Tribunal judiciaire de Meaux, le 17 juin 2025, n°25/02342

Le tribunal judiciaire de Meaux, par ordonnance du 17 juin 2025, statue sur la première prolongation d’une rétention administrative sollicitée pour vingt-six jours. La juridiction contrôle la légalité, la régularité et la nécessité de la mesure au regard des exigences du CESEDA.

Une obligation de quitter le territoire a été prise en 2024. Le placement en rétention est intervenu le 13 juin 2025, puis une requête préfectorale a été présentée le 16 juin. L’audience publique s’est tenue avec interprète, la personne retenue ayant reçu le rappel de ses droits. L’intéressé disposait d’un passeport en cours de validité, et une demande de routing a été adressée dès le 14 juin 2025, sans exécution possible dans le délai initial. La juridiction relève en outre l’absence de domicile stable et des manquements antérieurs de présentation, invoqués pour écarter une assignation.

La question portait sur l’étendue du contrôle judiciaire lors d’une première prolongation, combinant vérification des garanties procédurales, des diligences effectives et de l’existence d’une mesure moins attentatoire. Le juge rappelle que « le juge doit se prononcer en tant que gardien de la liberté individuelle sur la légalité de la rétention ». Il retient ensuite que « la procédure contrôlée est recevable et régulière » et que « la personne retenue a été, dans les meilleurs délais […] pleinement informée de ses droits ». Il constate enfin que « la mesure d’éloignement n’a pu être mise à exécution dans le délai de quatre jours », que « le retenu disposant d’un passeport en cours de validité, une demande de routing a été effectuée le 14 juin 2025 à 11h14; », que la personne « ne remplit pas les conditions d’une assignation à résidence » et qu’« en définitive, rien ne s’oppose à ce que soit ordonnée la prolongation ».

I. Le contrôle juridictionnel de la rétention

A. Le juge, gardien de la liberté individuelle

La juridiction se place d’emblée sur le terrain des garanties constitutionnelles attachées à la liberté individuelle. Elle affirme que « le juge doit se prononcer en tant que gardien de la liberté individuelle sur la légalité de la rétention ». Cette formule souligne un contrôle propre et autonome, « indépendamment de tout recours contre la décision de placement », ce qui oblige à vérifier la base légale et les motifs actuels du maintien. Le contrôle n’est donc pas restreint à un examen formel du dossier, mais inclut l’appréciation concrète des conditions d’ingérence.

Ce rappel du rôle du juge judiciaire impose une méthodologie exigeante. La privation de liberté ne peut se prolonger qu’à la double condition d’une procédure régulière et d’une nécessité démontrée. L’office implique un examen utilement contradictoire, centré sur la proportionnalité de la mesure et la perspective effective d’éloignement dans le temps utile de la prolongation.

B. La vérification des garanties procédurales initiales

Le contrôle commence par la régularité externe. Le juge retient que « la procédure contrôlée est recevable et régulière ». Il vérifie surtout l’effectivité de l’information des droits, s’appuyant sur le registre prévu à l’article L. 744‑2, et constate que « la personne retenue a été, dans les meilleurs délais […] pleinement informée de ses droits ». La mention du registre, jointe aux pièces produites, atteste la mise en état de les exercer dès l’arrivée.

Cette motivation, brève mais ciblée, répond aux exigences fondamentales de la rétention. Elle replace l’information dans sa fonction de garantie, préalable indispensable à tout contrôle utile de la suite du processus d’éloignement. Une fois ces préalables acquis, l’examen se concentre sur la nécessité matérielle de la privation de liberté.

II. Les conditions matérielles de la prolongation

A. Les diligences accomplies et la perspective d’éloignement

Le juge constate d’abord que « la mesure d’éloignement n’a pu être mise à exécution dans le délai de quatre jours ». Il s’assure ensuite des démarches entreprises et relève qu’« il n’est émis aucune critique sur les diligences accomplies ». La présence d’un passeport valide réduit l’aléa documentaire, et « une demande de routing a été effectuée le 14 juin 2025 à 11h14; », ce qui atteste une action rapide et orientée vers l’exécution.

L’exigence du « temps strictement nécessaire » requiert une perspective raisonnable d’éloignement pendant la période sollicitée. La combinaison d’un titre de voyage disponible et d’une saisine des transporteurs caractérise des diligences utiles. La motivation demeure concise, mais elle articule adéquatement l’obstacle temporel initial et la dynamique procédurale engagée.

B. L’impossibilité d’une mesure moins attentatoire

Le juge examine ensuite l’alternative d’assignation à résidence prévue par le CESEDA. Il retient que la personne « ne remplit pas les conditions d’une assignation à résidence », faute de « garanties de représentation effectives », en raison de l’absence de domicile fixe et de manquements antérieurs. Le raisonnement repose sur des critères classiques de contrôle de la représentation, centrés sur la fiabilité et la comparution.

Ce refus de la mesure alternative s’inscrit dans le principe de nécessité, entendu comme obligation de choisir la mesure la moins attentatoire. L’insuffisance des garanties rend la surveillance non carcérale inappropriée, ce qui justifie le maintien en rétention. La conclusion s’impose alors, le juge considérant qu’« en définitive, rien ne s’oppose à ce que soit ordonnée la prolongation », et ordonnant la prolongation pour vingt-six jours.

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Hassan KOHEN
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