pour une nouvelle prolongation de trente jours, mesure contestée par le retenu. Celui‑ci invoquait l’absence de diligence utile entre janvier et juin, ainsi que l’insuffisance d’une menace à l’ordre public. L’administration faisait valoir des démarches consulaires récentes auprès des autorités du pays d’origine. La question portait sur les conditions d’ouverture et les limites du contrôle du juge lors d’une seconde prolongation, à la lumière des articles L. 742‑4 et L. 743‑11 du CESEDA. La juridiction retient l’irrecevabilité des griefs relatifs à la première phase et constate, au fond, l’empêchement imputable aux autorités consulaires. Elle cite ainsi, d’une part, que « Attendu qu’en application de l’article L. 743-11 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la seconde prolongation ; ». D’autre part, elle rappelle les cas d’ouverture de l’article L. 742‑4 et l’objectif de soixante jours au total. Elle en déduit que les diligences consulaires de juin caractérisent la situation prévue par le texte, sans exiger l’examen du motif d’ordre public. La décision ordonne la prolongation, en relevant que « Attendu que la seconde prolongation de la rétention étant de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement, ».

I. Le cadre juridique de la seconde prolongation

A. L’irrecevabilité des griefs antérieurs au regard de l’article L. 743‑11
La juridiction s’appuie explicitement sur la règle de purge des irrégularités antérieures, indissociable de l’économie des prolongations successives. Elle énonce que « Attendu qu’en application de l’article L. 743-11 du CESEDA, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à l’audience relative à la première prolongation de la rétention ne peut être soulevée lors de l’audience relative à la seconde prolongation ; ». Le contrôle ne peut donc s’étendre ni au placement initial ni aux diligences de la première période. Cette lecture concentre l’office du juge sur la période courant jusqu’à l’audience de seconde prolongation, afin de préserver la célérité du contentieux.

B. Les cas d’ouverture et la finalité de l’article L. 742‑4
Le juge rappelle intégralement le dispositif, en soulignant l’architecture cumulative de la durée maximale. Il est précisé que « Attendu qu’aux termes de l’article L742-4 du CESEDA, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants : 1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ; 2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ; 3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison : du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;b) de l’absence de moyens de transport. L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours. ». La motivation articule ainsi la base légale, l’objectif d’exécution, et la limite temporelle indépassable.

II. L’appréciation des diligences et la portée de la solution

A. La preuve de l’empêchement consulaire et l’exigence de diligence
La décision retient que l’autorité a saisi les autorités consulaires à deux reprises en juin, en vue d’une reconnaissance et d’un document de voyage. Elle considère ces démarches comme utiles et contemporaines de la seconde période, au sens de l’article L. 742‑4, 3°. Cette appréciation se double d’un contrôle de l’information des droits, le juge affirmant que « Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces jointes à la requête et des mentions figurant au registre prévu à l’article L. 744-2 du CESEDA que la personne retenue, pleinement informée de ses droits lors la notification de son placement, n’a cessé d’être placée en état de les faire valoir depuis son arrivée au lieu de rétention ; ». Le caractère effectif des démarches conditionne la proportionnalité de la rétention, orientée vers l’éloignement.

B. La marginalisation de l’ordre public et les effets pratiques
Le juge n’examine pas la menace à l’ordre public, estimant suffisante la branche relative à l’empêchement consulaire. La méthode privilégie un motif autonome et objectivable, conforme au caractère finalisé de la rétention. L’économie du texte conduit alors à privilégier l’exécution, comme l’indique la formule « Attendu que la seconde prolongation de la rétention étant de nature à permettre l’exécution de la mesure d’éloignement, ». La solution confirme que, pour la seconde prolongation, la charge probatoire porte surtout sur l’obtention des documents et la réalité des obstacles extérieurs. Elle éclaire la pratique juridictionnelle en bornant le débat temporellement et matériellement, dans la limite ferme de soixante jours.

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Hassan KOHEN
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