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La rectification des erreurs matérielles affectant les décisions de justice constitue un mécanisme procédural essentiel à la bonne administration de la justice. Le tribunal judiciaire d’Orléans, par un jugement du 20 juin 2025, apporte une illustration éclairante du régime applicable à cette procédure particulière.
Une société d’assurances avait été attraite dans un litige en matière de construction opposant un constructeur de maisons individuelles à des maîtres d’ouvrage et divers intervenants. Par jugement du 16 janvier 2025, le tribunal avait statué sur l’ensemble des demandes. Dans les motifs de cette décision, la juridiction indiquait qu’une compagnie d’assurances serait condamnée à verser à une autre société d’assurances une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Le dispositif du jugement mentionnait toutefois le rejet de cette même demande.
Par requête du 6 février 2025, la société bénéficiaire de la condamnation mentionnée dans les motifs a saisi le tribunal aux fins de rectification de cette contradiction. Elle sollicitait la mise en conformité du dispositif avec la motivation de la décision.
La question posée au tribunal était celle de savoir si la discordance entre les motifs d’un jugement, qui accueillent une demande, et son dispositif, qui la rejette, constitue une erreur matérielle susceptible de rectification au sens de l’article 462 du code de procédure civile.
Le tribunal judiciaire d’Orléans fait droit à la requête. Il ordonne la rectification du jugement en substituant dans le dispositif la condamnation au paiement de 2 000 euros au rejet initialement mentionné. La décision est rendue sans audience et les dépens sont laissés à la charge de chaque partie.
Cette décision présente un intérêt certain quant à la définition de l’erreur matérielle rectifiable (I) et quant aux modalités procédurales de sa correction (II).
I. La caractérisation de l’erreur matérielle rectifiable
La notion d’erreur matérielle reçoit en l’espèce une application classique (A), tandis que la contradiction entre motifs et dispositif en constitue une illustration topique (B).
A. La notion d’erreur matérielle au sens de l’article 462
Le tribunal fonde sa décision sur l’article 462 du code de procédure civile, qu’il reproduit intégralement. Ce texte dispose que « les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l’a rendu ». La formulation « même passé en force de chose jugée » traduit le caractère perpétuel de cette voie de recours. L’erreur matérielle se distingue ainsi de l’erreur de droit ou de l’erreur d’appréciation, lesquelles ne peuvent être corrigées que par les voies de recours ordinaires.
La jurisprudence définit traditionnellement l’erreur matérielle comme celle qui procède d’une inadvertance et non d’une volonté délibérée du juge. Elle ne doit pas modifier le sens de la décision ni constituer un moyen détourné de revenir sur ce qui a été jugé. En l’espèce, la lecture des motifs révélait sans ambiguïté la volonté du tribunal d’accueillir la demande fondée sur l’article 700. Le dispositif contraire résultait manifestement d’une erreur de plume.
B. La contradiction entre motifs et dispositif comme erreur caractérisée
Le tribunal relève qu’il est « manifeste » que le jugement est affecté d’une erreur matérielle. Cette évidence résulte de la contradiction flagrante entre deux éléments du même jugement. Les motifs de la décision du 16 janvier 2025 énonçaient expressément qu’une compagnie « sera condamnée » à verser une indemnité. Le dispositif mentionnait à l’inverse un débouté de cette même demande.
Cette antinomie rendait le jugement partiellement inexécutable. Le dispositif seul revêt l’autorité de la chose jugée et constitue le titre exécutoire. La société créancière désignée dans les motifs se trouvait ainsi privée de tout droit d’exécution. Le tribunal considère que cette situation ne peut procéder que d’une inadvertance rédactionnelle. La rectification s’impose « sans besoin d’audience » selon la formule employée par la juridiction.
II. Les modalités procédurales de la rectification
La procédure de rectification obéit à un formalisme simplifié (A) dont les effets sur le jugement initial méritent d’être précisés (B).
A. Une procédure simplifiée au service de l’efficacité
L’article 462 du code de procédure civile organise une procédure souple. Le juge peut être saisi par simple requête d’une partie, par requête commune ou se saisir d’office. En l’espèce, une seule partie a présenté la requête. Le tribunal statue « sans audience », ainsi que le permet le texte lorsque l’audition des parties n’apparaît pas nécessaire.
Cette solution procédurale répond à un impératif de célérité. L’erreur étant évidente à la seule lecture du jugement, la discussion contradictoire n’aurait apporté aucun élément utile. Le tribunal précise toutefois que la décision est rendue « par jugement réputé contradictoire susceptible d’appel ». Les droits des parties demeurent ainsi préservés. L’absence d’audience ne prive pas la décision rectificative des voies de recours.
B. Les effets de la rectification sur le jugement initial
La rectification ordonnée ne constitue pas une décision nouvelle. Elle vient compléter et corriger le jugement du 16 janvier 2025 auquel elle s’incorpore. Le tribunal ordonne que « la présente décision rectificative sera mentionnée sur la minute dudit jugement et notifiée comme lui ». Cette mention assure l’unité de la décision rectifiée.
La solution adoptée quant aux dépens mérite attention. Le tribunal « laisse à la charge de chaque partie les dépens qu’elle a engagés ». Cette répartition se justifie par la nature de la procédure. L’erreur ne procède d’aucune faute d’une partie. La requête en rectification ne visait qu’à rétablir la cohérence d’une décision affectée d’une inadvertance purement rédactionnelle.