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Le désistement d’instance constitue l’une des causes d’extinction du lien juridique processuel les plus simples en apparence, mais dont le régime recèle des subtilités que la pratique judiciaire ne cesse d’illustrer. L’ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Lyon le 19 juin 2025 en offre une illustration topique.
Une personne née en 2004 avait engagé une action en justice, bénéficiant de l’aide juridictionnelle totale accordée le 22 novembre 2024. Elle assignait une société exploitant une pension ainsi qu’une compagnie d’assurances. Les défenderesses, régulièrement citées, n’ont pas constitué avocat et sont demeurées défaillantes tout au long de la procédure.
Par acte ultérieur, la demanderesse a déclaré se désister de l’instance enrôlée. Le juge de la mise en état a été saisi aux fins de constater ce désistement. Les défenderesses, défaillantes, n’ont présenté aucune observation.
Le juge devait déterminer si le désistement unilatéral de la demanderesse pouvait produire effet en l’absence d’acceptation des parties adverses. La question posée était celle des conditions de perfection du désistement d’instance lorsque le défendeur n’a présenté aucune défense.
Le juge de la mise en état a constaté le désistement d’instance et d’action, prononcé l’extinction de l’instance et le dessaisissement du tribunal, tout en laissant la charge des dépens à la demanderesse.
Cette décision invite à examiner les conditions du désistement parfait en l’absence de défense adverse (I), avant d’analyser les effets attachés au désistement ainsi constaté (II).
I. Les conditions du désistement parfait en l’absence de défense adverse
Le régime du désistement d’instance repose sur une articulation entre le principe de l’acceptation et son exception légale (A), dont l’application au cas d’espèce ne soulevait aucune difficulté (B).
A. Le principe de l’acceptation et son exception légale
L’article 395 du code de procédure civile pose le principe selon lequel « le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur ». Cette règle protège le défendeur qui a pu engager des frais ou développer une stratégie procédurale. Le désistement unilatéral ne saurait lui être imposé.
Le même texte prévoit toutefois une exception importante. L’acceptation « n’est pas nécessaire si le défendeur n’a présenté aucune défense au fond ou fin de non-recevoir au moment où le demandeur se désiste ». Cette dispense se justifie par l’absence d’intérêt légitime du défendeur passif à s’opposer à l’abandon de l’instance.
La jurisprudence a précisé les contours de cette exception. Ne constitue pas une défense au fond la simple constitution d’avocat non suivie de conclusions. En revanche, des conclusions même sommaires contestant le bien-fondé de la demande suffisent à exiger l’acceptation du désistement.
B. L’application non équivoque au cas d’espèce
L’ordonnance relève que les défenderesses sont demeurées « défaillant » à la procédure. Cette défaillance caractérise l’absence totale de constitution et, a fortiori, l’absence de toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
Le juge constate sobrement « qu’aux termes de l’article 395 du Code de procédure civile le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur, mais que celle-ci n’est pas nécessaire si le défendeur n’a présenté aucune défense ». Il ajoute « que tel est le cas en l’espèce ».
Cette motivation, bien que lapidaire, suffit à établir la réunion des conditions légales. La défaillance des deux sociétés assignées dispensait la demanderesse de toute formalité supplémentaire pour rendre son désistement parfait.
II. Les effets du désistement constaté par le juge de la mise en état
Le désistement produit des effets sur l’instance elle-même (A) et emporte des conséquences financières pour les parties (B).
A. L’extinction de l’instance et le dessaisissement du tribunal
L’ordonnance constate « l’extinction de l’instance et par conséquent le dessaisissement du tribunal ». L’article 385 du code de procédure civile prévoit que le désistement d’instance emporte extinction de l’instance sans qu’il soit statué sur le fond.
Le juge va plus loin en constatant également un « désistement d’instance et d’action ». Cette formulation mérite attention. Le désistement d’action, distinct du désistement d’instance, emporte renonciation au droit substantiel lui-même. La demanderesse ne pourra plus réintroduire une action fondée sur les mêmes faits contre les mêmes parties.
Le cumul des deux désistements éteint définitivement le litige. La Cour de cassation juge que le désistement d’action doit résulter d’une manifestation de volonté non équivoque. En l’espèce, la demanderesse a expressément renoncé tant à l’instance qu’à l’action, interdisant toute réouverture ultérieure du débat.
B. La charge des dépens laissée à la demanderesse
L’article 399 du code de procédure civile dispose que « le désistement emporte, sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l’instance éteinte ». L’ordonnance applique cette règle en disant « que le demandeur conservera la charge des frais et dépens ».
Cette solution correspond à la logique du désistement. Celui qui abandonne l’instance qu’il a lui-même introduite doit supporter les frais qu’elle a générés. En l’espèce, la défaillance des défenderesses limitait nécessairement ces dépens aux seuls frais engagés par la demanderesse.
La circonstance que cette dernière bénéficiait de l’aide juridictionnelle totale atténue considérablement la portée pratique de cette condamnation. L’État supporte les frais afférents à l’aide juridictionnelle, sous réserve des recours en récupération prévus par la loi du 10 juillet 1991.