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Le divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage constitue l’une des voies procédurales permettant aux époux de mettre fin à leur union sans qu’il soit nécessaire d’établir des fautes imputables à l’un ou l’autre. Le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Mulhouse le 18 juin 2025 illustre la mise en œuvre de ce mécanisme dans un contexte international.
Deux époux de nationalité algérienne s’étaient mariés le 30 avril 2011 à Boumerdes en Algérie. Trois enfants sont nés de cette union en 2014, 2016 et 2020 à Mulhouse. L’épouse a introduit une demande en divorce par assignation. Une ordonnance sur mesures provisoires a été rendue le 9 décembre 2024. Les deux époux ont accepté le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci. L’épouse sollicitait le prononcé du divorce, la fixation de la résidence des enfants à son domicile, un droit de visite et d’hébergement au profit du père, et une contribution à l’entretien des enfants. L’époux ne s’est pas opposé au divorce ni aux mesures relatives aux enfants.
Le juge aux affaires familiales devait déterminer sa compétence internationale et la loi applicable, puis statuer sur le prononcé du divorce et organiser ses conséquences tant patrimoniales que relatives aux enfants.
Le tribunal a constaté sa compétence internationale et l’applicabilité de la loi française. Il a prononcé le divorce sur le fondement de l’acceptation mutuelle du principe de la rupture. Il a fixé la résidence des enfants chez la mère, accordé au père un droit de visite et d’hébergement classique, et fixé la contribution paternelle à 90 euros par mois et par enfant.
Cette décision appelle un commentaire portant sur le cadre juridique du divorce accepté en contexte international (I), puis sur l’organisation des conséquences du divorce à l’égard des enfants (II).
I. Le prononcé du divorce accepté dans un contexte de droit international privé
Le jugement présente la particularité de concerner des époux étrangers mariés à l’étranger mais résidant en France. Le juge a dû préalablement établir sa compétence et déterminer la loi applicable (A), avant de constater les conditions du divorce pour acceptation du principe de la rupture (B).
A. La détermination de la compétence et de la loi applicable
Le tribunal « constate la compétence internationale de la présente juridiction et déclare la loi française applicable au présent litige ». Cette formulation lapidaire, caractéristique des décisions de première instance, masque l’articulation complexe des règles de droit international privé en matière de divorce.
La compétence des juridictions françaises en matière de divorce est régie par le règlement Bruxelles II ter pour les situations intracommunautaires, et par les règles de compétence de droit commun dans les autres cas. S’agissant d’époux algériens, le règlement n’est pas directement applicable. La compétence française se fonde alors sur la résidence habituelle des époux en France, critère retenu tant par l’article 1070 du code de procédure civile que par les règles de compétence internationale.
Quant à la loi applicable, le règlement Rome III du 20 décembre 2010, applicable en France, désigne la loi de la résidence habituelle commune des époux au moment de la saisine du juge. Les époux résidant tous deux à Mulhouse, la loi française s’applique naturellement. Cette solution présente l’avantage de la cohérence entre le for et le fond, évitant au juge français d’appliquer un droit étranger en matière de divorce.
B. Les conditions du divorce pour acceptation du principe de la rupture
Le tribunal « constate l’acceptation par les deux époux du principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci ». Cette formulation reprend les termes de l’article 233 du code civil, qui dispose que le divorce peut être demandé par l’un ou l’autre des époux lorsqu’ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l’origine de celle-ci.
Ce cas de divorce, issu de la loi du 26 mai 2004, occupe une position intermédiaire entre le divorce par consentement mutuel et le divorce contentieux. Il permet aux époux de s’accorder sur le principe même de la séparation tout en laissant au juge le soin de trancher les conséquences sur lesquelles ils ne parviennent pas à s’entendre. L’acceptation du principe de la rupture est irrévocable, conformément à l’article 233 alinéa 2 du code civil.
La décision ne précise pas les modalités selon lesquelles cette acceptation a été recueillie. L’article 1123 du code de procédure civile prévoit que l’acceptation peut résulter d’un écrit signé par chaque époux ou être constatée dans les conclusions. Le caractère définitif de cette acceptation protège les époux contre tout revirement procédural et sécurise l’issue du litige.
II. L’organisation des conséquences du divorce à l’égard des enfants
Le jugement organise de manière détaillée l’exercice de l’autorité parentale et les modalités de résidence des enfants (A), ainsi que la contribution du père à leur entretien avec le recours au mécanisme de l’intermédiation financière (B).
A. La résidence des enfants et le droit de visite et d’hébergement du père
Le tribunal « rappelle que l’autorité parentale est exercée en commun » par les deux parents. Ce rappel, conforme à l’article 372 du code civil, souligne que le divorce ne modifie pas le principe de la coparentalité. L’exercice conjoint de l’autorité parentale demeure la règle, le divorce n’affectant que les modalités pratiques de son exercice.
La résidence des enfants est fixée au domicile de la mère. Le père bénéficie d’un droit de visite et d’hébergement selon un calendrier classique : un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires en alternance selon la parité des années. Le juge précise que les trajets sont à la charge du père, solution fréquente lorsque celui-ci n’a pas la résidence principale.
La décision contient une présomption de renonciation en cas de non-exercice du droit dans les délais impartis. Le juge prévoit qu’à défaut d’exercice « dans l’heure pour les fins de semaine, dans la journée pour les vacances », le parent sera présumé avoir renoncé à la période considérée. Cette disposition, destinée à éviter l’incertitude pour le parent gardien et les enfants, s’inscrit dans une jurisprudence soucieuse d’assurer la prévisibilité des situations familiales.
B. La contribution à l’entretien des enfants et l’intermédiation financière
Le tribunal fixe la contribution paternelle à 90 euros mensuels par enfant, soit 270 euros au total. Ce montant, relativement modeste, s’explique vraisemblablement par les ressources limitées du débiteur, les deux parties bénéficiant de l’aide juridictionnelle totale.
Le jugement comporte une indexation automatique sur l’indice des prix à la consommation. Le juge « condamne dès à présent le parent débiteur à payer les majorations futures », dispensant ainsi le créancier de toute démarche ultérieure de revalorisation judiciaire.
Le tribunal précise qu’en application de l’article 373-2-2, II du code civil, le versement de cette contribution s’effectuera par l’intermédiaire de l’organisme débiteur des prestations familiales. Ce dispositif d’intermédiation financière, généralisé par la loi du 23 décembre 2019 et renforcé par les textes ultérieurs, vise à sécuriser le paiement des pensions alimentaires. L’organisme débiteur des prestations familiales collecte la pension auprès du débiteur et la reverse au créancier, réduisant ainsi les risques d’impayés.
Le jugement rappelle également les voies de recouvrement forcé disponibles en cas de défaillance, notamment le recours à l’agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires dès le premier incident de paiement. Cette pédagogie juridictionnelle traduit la volonté du législateur et des juridictions d’assurer l’effectivité des décisions en matière d’obligations alimentaires.