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Par un jugement du 20 juin 2025, le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, a statué sur la fixation du taux d’incapacité permanente consécutif à un accident du travail. L’enjeu portait sur l’appréciation du taux médical au regard du barème indicatif et sur l’existence d’une incidence professionnelle autonome. L’affaire concernait un salarié intérimaire victime d’une chute avec douleurs cervicales et lombaires persistantes, en présence d’un état dégénératif antérieur objectivé par imagerie sans lésion post‑traumatique caractérisée.
Après notification d’un taux de 16 %, un recours amiable a été rejeté. Saisi, le pôle social a ordonné un examen par un médecin consultant, l’organisme de sécurité sociale étant dispensé de comparution. Le demandeur sollicitait 30 % à titre médical et 7 % au titre professionnel. L’organisme ne s’opposait pas aux constatations du service médical. La controverse portait donc, en substance, sur la qualification de la gêne fonctionnelle et sur la prise en considération des conséquences professionnelles de l’accident.
La question de droit tenait, d’abord, à la méthode d’évaluation du taux au regard du barème de l’UCANSS lorsque la gêne est qualifiée de discrète et que les examens sont non lésionnels. Elle portait, ensuite, sur l’office du juge pour reconnaître un taux socioprofessionnel, à partir d’indices médicaux et professionnels, même en l’absence d’inaptitude formellement prononcée. Le tribunal rappelle d’emblée, au visa de l’article L.434‑2 du Code de la sécurité sociale, que « le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité ».
La juridiction maintient le taux médical de 16 % en retenant deux composantes à 8 % pour les segments cervical et dorso‑lombaire, puis ajoute 4 % au titre professionnel. Le dispositif fixe ainsi le taux global à 20 %, avec répartition entre composante médicale et composante professionnelle.
I. Le maintien du taux médical à 16 %
A. Barème indicatif et qualification « discrète » des séquelles
Le jugement s’appuie sur des constatations concordantes du service médical, de l’instance de recours amiable et du médecin consultant. Les imageries sont sans lésion, l’état dégénératif antérieur est établi, l’examen clinique révèle une discordance modérée et une gêne fonctionnelle qualifiée de discrète. Le raisonnement s’aligne sur le barème, rappelé en ces termes pour le rachis cervical: « Discrètes 5 à 15 », « Importantes 15 à 30 », « Très importantes séquelles anatomiques et fonctionnelles 40 à 50 ». Pour le rachis dorso‑lombaire, le barème indique: « Discrètes 5 à 15 », « Importantes 15 à 25 », « Très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques 25 à 40 ».
La juridiction souligne que « les douleurs et la gêne fonctionnelle imputables à l’accident du travail ont bien été prises en compte pour fixer le taux d’incapacité dont il n’est pas contesté qu’elles peuvent être qualifiées de discrètes ». En retenant 8 % pour chacun des deux segments, elle se situe dans la fourchette basse, justifiée par l’absence de lésion objectivée et par la faible intensité fonctionnelle. La méthode est conforme au cadre légal rappelé, qui impose de tenir compte du barème indicatif, sans s’y enfermer mécaniquement.
B. Appréciation probatoire et contrôle du juge sur l’évaluation médicale
Le jugement insiste sur la cohérence des sources médico‑légales: examen du service médical, décision de l’instance de recours amiable, avis du médecin consultant. L’addition de ces éléments emporte la conviction du juge quant à la stabilité et la pertinence du taux retenu. La formule choisie est nette: « Le taux médical apparaît par conséquent avoir été correctement évalué et doit être maintenu. » Elle manifeste un contrôle de proportionnalité au barème, fondé sur la qualification clinique et l’objectivation par imagerie.
La décision refuse, corrélativement, la traction vers la « fourchette haute » faute d’éléments nouveaux ou déterminants. L’exigence probatoire est posée avec clarté et sobriété: les allégations de douleurs persistantes ne suffisent pas, en l’absence d’indices cliniques convergents ou de signes anatomiques convaincants. La motivation, brève, rappelle que le barème encadre l’appréciation, tout en laissant au juge un pouvoir d’ordonnancement des constats médicaux.
II. La reconnaissance d’un taux socioprofessionnel de 4 %
A. Fondement et critères de l’incidence professionnelle
Après avoir arrêté le taux médical, le tribunal envisage distinctement l’incidence professionnelle. Il énonce que « le taux d’incapacité permanente partielle peut compenser en partie une incidence professionnelle liée aux conséquences d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ». La solution s’appuie sur l’âge à la consolidation, la pénibilité du métier exercé, les restrictions issues de la surveillance médicale du travail et la reconnaissance d’une situation de handicap.
Ces indices composent une présomption simple d’entrave au maintien dans l’emploi antérieur, suffisante pour ouvrir un quantum spécifique, sans exiger une inaptitude définitive déjà prononcée. Le raisonnement valorise la cohérence des pièces, apprécie la vraisemblance des limitations au regard du poste, et isole l’impact professionnel de séquelles médicales modestes mais réelles.
B. Portée pratique de l’autonomie du taux professionnel
Le tribunal conclut que « Il doit par conséquent lui être octroyé un taux professionnel de 4 % ». Ce choix confirme l’autonomie fonctionnelle du taux socioprofessionnel, qui s’agrège au taux médical sans le dupliquer. La solution clarifie l’articulation entre les deux dimensions: la gêne fonctionnelle « discrète » ne ferme pas la porte à une reconnaissance ciblée d’incidence sur l’emploi, lorsque les indices professionnels convergent.
La portée est double. D’une part, elle rappelle que l’absence de lésion objectivée ne neutralise pas l’évaluation de l’impact sur l’activité antérieure, surtout pour des métiers exigeant des efforts répétés. D’autre part, elle propose un calibrage mesuré du quantum professionnel, ici limité, qui évite la surcompensation et aligne la réparation sur la vraisemblance concrète des restrictions. L’ensemble aboutit à un total de 20 %, fidèle au cadre légal, et lisible pour les acteurs de la réparation.