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Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille, ordonnance du 18 juin 2025, n° RC 25/01134. Saisi sur le fondement de l’article L.742-8 du CESEDA, le juge rejette la demande de mainlevée d’une rétention administrative. Les faits tiennent à un arrêté d’expulsion antérieur, un placement en rétention le 26 mai 2025, un arrêté fixant le pays de destination notifié le 26 mai 2025, puis annulé par le tribunal administratif le 2 juin 2025, et la préparation d’un nouvel arrêté. La procédure révèle une demande de mise en liberté formée le 16 juin 2025, et une décision rendue « sans débats préalable » en premier ressort. La question posée est celle du maintien en rétention, malgré l’annulation du pays de destination, au regard des exigences de nécessité et de diligence. La solution retient le rejet de la mainlevée, le juge estimant les diligences en cours et l’éloignement encore poursuivi avec célérité.
I. Le contrôle du maintien au prisme de la diligence administrative
A. Le cadre normatif et l’office du juge
Le texte de saisine rappelle que « Hors des audiences de prolongation de la rétention […], l’étranger peut demander qu’il soit mis fin à sa rétention en saisissant le juge des libertés et de la détention ». Cette voie directe, spécifique, commande un contrôle plein, distinct des seules audiences de prolongation, sur la persistance des conditions légales du maintien. Le juge ancre son office dans le principe selon lequel « l’autorité judiciaire conserve la possibilité d’interrompre à tout moment la prolongation du maintien en rétention ». Cette affirmation, tirée du contrôle de nécessité et de proportion, l’autorise à vérifier, en temps réel, si le fondement et les diligences requis subsistent.
Le contrôle s’opère à l’aune d’exigences cumulatives de nécessité et de diligence. D’abord, « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet ». Ensuite, la directive de retour souligne que « Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise ». L’office du juge consiste donc à confronter l’objectif d’éloignement à la réalité des démarches, et à censurer toute inertie révélant l’absence de perspective raisonnable de départ.
B. L’application aux diligences consécutives à l’annulation du pays de destination
Le juge constate l’annulation du premier arrêté fixant le pays de destination et l’impossibilité d’exécuter la mesure d’éloignement. Il énonce alors que « les textes précités imposent au préfet d’effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l’exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d’éloignement ». La question devient celle de la suffisance d’actes concrets postérieurs à l’annulation contentieuse. La motivation retient que « un nouvel arrêté fixant le pays de destination est en cours de préparation et sera notifié prochainement au retenu ».
Sur cette base, le juge estime que l’éloignement demeure en cours de préparation avec célérité suffisante et que le maintien reste nécessaire. La conclusion est formulée sans équivoque : « dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande de mise en liberté ». L’ordonnance, rendue sans débats, entérine l’idée qu’une annulation du pays de destination ne fait pas, par elle‑même, disparaître la perspective raisonnable d’éloignement, dès lors que de nouvelles démarches sont immédiatement enclenchées.
II. La valeur et la portée du contrôle exercé
A. L’exigence probatoire de diligence et les limites de la motivation
La grille de contrôle appliquée réaffirme une double exigence, claire et opérationnelle. D’une part, l’exigence de nécessité demeure cardinale, rappelée par « Un étranger ne peut être placé ou maintenu […] que pour le temps strictement nécessaire ». D’autre part, l’exigence de diligence se mesure concrètement, conformément à « Toute rétention est aussi brève que possible ». La valeur de la décision tient à la cohérence de ces rappels textuels et à l’affirmation de l’office juridictionnel d’interruption à tout moment du maintien.
La motivation appelle toutefois une réserve sur l’étendue des justifications attendues. La mention selon laquelle « un nouvel arrêté […] est en cours de préparation » demeure sommaire. Le standard de diligence, pour être effectif, suppose idéalement des éléments vérifiables, tels que la rédaction avancée de l’acte, la fixation d’un terme rapproché ou des échanges avec l’autorité consulaire. Faute d’indications plus précises, le risque est d’ériger l’intention d’agir en diligence suffisante, au détriment d’une appréciation serrée de la perspective d’éloignement.
B. Les incidences pratiques en cas d’annulation du pays de destination
La portée de l’ordonnance se situe dans la gestion contentieuse des obstacles de droit. L’annulation du pays de destination ne contraint pas nécessairement à la mainlevée si, immédiatement, des démarches alternatives sont engagées, ce que la motivation retient en affirmant que « les textes précités imposent […] d’effectuer sans désemparer les démarches nécessaires ». Cette approche prévient un effet d’aubaine et maintient l’incitation administrative à agir vite pour sécuriser la base juridique de l’éloignement.
Deux limites pratiques se dessinent néanmoins. D’abord, la durée résiduelle du maintien, déjà encadrée, impose que la « préparation » alléguée se traduise très vite en actes opposables. À défaut, l’exigence que « Toute rétention est aussi brève que possible » commanderait la mainlevée. Ensuite, la décision « sans débats préalable » interroge la densité du contradictoire dans ce contentieux de liberté. L’équilibre entre célérité et confrontation utile des arguments gagnerait à être garanti par des éléments objectifs au dossier, afin que le contrôle de diligence, central, conserve sa pleine effectivité.