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Rendue par le tribunal judiciaire d’Orléans, ordonnance de référé du 13 juin 2025, la décision statue sur une demande d’expertise médicale in futurum fondée sur l’article 145 du code de procédure civile, à la suite d’un accident de la circulation. Un jugement du tribunal correctionnel de Bonneville, en date du 14 décembre 2023, avait déjà retenu la responsabilité pénale du conducteur impliqué. Une expertise amiable avait constaté l’absence de consolidation, et l’instance en référé a été engagée par assignations des 31 décembre 2024 et 6 janvier 2025.
La demanderesse sollicitait une expertise et, initialement, une provision dont elle s’est ensuite désistée à l’audience du 25 avril 2025. L’assureur concluait à statuer ce que de droit sur la mesure d’instruction, et à rejeter les frais irrépétibles. La juridiction rappelle d’abord, au visa de l’article 145, que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées ». Elle retient ensuite l’intérêt légitime de la mesure sollicitée afin de permettre la liquidation du préjudice corporel, et « ORDONNE une expertise médicale ». Sur les frais, la juridiction énonce encore : « En l’état du litige, il n’apparait pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés au titre des frais irrépétibles ». Le dispositif précise que « Le juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire », ordonne l’expertise, met à la charge de la demanderesse l’avance des frais et rejette les autres demandes.
I. Le référé probatoire en matière de dommage corporel
A. Le motif légitime et l’utilité de la preuve
L’ordonnance mobilise l’article 145 dans sa lettre, en rappelant que « les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées » avant tout procès si un motif légitime existe. Le raisonnement s’attache à la finalité probatoire : établir un socle technique fiable en vue de la liquidation du dommage corporel, dans un contexte d’absence de consolidation. La présence d’une expertise amiable n’empêche pas la caractérisation de cet intérêt, dès lors que l’amiable n’a pas force obligatoire et que le contradictoire juridictionnel demeure la garantie de l’équilibre des droits.
L’utilité de la mesure ressort des éléments cliniques et de la temporalité du dossier. L’ordonnance relève que la preuve attendue conditionne la solution future du litige indemnitaire, ce qui satisfait l’exigence d’adéquation entre l’objet de l’expertise et la controverse à venir. La juridiction veille ainsi à ne pas préjuger du fond, tout en assurant la conservation de la preuve médicale évolutive et sa structuration selon la nomenclature des postes de préjudices.
B. L’articulation avec la procédure pénale et l’expertise amiable
La décision pénale antérieure ne dessaisit pas le juge civil de son office probatoire. Le jugement correctionnel, fût-il définitif, ne porte pas sur l’évaluation médico‑légale du dommage, laquelle requiert un éclairage spécifique et actualisé. L’ordonnance adopte une position cohérente avec la dualité des offices : la culpabilité constatée n’épuise pas la question de l’étendue du préjudice réparable, surtout en cas d’absence de consolidation.
L’existence d’un rapport amiable ne fait pas obstacle à l’expertise judiciaire quand le contradictoire doit être renforcé. L’ordonnance retient que l’expertise ordonnée vise à permettre la liquidation, sans remettre en cause l’amiable mais en le complétant par une mesure impartiale et contradictoire. La mission détaillée, qui couvre DSA, DFT, DFP, ATP et incidences professionnelles, confirme l’orientation vers une évaluation complète et utile à une future décision au fond.
II. Portée procédurale et appréciation de la solution
A. La répartition des dépens et le traitement des frais irrépétibles
La juridiction applique l’article 696 du code de procédure civile en mettant les dépens à la charge de la partie dans l’intérêt de laquelle la mesure intervient. Cette solution s’inscrit dans la logique du référé probatoire, instrument au service d’une partie qui sollicite la preuve. L’ordonnance complète son analyse en rejetant les demandes fondées sur l’article 700, relevant qu’« en l’état du litige, il n’apparait pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés au titre des frais irrépétibles ».
La constance de cette appréciation repose sur l’économie du référé : la mesure n’emporte ni tranchée du fond ni constat d’abus. La réserve sur les frais irrépétibles préserve la neutralité du stade probatoire et évite de préjuger des responsabilités indemnitaires. Le choix d’exiger une consignation de 1 500 euros, sous délai, renforce cette rigueur procédurale tout en garantissant la célérité des opérations.
B. Les incidences pratiques de la mission ordonnée et les garanties du contradictoire
La mission, finement structurée, embrasse l’ensemble des postes patrimoniaux et extrapatrimoniaux, avant et après consolidation. Elle prévoit un pré‑rapport, des dires et une réponse, assurant un contradictoire effectif et documenté. L’ordonnance interdit les entretiens non contradictoires avec un sapiteur mandaté par une partie, ce qui matérialise l’exigence d’impartialité. Elle précise aussi que l’expert devra déposer son rapport dans un délai de six mois, renforçant la prévisibilité procédurale.
La portée de la décision tient également à sa flexibilité en cas de non‑consolidation persistante. L’ordonnance permet le dépôt d’un rapport intermédiaire et l’organisation d’un nouvel examen, afin de ne pas figer une situation clinique évolutive. En choisissant d’« ORDONNER une expertise médicale » tout en cadrant strictement ses modalités, la juridiction offre une voie probatoire proportionnée, adaptée aux enjeux d’une réparation intégrale et respectueuse de l’égalité des armes.