Tribunal judiciaire de Orléans, le 13 juin 2025, n°25/00098

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Rendue par le tribunal judiciaire d’Orléans le 13 juin 2025, l’ordonnance de référé statue sur une demande d’expertise fondée sur l’article 145 du code de procédure civile. Le litige naît d’une opération de construction autorisée en 2018, réceptionnée en 2020 avec réserves sur les parties communes, et affectée de désordres persistants selon un constat de 2023. Le maître d’œuvre a été placé en liquidation judiciaire en 2024. Le syndicat des copropriétaires a assigné le promoteur, le liquidateur judiciaire de la maîtrise d’œuvre et l’assureur dommages-ouvrage en 2025, afin d’obtenir une mesure d’instruction préalable. Le promoteur sollicitait, à titre subsidiaire, une limitation de mission aux seules infiltrations déclarées à l’assureur en 2024. Les autres défendeurs n’ont pas comparu. Le juge rappelle l’article 472 du code de procédure civile selon lequel « le juge ne fait droit à la demande que si elle régulière, recevable et bien fondée ». La question posée tient aux conditions d’une expertise probatoire avant tout procès, ainsi qu’à l’étendue de la mission et à la charge provisoire des frais. La solution retient l’existence d’un motif légitime, ordonne une expertise large et met les frais à la charge du demandeur. Le juge cite l’article 145 qui dispose qu’« s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instructions légalement admissibles peuvent être ordonnées ». Il en déduit « qu’il existe un motif légitime à voir ordonner l’expertise sollicitée » au contradictoire des défendeurs, l’ordonnance précisant encore que « les défendeurs ne peuvent être considérés comme la partie succombant » et qu’« elle [l’expertise] sera réalisée aux frais du demandeur ».

I. Les conditions d’ouverture de l’article 145 et la justification du recours à l’expertise

A. L’identification du motif légitime au regard des éléments objectifs du dossier
Le juge vérifie la réunion d’éléments concrets de vraisemblance, sans préjuger du fond, conformément à la logique probatoire de l’article 145. L’ordonnance retient un constat de 2023 décrivant des « multiples réserves et désordres » non levés, affectant l’intérieur et l’extérieur de l’ouvrage. Cette pièce établit une utilité immédiate de la mesure pour conserver et établir la preuve avant toute action au fond. Le rappel de l’article 472 complète l’examen, en exigeant que la demande soit « régulière, recevable et bien fondée » malgré la non-comparution de certains défendeurs. L’exigence de proportion et d’utilité guide ainsi l’office du juge des référés, qui reste sur le terrain de l’instruction, non du jugement.

B. La compatibilité de la mesure avec le contexte post-réception et la pluralité d’intervenants
La réception avec réserves n’interdit pas une expertise préalable, l’objectif étant d’éclairer l’état des ouvrages et l’imputation possible. La pluralité d’acteurs, comprenant le promoteur, la maîtrise d’œuvre liquidée et l’assureur dommages-ouvrage, justifie une mesure contradictoire embrassant l’ensemble des désordres allégués. Le juge vise expressément le contradictoire, la convocation de toutes les parties, et l’accès aux documents contractuels utiles. L’expertise ordonnée s’inscrit dans la prévention du contentieux, en préparant une action fondée, qu’elle se rattache au parachèvement des réserves, aux garanties légales, ou aux polices d’assurance mobilisables.

II. L’étendue de la mission d’expertise et le régime des frais au regard de l’équité procédurale

A. Le choix d’une mission large et techniquement exhaustive face à la demande de limitation
La mission porte sur « tous les désordres, malfaçons, inexécutions, défauts de conformité (…) quelle que soit leur nature et leur date d’apparition », avec une analyse des causes, des conséquences, et des remèdes chiffrés. Le juge écarte implicitement la limitation aux seules infiltrations déclarées à l’assureur dommages-ouvrage en 2024. Une telle délimitation aurait contrarié l’objectif probatoire, alors que le constat initial relate une pluralité de désordres. La mission retient également l’examen de la réception, des réserves et de leur levée, point déterminant pour qualifier les responsabilités et mobiliser d’éventuelles garanties légales. La cohérence technique et probatoire commande ainsi une approche globale, circonscrite par l’objet du litige immobilier.

B. La charge provisoire des frais et l’absence de succombance à ce stade
L’ordonnance précise que l’expertise « sera réalisée aux frais du demandeur » et que « les défendeurs ne peuvent être considérés comme la partie succombant ». Cette solution s’accorde avec la nature non décisoire de la mesure in futurum, dépourvue d’appréciation des responsabilités. Le choix d’une consignation par le demandeur, la possibilité de consignation par toute partie en cas de carence, et la fixation d’un calendrier d’opérations renforcent l’efficacité et la loyauté de la procédure. Le contrôle du juge sur le contradictoire, la méthodologie et les délais encadre l’office technique de l’expert. La répartition définitive des coûts demeure réservée au juge du fond, en fonction de l’imputation et de l’issue du litige au principal.

La décision offre une lecture fidèle de l’article 145, recentrée sur l’utilité probatoire immédiate. En retenant un motif légitime appuyé par un constat circonstancié, le juge ordonne une mission exhaustive et contradictoire, adaptée à la complexité d’un chantier post-réception. La solution, équilibrée, préserve les droits de tous et prépare, dans des conditions éclairées, le débat à venir sur la responsabilité et les garanties mobilisables.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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