Tribunal judiciaire de Nantes, le 20 juin 2025, n°23/01136

Par un jugement du tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, du 20 juin 2025, la juridiction tranche la recevabilité d’une opposition à contrainte en recouvrement des cotisations.

La cotisante, affiliée comme travailleur indépendant de 2018 à 2022, a reçu une mise en demeure, puis une contrainte du 12 octobre 2023, signifiée le 18 octobre 2023.

Elle a formé opposition le 29 novembre 2023, invoquant la liquidation judiciaire de la société dirigée et la fixation de la cessation des paiements au 31 mai 2021.

L’organisme de recouvrement sollicitait l’irrecevabilité pour forclusion et la condamnation aux frais de signification, tandis que la cotisante estimait devoir être exonérée du montant visé.

La question portait sur le point de départ et la rigueur du délai d’opposition. Le tribunal retient la forclusion au regard des textes et des dates retenues.

I. La rigueur du délai d’opposition et son point de départ

A. Le cadre légal de l’article R 133-3 du code de la sécurité sociale

Le jugement fonde sa solution sur l’article R 133-3 du code de la sécurité sociale, qu’il restitue en des termes non équivoques.

« Il résulte des dispositions de l’article R 133-3, alinéa 4, du code de la sécurité sociale qu’à peine d’irrecevabilité l’opposition à la contrainte émise par un organisme de sécurité sociale doit être formée par le débiteur dans les quinze jours à compter de la date à laquelle cette contrainte lui est signifiée. »

Ce rappel fait ressortir deux axes, le point de départ fixé à la signification, et le caractère impératif d’un délai bref, qualifié de forclosif.

La computation se réalise en jours, sans prorogation particulière, sauf cause étrangère démontrée. La charge de l’opposition incombe au débiteur qui doit saisir la juridiction compétente.

B. Une opposition tardive emporte forclusion et évince le fond

Appliquant ces indications, la juridiction retient que l’opposition formée le 29 novembre 2023 intervient plus de quinze jours après la signification du 18 octobre 2023.

« L’opposition à la contrainte du 12 octobre 2023 est dès lors irrecevable. »

Le moyen tiré de la liquidation de la société est inopérant à ce stade, l’exception d’instance ne modifiant ni le point de départ, ni la nature du délai.

La condamnation aux frais de signification s’ensuit, sur le fondement combiné des articles R 133-6 du code de la sécurité sociale et A 444-31 du code de commerce.

II. Portée et appréciation de la solution retenue

A. La sécurité du recouvrement social consacrée par une lecture orthodoxe

La solution assure la sécurité du recouvrement en fixant un repère clair et vérifiable. Elle évite l’incertitude liée à des discussions tardives sur le bien‑fondé des cotisations.

La jurisprudence de la Cour de cassation confirme de longue date la nature préfixe du délai d’opposition à contrainte, lequel n’admet qu’une preuve stricte d’un empêchement insurmontable.

Ce choix favorise la célérité des procédures et la stabilité des créances sociales. Il protège l’équilibre financier des régimes, tout en préservant la lisibilité des voies de recours.

B. Les limites face aux procédures collectives et la protection du cotisant

L’argument tiré d’une procédure collective interroge toutefois l’articulation entre dettes personnelles du travailleur indépendant et passif social de la personne morale.

Le gérant majoritaire affilié relève d’un régime personnel, distinct du passif de la société. La liquidation n’emporte pas suspension du délai d’opposition, sauf texte spécial ou fraude caractérisée.

La rigueur temporelle peut toutefois priver d’un examen au fond des contestations sérieuses, notamment sur l’assiette ou la période. Elle invite à une vigilance accrue lors des significations.

Une voie d’aménagement existe par l’examen de la régularité des actes de signification, ou par l’invocation d’une cause étrangère, mais elle requiert une preuve exigeante et immédiate.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture