Tribunal judiciaire de Nice, le 18 juin 2025, n°25/00739

Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nice, 18 juin 2025, jugement avant dire droit statuant sur des interventions en cours d’instance. La décision examine la jonction d’un nouveau bailleur et la mise en cause de l’assureur de la locataire, afin d’étendre une expertise judiciaire.

Un bail d’habitation, conclu en 1999, porte sur un logement qui a connu des infiltrations, l’occupante sollicitant en 2023 une expertise judiciaire. Par décision du 2 juin 2023, une mesure d’instruction a été ordonnée, avec rappel pour suivi, avant de multiples renvois consécutifs. Entre-temps, l’immeuble a été acquis en 2024 par un nouveau propriétaire, désormais bailleur, qui a assigné en 2025 l’assureur de la locataire.

La bailleresse demandait de rendre commun et opposable l’ordonnance d’expertise de 2023 à l’assureur, ainsi que la poursuite des opérations au contradictoire de celui-ci. L’assureur concluait au débouté et réclamait une indemnité de procédure, contestant notamment la pertinence et l’utilité de son appel en cause. La juridiction retient la recevabilité des deux interventions, déclare le jugement d’expertise commun et opposable à l’assureur, réserve les dépens et rappelle l’exécution provisoire de droit. L’affaire a été renvoyée pour suivi des opérations à l’audience d’octobre 2025.

I – Recevabilité de l’intervention volontaire du nouveau bailleur

A – Lien suffisant et droit d’agir

Le juge rappelle le critère légal, selon lequel « l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ». Il précise encore que « l’intervention volontaire est, selon l’article 328, principale ou accessoire » et s’apprécie à l’aune du droit d’agir de son auteur. « Elle est principale en application de l’article 329 du code de procédure civile, lorsqu’elle élève une prétention au profit de celui qui la forme ». « Elle n’est recevable que si son auteur a le droit d’agir relativement à cette prétention ».

Transféré en 2024, le droit de propriété emporte la qualité de bailleur, conférant un intérêt direct aux mesures d’instruction et à leurs suites procédurales. La juridiction en déduit un rattachement suffisant aux prétentions relatives à l’état du logement et aux travaux d’embellissement envisagés par l’expertise.

B – Effets procéduraux de l’intervention principale

La recevabilité reconnue assure la représentation du nouveau bailleur dans la suite des opérations, sans rupture d’instance ni remise en cause des diligences antérieures. Elle prévient la multiplication d’instances parallèles relatives à l’entretien du bien loué, tout en consolidant l’autorité technique conférée à l’expert déjà désigné. La solution s’accorde avec l’économie des articles 325 à 329, qui favorisent l’unicité du procès lorsque l’objet du litige demeure identique. Une réserve toutefois subsiste quant à l’étendue exacte des prétentions propres du nouvel intervenant, qui devront rester strictement connexes à l’objet initial.

II – Mise en cause de l’assureur et extension de l’expertise

A – Intérêt à agir et jugement commun

Le juge énonce le cadre textuel de l’intervention forcée. « Un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d’agir contre lui à titre principal ». Le même motif retient que « Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt afin de lui rendre commun le jugement ». La juridiction insiste enfin: « Le tiers doit être appelé en temps utile pour faire valoir sa défense ».

L’utilité tenait ici aux travaux d’embellissement restants, imputables à un sinistre antérieur, que l’assureur est susceptible de garantir selon la police et ses clauses. Appelé en 2025, l’assureur pouvait encore participer contradictoirement aux opérations, l’expertise n’étant pas clôturée, de sorte que l’exigence de convocation en temps utile était satisfaite.

B – Conséquences: expertise, dépens et exécution provisoire

La déclaration de jugement commun emporte opposabilité de la mesure d’instruction et ouvre la participation de l’assureur aux diligences techniques subséquentes. Ce choix ménage l’égalité des armes et limite les contestations ultérieures sur l’étendue des dommages et l’imputation des réparations d’agrément. La juridiction réserve, à bon droit, frais et demandes accessoires, afin de les trancher à l’issue des opérations et au vu des conclusions expertales définitives.

Sur l’exécution, le dispositif rappelle la règle de principe. « Le présent jugement est de droit exécutoire à titre provisoire en vertu de l’article 514 du code de procédure civile, à moins que le juge ou la loi en décide autrement ». L’articulation entre instruction en cours et exécution de droit évite les ralentissements procéduraux et sécurise les diligences contradictoires demeurant à accomplir.

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