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La décision rendue par le Tribunal judiciaire de Mende, pôle social, le 16 juin 2025, tranche une contestation d’un taux d’incapacité permanente partielle fixé à la suite d’un accident du travail. L’enjeu porte d’abord sur la sanction de l’absence de transmission, en phase préalable, du rapport médical à l’employeur. Il concerne ensuite la méthode d’évaluation du taux au regard des seules séquelles imputables à l’accident, à la date de consolidation, et du barème indicatif.
Un salarié a déclaré un accident du travail en décembre 2019, dont le caractère professionnel a été reconnu. Une rente a été notifiée en novembre 2022 sur la base d’un taux de soixante‑sept pour cent. L’employeur a contesté devant la commission médicale de recours amiable, qui a confirmé la décision en juin 2023. Saisi en juillet 2023, le juge a ordonné une expertise sur pièces en décembre 2023, déposée en mars 2025, avant l’audience d’avril 2025. L’employeur sollicitait l’inopposabilité de la décision, faute de communication du rapport au médecin mandaté, et la fixation d’un taux ramené à neuf pour cent. La caisse demandait la confirmation du taux initial, l’écartement de l’expertise judiciaire, et le rejet des prétentions adverses.
La question posée est double. D’une part, l’omission de la transmission du rapport médical en phase préalable emporte‑t‑elle inopposabilité de la décision fixant le taux d’incapacité à l’égard de l’employeur ? D’autre part, au fond, comment déterminer le taux d’incapacité indemnisable à la date de consolidation, compte tenu d’un état antérieur dégénératif, d’une possible atteinte psychique, et du barème indicatif ? Le tribunal écarte toute sanction d’inopposabilité, retient l’absence de décompensation anxio‑dépressive prouvée, individualise les postes rachidiens, et fixe un taux global opposable de trente‑cinq pour cent.
I. La phase préalable sans sanction d’inopposabilité
A. Le cadre légal et l’autorité de l’avis du 17 juin 2021
Le juge rappelle d’abord la nature de l’expertise judiciaire, qui n’a pas d’effet liant. Il énonce que « A titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’un rapport d’expertise judiciaire ne constitue qu’un avis technique destiné à faciliter les échanges contradictoires entre les parties et la solution judiciaire du litige ». La discussion se concentre ensuite sur l’interprétation combinée des articles L. 142‑10 et R. 142‑8‑3 du code de la sécurité sociale, à la lumière de l’avis rendu par la Cour de cassation le 17 juin 2021.
Le jugement cite l’avis selon lequel « les délais impartis […] qui ne sont assortis d’aucune sanction, sont indicatifs de la célérité de la procédure ». Surtout, il reproduit que « leur inobservation n’entraîne pas l’inopposabilité à l’égard de l’employeur de la décision attributive du taux d’incapacité dès lors que celui‑ci dispose de la possibilité de porter son recours devant la juridiction de sécurité sociale […] et d’obtenir, à l’occasion de ce recours, la communication du rapport ». Cette formulation vise tant l’hypothèse d’une transmission tardive que celle d’une absence totale de communication, laquelle ne reçoit pas de sanction textuelle.
Cette lecture conduit logiquement à refuser une inopposabilité non prévue par la loi. Le tribunal en déduit que « les textes susvisés ne prévoyant pas de sanction à une communication hors délai ou à une absence de communication, il n’y a pas lieu d’attacher […] une sanction particulière non prévue par les textes comme l’inopposabilité ». La solution s’inscrit dans la continuité de l’avis, en maintenant l’office du juge comme remède à la carence préalable.
B. La loyauté procédurale et la nature non juridictionnelle du recours préalable
L’employeur invoquait la loyauté et le caractère contradictoire de la phase préalable. Le tribunal opère une mise au point nette, en relevant que ce recours ne s’analyse pas en procès civil. Il précise que la « notion de procès équitable ne s’applique pas devant une commission dépourvue de caractère juridictionnel ». La loyauté, si elle guide le procès, ne fonde pas ici une sanction autonome.
