- Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre) LinkedIn
- Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Facebook
- Cliquez pour partager sur WhatsApp(ouvre dans une nouvelle fenêtre) WhatsApp
- Cliquez pour partager sur Telegram(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Telegram
- Cliquez pour partager sur Threads(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Threads
- Cliquer pour partager sur X(ouvre dans une nouvelle fenêtre) X
- Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Imprimer
Le contentieux des baux d’habitation demeure une source abondante du contentieux civil, révélant les tensions récurrentes entre le droit de propriété du bailleur et la protection du locataire. Le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Marseille le 16 juin 2025 illustre le mécanisme de la clause résolutoire en matière locative et ses conséquences financières.
Un bailleur avait consenti, par acte sous seing privé du 20 juillet 2020, un bail portant sur un appartement et un parking, moyennant un loyer mensuel de 830 euros outre 90 euros de provision sur charges. Face à des impayés, le bailleur a fait délivrer aux locataires un commandement de payer visant la clause résolutoire le 22 juillet 2024, pour un arriéré de 2 481,82 euros. Par acte du 9 octobre 2024, le bailleur a assigné les preneurs devant le juge du contentieux de la protection. À l’audience du 17 mars 2025, le demandeur a actualisé sa créance à 1 911,58 euros et s’est désisté de sa demande d’expulsion, les locataires ayant quitté les lieux. Ces derniers, régulièrement cités par acte remis à étude, n’ont pas comparu.
Le tribunal devait déterminer si la clause résolutoire était acquise et, dans l’affirmative, fixer les conséquences pécuniaires de la résiliation du bail.
Le juge, après avoir rappelé qu’en vertu de l’article 472 du code de procédure civile « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond », a constaté que « les sommes visées au commandement n’ont pas été intégralement payées dans le délai imparti ». Il en a déduit que « la clause résolutoire est acquise » et a prononcé la résiliation du bail à effet au 22 septembre 2024. Les défendeurs ont été condamnés solidairement au paiement de l’arriéré locatif et d’une indemnité d’occupation.
Cette décision appelle un examen du régime de la clause résolutoire en matière de bail d’habitation (I), avant d’analyser les conséquences de la résiliation sur les obligations des locataires (II).
I. Le jeu de la clause résolutoire dans le bail d’habitation
Le tribunal rappelle les conditions d’acquisition de la clause résolutoire (A), tout en soulignant les garanties procédurales offertes au locataire défaillant (B).
A. Les conditions d’acquisition de la clause résolutoire
Le contrat de bail contenait une clause résolutoire, dont le jeu supposait la réunion de plusieurs conditions. L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 impose la délivrance préalable d’un commandement de payer visant expressément cette clause. Le tribunal constate que ce commandement a été « signifié […] le 22 juillet 2024, pour un arriéré locatif de 2 481,82 euros ». Le délai de deux mois prévu par la loi s’est écoulé sans régularisation complète de la dette. Le juge relève que « les sommes visées au commandement n’ont pas été intégralement payées dans le délai imparti ». Cette constatation suffit à établir l’acquisition de la clause.
Le mécanisme de la clause résolutoire présente un caractère automatique une fois ses conditions réunies. Le juge ne dispose alors d’aucun pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de la résiliation. Il se borne à constater que les conditions légales sont remplies. Cette automaticité constitue une garantie pour le bailleur, qui n’a pas à démontrer l’importance du préjudice subi.
B. Les garanties procédurales protégeant le locataire
Le tribunal vise expressément « le caractère d’ordre public de protection de la loi du 6 juillet 1989 modifiée ». Il précise que « le délai donné au locataire pour régulariser la dette locative est un délai minimum durant lequel les effets de la clause résolutoire sont neutralisés ». Cette formulation rappelle que le locataire bénéficie d’un temps incompressible pour s’acquitter de sa dette.
La loi du 6 juillet 1989 prévoit également la possibilité pour le juge d’accorder des délais de paiement suspendant les effets de la clause résolutoire. En l’espèce, cette faculté ne pouvait prospérer en l’absence de comparution des défendeurs. Le tribunal, statuant par jugement réputé contradictoire conformément à l’article 472 du code de procédure civile, ne pouvait que faire droit aux demandes qu’il estimait « régulière, recevable, et bien fondée ».
II. Les conséquences pécuniaires de la résiliation du bail
La résiliation emporte l’obligation pour les locataires de verser une indemnité d’occupation (A) et de s’acquitter de l’arriéré locatif avec les condamnations accessoires (B).
A. L’indemnité d’occupation due après résiliation
Le tribunal condamne les défendeurs à payer « une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 23 septembre 2024 et jusqu’à la complète libération des lieux ». Cette indemnité est fixée « au montant du loyer et des charges, calculés tels que si le contrat s’était poursuivi ». Le juge précise qu’à défaut de justificatifs, elle s’élèvera à 1 200,91 euros.
L’indemnité d’occupation présente une nature hybride. Elle compense l’occupation sans titre des locaux après résiliation du bail. Son montant, généralement équivalent au loyer, peut être majoré par le juge pour tenir compte du préjudice subi par le bailleur. En l’espèce, le tribunal s’en tient au montant contractuel, sans majoration. Les locataires ayant quitté les lieux, la période d’indemnisation se trouve limitée.
B. L’arriéré locatif et les condamnations accessoires
Le tribunal condamne solidairement les défendeurs au paiement de « la somme de 1 911,58 euros, avec les intérêts au taux légal à compter de la présente décision ». Le point de départ des intérêts à la date du jugement, et non à celle du commandement, résulte du caractère indemnitaire de la créance actualisée. Les défendeurs sont également condamnés in solidum aux dépens et à verser 350 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La solidarité entre les codébiteurs, expressément prononcée, permet au bailleur de poursuivre l’un quelconque des locataires pour la totalité de la dette. La condamnation in solidum aux dépens et frais irrépétibles procède de la même logique. Le tribunal, rappelant que « l’exécution provisoire est de droit » conformément à l’article 514 du code de procédure civile, permet au bailleur de procéder immédiatement au recouvrement des sommes allouées.