Tribunal judiciaire de Marseille, le 19 juin 2025, n°24/06441

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Rendue par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille, l’ordonnance de référé du 11 septembre 2025 traite l’acquisition d’une clause résolutoire pour impayés locatifs, l’octroi d’une provision et l’aménagement de délais de paiement. Le litige naît d’un bail d’habitation conclu le 24 mai 2017 pour un loyer initial modeste, suivi d’arriérés ayant justifié un commandement de payer visant la clause résolutoire notifié le 21 mars 2024.

Le bailleur a assigné en référé après avoir accompli les diligences préalables imposées par la loi du 6 juillet 1989. La dette, initialement inférieure à mille euros, a été actualisée à une somme plus élevée avant l’audience, tandis que la locataire ne sollicitait pas la suspension de la clause. Le juge rappelle le cadre du référé-provision et définit la « contestation sérieuse », en relevant que « Une contestation sérieuse survient lorsque l’un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain ». Il précise aussi que « L’absence de contestation sérieuse implique l’évidence de la solution qu’appelle le point contesté ».

La question de droit porte sur l’office du juge des référés face à des impayés partiellement discutés, notamment lorsque le commandement comporte des sommes discutables mais que la dette exigible n’est pas apurée dans le délai légal. Elle renvoie à l’articulation entre l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, qui encadre les formalités et neutralise temporairement les effets de la clause, et les articles 834 et 835 du code de procédure civile, qui autorisent provision et mesures utiles en l’absence de contestation sérieuse.

Le juge déclare recevable l’action du bailleur et constate l’acquisition de la clause, ordonnant l’expulsion après le délai légal, fixant une indemnité d’occupation et allouant une provision sur la dette. Il énonce, s’agissant du référé-provision, que « Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier », avant de retenir que l’obligation était suffisamment certaine à la date de l’audience. La solution s’inscrit dans un équilibre entre rigueur contractuelle et mesures d’apurement, le juge accordant des délais échelonnés sur trois années. Il rappelle enfin que « Il est rappelé que les ordonnances de référé sont de plein droit exécutoires à titre provisoire ».

I. Le contrôle des conditions du référé et l’acquisition de la clause résolutoire

A. La recevabilité de l’action au regard des formalités préalables

Le juge vérifie les diligences imposées par l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, à savoir la notification des impayés à l’organisme d’allocations et l’information de l’autorité préfectorale avant l’audience. Ces exigences, d’ordre public de protection, visent à prévenir et traiter les situations d’impayés en amont du contentieux. Le respect de ces formalités conditionne l’accès au juge, d’où la formule claire : « Son action est donc déclarée recevable. »

L’office du juge inclut également la prise en compte du délai minimal de régularisation attaché au commandement. L’ordonnance rappelle que, dans ce cadre, « le délai donné au locataire pour régulariser la dette locative est un délai minimum durant lequel les effets de clause résolutoire sont neutralisés ». Ce rappel s’accorde avec la finalité sociale du texte, sans priver le bailleur du bénéfice de la clause lorsque les sommes exigibles ne sont pas versées dans le temps imparti.

B. La qualification de la contestation sérieuse et ses effets

La décision consacre la grille d’analyse classique du référé-provision. Le juge indique qu’il y a difficulté sérieuse lorsque l’examen suppose des vérifications approfondies des textes ou des pièces, et à l’inverse absence de difficulté si la solution s’impose immédiatement. Il le souligne en des termes précis : « Dit autrement, une difficulté est sérieuse lorsque la question peut donner lieu à plusieurs réponses d’égale pertinence », tandis que « L’absence de contestation sérieuse implique l’évidence de la solution qu’appelle le point contesté. »

Appliquant ce critère, le juge constate que certaines lignes de compte étaient discutables, mais qu’elles avaient été isolées et déduites pour retenir le seul reliquat exigible. L’arriéré restant n’ayant pas été réglé dans le délai du commandement, la clause a produit ses effets. La motivation, sobre, témoigne de cette application stricte: « En conséquence, la clause résolutoire est acquise. » La portée est nette, car elle opère indépendamment des discussions accessoires, dès lors qu’il subsiste une dette non apurée comprise dans l’assiette utile.

II. Les conséquences de la résiliation: provision et délais de paiement

A. La provision et l’indemnité d’occupation en référé

Sur le fondement des articles 834 et 835 du code de procédure civile, le juge peut allouer une provision lorsque l’obligation n’est pas sérieusement contestable. L’ordonnance en rappelle la lettre: « Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ». Le décompte actualisé, purgé des postes non justifiés, fonde la créance certaine, ce qui légitime la somme provisionnelle avec intérêts aux dates retenues.

La résiliation emporte aussi requalification de l’occupation en indemnité, égale au loyer et aux charges qui auraient été dus si le contrat s’était poursuivi. La solution retient un montant à défaut de justificatifs, conforme aux usages prétoriaux, afin de maintenir une référence objective. Le dispositif encadre ainsi la période postérieure à l’acquisition de la clause jusqu’à la remise effective des clés, prévenant toute incertitude d’évaluation.

B. L’octroi de délais et leur articulation avec l’exécution

L’article 24 de la loi de 1989 autorise, malgré la résiliation, des délais pour apurer la dette, lorsque la situation du locataire et la reprise du paiement courant le justifient. Le juge retient cette voie médiane, permettant un apurement en trente-six mensualités d’un montant constant, en sus du loyer courant. Cette solution concilie l’effectivité de la sanction contractuelle et l’objectif de prévention des expulsions non maîtrisées à court terme.

L’économie de l’ordonnance reste néanmoins ferme sur l’exécution. D’une part, le mécanisme de déchéance du terme est prévu en cas d’impayé d’une seule échéance d’apurement ou du courant. D’autre part, la force exécutoire accompagne la décision: « Il est rappelé que les ordonnances de référé sont de plein droit exécutoires à titre provisoire ». Cet équilibre confirme la logique du référé: protection des créanciers par l’effectivité, et protection des occupants par l’étalement encadré.

En définitive, l’ordonnance articule de manière cohérente les règles du référé-provision avec le régime d’ordre public du bail d’habitation. Elle illustre comment une contestation partielle, sans réelle opacité sur la dette utile, ne fait pas obstacle à la constatation de la clause et à l’allocation d’une provision. Elle montre aussi que l’outil des délais, manié avec parcimonie, peut amortir les effets de la résiliation, sans altérer l’exigence de solvabilisation rapide de la dette.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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