Tribunal judiciaire de Orléans, le 20 juin 2025, n°25/00134

Par une ordonnance du 20 juin 2025, le juge des référés du Tribunal judiciaire d’Orléans a donné acte aux demandeurs de leur désistement d’instance. Cette décision, rendue sur le fondement des articles 384 et 394 à 399 du Code de procédure civile, illustre le mécanisme procédural par lequel une partie abandonne volontairement son action en justice.

En l’espèce, deux personnes avaient assigné en référé une défenderesse. Les faits à l’origine du litige ne ressortent pas de la décision, celle-ci se bornant à constater le désistement intervenu. À l’audience, les demandeurs ont déclaré vouloir se désister de l’instance engagée. Le juge des référés a constaté ce désistement, l’a déclaré parfait et a prononcé l’extinction de l’instance. Les dépens sont restés à la charge des demandeurs.

La question posée au juge des référés était de déterminer si les conditions du désistement d’instance étaient réunies et quelles conséquences en tirer sur le plan procédural.

Le tribunal a répondu par l’affirmative. Il a donné acte aux demandeurs de leur désistement, l’a déclaré parfait et a prononcé l’extinction de l’instance en application de l’article 384 du Code de procédure civile.

Cette décision invite à examiner successivement les conditions de validité du désistement d’instance en matière de référé (I), puis les effets attachés à ce désistement (II).

I. Les conditions de validité du désistement d’instance en référé

Le désistement d’instance obéit à des règles précises tenant à son expression (A) et à son acceptation éventuelle par le défendeur (B).

A. L’expression de la volonté de se désister

L’article 394 du Code de procédure civile dispose que « le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance ». Ce texte consacre le principe de la liberté procédurale du demandeur. Celui qui a pris l’initiative d’un procès peut y renoncer unilatéralement.

En l’espèce, l’ordonnance relève « qu’à l’audience le demandeur indique qu’il entend se désister de l’instance en cours ». Cette formulation atteste que le désistement a été exprimé oralement devant le juge. La déclaration à l’audience constitue un mode classique d’expression du désistement, le greffier en prenant acte dans les notes d’audience.

Le désistement d’instance se distingue du désistement d’action. Le premier éteint seulement l’instance en cours sans affecter le droit d’agir. Le second emporte renonciation définitive au droit d’action. L’ordonnance vise expressément le désistement d’instance, ce qui préserve théoriquement la faculté pour les demandeurs d’introduire une nouvelle action.

La matière du référé ne fait pas obstacle au désistement. Les règles des articles 394 et suivants s’appliquent devant toutes les juridictions. Le juge des référés, saisi d’une demande provisoire ou conservatoire, peut donc recevoir un désistement dans les mêmes conditions que le juge du fond.

B. L’absence de nécessité d’acceptation par le défendeur

L’article 395 du Code de procédure civile prévoit que le désistement n’est parfait que par l’acceptation du défendeur lorsque celui-ci a présenté une demande reconventionnelle. À défaut de demande reconventionnelle, le désistement produit ses effets sans qu’il soit besoin de recueillir l’accord de l’adversaire.

L’ordonnance commentée déclare le désistement « parfait » sans mentionner d’acceptation de la défenderesse. Cette rédaction implique nécessairement qu’aucune demande reconventionnelle n’avait été formée. La défenderesse n’avait donc pas d’intérêt procédural propre à faire juger une prétention, de sorte que son consentement n’était pas requis.

Cette solution se justifie par la finalité du désistement. Lorsque le défendeur n’a formé aucune demande, il n’a pas intérêt à la poursuite de l’instance. Il serait paradoxal de lui permettre de s’opposer à l’extinction d’un procès qu’il subit. En revanche, s’il a reconventionnellement sollicité une condamnation du demandeur, il devient lui-même partie demanderesse sur ce chef et mérite d’être protégé contre un retrait unilatéral.

La procédure de référé, caractérisée par sa célérité, favorise les désistements simples. Les demandes reconventionnelles y sont moins fréquentes qu’au fond, ce qui explique que le désistement puisse souvent être déclaré parfait sans formalité supplémentaire.

II. Les effets du désistement d’instance

Le désistement régulièrement constaté emporte extinction de l’instance (A) et met les dépens à la charge du demandeur (B).

A. L’extinction de l’instance

L’article 384 du Code de procédure civile énumère les causes d’extinction de l’instance. Le désistement y figure aux côtés de l’acquiescement, de la péremption et du jugement. L’ordonnance vise expressément ce texte pour « prononcer l’extinction de l’instance ».

Cette extinction met fin au lien d’instance qui unissait les parties devant le juge saisi. Les actes de procédure accomplis perdent leur effet. Les délais interrompus par l’assignation recommencent à courir. La litispendance disparaît, permettant à une autre juridiction d’être éventuellement saisie du même litige.

Le désistement d’instance n’a pas autorité de chose jugée au fond. Contrairement à un jugement de débouté, il ne tranche pas le litige. Les demandeurs conservent la faculté de réintroduire une action identique, sous réserve de la prescription. Cette caractéristique distingue le désistement d’instance du désistement d’action qui, lui, éteint définitivement le droit d’agir.

En matière de référé, l’extinction de l’instance présente une particularité. Les mesures provisoires qui auraient pu être ordonnées ne le seront jamais. Si les demandeurs souhaitent ultérieurement obtenir de telles mesures, ils devront saisir à nouveau le juge des référés. L’urgence qui justifiait la première saisine devra être démontrée de nouveau.

B. La charge des dépens

L’article 399 du Code de procédure civile dispose que « les frais de l’instance éteinte sont supportés par le demandeur qui s’est désisté ». L’ordonnance fait application de cette règle en décidant que « les dépens resteront à la charge des demandeurs ».

Cette solution traduit un principe d’équité procédurale. Celui qui prend l’initiative d’un procès puis y renonce doit supporter les frais qu’il a occasionnés à son adversaire et à la justice. Le défendeur, contraint de se défendre sans l’avoir voulu, ne saurait assumer les conséquences financières d’une instance dont l’inutilité est révélée par le désistement.

Les dépens comprennent les droits et émoluments des officiers ministériels, les frais d’expertise éventuels et les indemnités de comparution des témoins. En référé, ces frais sont généralement limités en raison de la brièveté de la procédure. Ils n’en demeurent pas moins à la charge exclusive des demandeurs.

L’ordonnance ne statue pas sur les frais irrépétibles de l’article 700 du Code de procédure civile. Ce silence s’explique vraisemblablement par l’absence de demande en ce sens de la défenderesse. Celle-ci aurait pourtant pu solliciter le remboursement de ses frais d’avocat, le désistement n’y faisant pas obstacle. Le juge des référés conserve en effet le pouvoir de statuer sur l’article 700 lors du prononcé du désistement.

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Hassan KOHEN
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