La portée pratique est notable. La décision affirme la sécurité juridique des décisions fixant les taux, malgré des carences préalables, sous réserve d’un débat complet devant le juge. Elle préserve l’économie de la réforme de 2019, qui a organisé la communication des rapports, tout en évitant une multiplication contentieuse d’inopposabilités. La contrepartie réside dans un renforcement de l’office du juge, saisi pour restaurer le contradictoire médical et, au besoin, ordonner une expertise.
II. L’évaluation concrète du taux d’incapacité
A. Le périmètre des séquelles indemnisables et l’écartement des éléments non probants
Le juge borne l’appréciation au jour de la consolidation. Le principe est rappelé sans ambiguïté : « Le taux d’incapacité permanente partielle doit s’apprécier à la date de consolidation de l’état de santé ». Il rappelle aussi que seules « les séquelles résultant des lésions consécutives à l’accident du travail » sont indemnisables. Il en résulte l’exclusion des événements socioprofessionnels postérieurs, comme une inaptitude ultérieure, qui ne peuvent influer sur le taux.
Sur l’état antérieur, la motivation distingue un ancien accident sans séquelles significatives d’un terrain dégénératif cervical et lombaire objectivé par imagerie. Le tribunal relève que les examens ont mis en évidence des lésions dégénératives préexistantes, et retient leur incidence dans l’évolution fonctionnelle. Il en conclut que l’employeur apporte « la preuve de l’existence d’un état antérieur important dont l’évolution a eu une incidence réelle sur l’incapacité fonctionnelle ». En revanche, l’atteinte psychique alléguée n’est pas retenue, faute de suivi et d’évaluation probants, la seule prescription d’un médicament à indications multiples demeurant insuffisante.
La méthode retenue respecte l’office des juges du fond. Il est souligné qu’« il est constant que les juges du fond doivent se livrer à une appréciation in concreto […] et […] peuvent motiver leur décision en s’appuyant sur les avis médicaux versés aux débats ». La juridiction articule les différentes sources médicales, tient compte du barème, et sélectionne les séquelles imputables au fait accidentel.
B. La fixation du taux par postes au regard du barème indicatif
Le juge retient que « le barème n’a qu’un caractère indicatif » et que les taux proposés sont des « taux moyens », tout en rappelant que le praticien doit motiver tout écart. Il reproche à l’expertise judiciaire d’avoir proposé un taux global de neuf pour cent sans individualiser par postes, ni s’adosser explicitement aux rubriques du barème, alors même qu’une individualisation s’impose.
Pour le rachis cervical, la décision vise la rubrique « 3.1 RACHIS CERVICAL ». Elle reproduit que « Persistance de douleurs et gêne fonctionnelle […] Discrètes 5 à 15 / Importantes 15 à 30 / Très importantes […] 40 à 50 ». Au vu d’une gêne fonctionnelle résiduelle sans douleurs cervicales persistantes ni signes neurologiques décrits, elle retient un taux de quinze pour cent, dans le haut de la fourchette des séquelles discrètes.
Pour le rachis dorso‑lombaire, la décision mobilise « 3.2 RACHIS DORSO‑LOMBAIRE ». Elle rappelle que « Persistance de douleurs […] Discrètes 5 à 15 / Importantes 15 à 25 / Très importantes […] 25 à 40 ». Des douleurs lombaires provoquées sans irradiation ni déficit conduisent à confirmer vingt pour cent, dans la tranche des séquelles importantes, conformément aux constats cliniques. L’addition arithmétique des postes, non contestée, aboutit à un taux global de trente‑cinq pour cent.
La solution concilie rigueur et pragmatisme. Elle refuse un abaissement excessif, pourtant proposé par l’expertise judiciaire, en réaffirmant la centralité du barème indicatif comme grille d’aide à la décision. Elle consacre une approche équilibrée de l’état antérieur, en isolant l’aggravation imputable et en excluant les éléments non établis. Ce faisant, elle stabilise la méthode d’évaluation des séquelles rachidiennes à la date de consolidation, tout en rendant l’issue opposable à l’employeur.