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Rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris le 13 juin 2025, le jugement statue sur une demande de constat d’acquisition d’une clause résolutoire et d’expulsion. Un bail d’habitation conclu par acte sous seing privé en 2017, assorti d’une clause résolutoire, a donné lieu à un commandement de payer signifié le 26 mars 2024 pour un arriéré de loyers. Le locataire a ultérieurement repris le paiement du loyer courant et sollicité des délais d’apurement, tandis que la bailleresse a actualisé sa créance et s’est opposée, par principe, à des délais. Le litige porte sur l’applicabilité temporelle de la réforme du 27 juillet 2023, qui a réduit à six semaines le délai d’apurement avant acquisition de la clause, et sur l’étendue des pouvoirs du juge pour suspendre ses effets.
Après avoir retenu la recevabilité de l’action au regard de l’information du représentant de l’État et de la saisine de la commission compétente, la juridiction tranche la question de droit centrale. Elle s’attache à déterminer si la réduction du délai à six semaines prévue par la loi du 27 juillet 2023 s’applique à un bail antérieur. Le jugement affirme, au visa de l’article 2 du code civil, que « la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif », de sorte qu’« il n’y a pas lieu de faire application aux contrats conclus antérieurement au 29 juillet 2023 » de la réduction de délai. Il substitue en conséquence le délai de deux mois et constate l’acquisition de la clause au 27 mai 2024. Il fait toutefois usage des pouvoirs de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 pour octroyer des délais de trente-six mois, « les effets de la clause de résiliation de plein droit » étant suspendus « pendant le cours des délais ainsi accordés ». Le jugement précise enfin que « si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ».
I. Le sens de la décision: non-rétroactivité et régime de la clause résolutoire
A. Le cadrage procédural et légal de l’article 24 de 1989
La juridiction vérifie d’abord la régularité du processus d’expulsion en amont du fond. Elle retient que l’assignation a été notifiée au représentant de l’État plus de six semaines avant l’audience et que la commission de prévention des expulsions a été saisie dans les délais. Elle en déduit que « son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ». Cette vérification conditionne l’accès au juge et encadre la mise en œuvre de la clause résolutoire, avant toute analyse de son acquisition et de ses effets.
S’agissant du texte applicable, le jugement rappelle que la clause résolutoire de l’article 24 produit effet après un commandement demeuré infructueux, le délai légal ayant été modifié par la réforme de 2023. Il précise toutefois que la loi nouvelle ne comporte pas de disposition transitoire dérogeant à l’article 2 du code civil, ce qui commande un contrôle de l’application temporelle au regard de la date du contrat.
B. L’application temporelle de la loi de 2023 et la substitution du délai
Le cœur de la motivation repose sur un rappel de principe et une conséquence opératoire. D’une part, la juridiction énonce que « la loi du 27 juillet 2023 ne comprend aucune disposition dérogeant à l’article 2 du code civil », si bien que « la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif ». D’autre part, elle en déduit « qu’il n’y a pas lieu de faire application aux contrats conclus antérieurement au 29 juillet 2023 » de la réduction à six semaines du délai d’apurement. Elle substitue le délai de deux mois, conforme au régime antérieur applicable lors de la conclusion du bail, et constate que la somme visée au commandement n’a pas été réglée dans ce délai.
Le raisonnement suit une logique de continuité des stipulations, « telles qu’encadrées par la loi en vigueur au jour de la conclusion du bail ». La solution articule ainsi le principe de non-rétroactivité et la sécurité juridique des rapports locatifs. Elle retient l’acquisition de la clause au 27 mai 2024, tout en ouvrant immédiatement la seconde séquence relative aux pouvoirs modérateurs du juge.
II. Valeur et portée: pouvoirs de modulation et équilibre locatif
A. Le pouvoir d’octroi de délais et la suspension des effets
La juridiction mobilise pleinement l’outil de l’article 24 pour préserver l’exécution du bail lorsque les conditions sont réunies. Elle rappelle que « le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d’office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu’il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années ». Elle souligne ensuite que « lorsque le juge est saisi en ce sens (…) les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge ».
La décision vérifie concrètement ces prérequis: reprise du loyer courant avant l’audience, diagnostic social et financier, capacité mensuelle raisonnable d’apurement. Elle fixe des modalités réalistes (279 euros par mois pendant trente-six mois), assorties d’une exigence de ponctualité stricte. Le jugement rappelle l’effet utile du mécanisme: « si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ».
B. La portée pratique: sécurité juridique, cohérence transitoire et prévention des expulsions
La solution retenue sur l’application temporelle confirme une lecture orthodoxe du droit transitoire. En l’absence de disposition dérogatoire, le maintien du délai de deux mois pour les contrats antérieurs préserve la prévisibilité contractuelle. Elle évite une modification ex post du seuil d’acquisition de la clause, qui affecterait l’équilibre des engagements pris sous l’empire du droit ancien. La cohérence est renforcée par l’affirmation selon laquelle les contrats « demeurent régis par les stipulations des parties » au regard de la loi applicable lors de leur conclusion.
La portée de l’office du juge en matière de délais invite à une appréciation nuancée de l’équilibre locatif. L’octroi de délais et la suspension des effets concilient l’exigibilité de l’arriéré et la prévention des expulsions non nécessaires. La décision encadre cette modulation par un signal clair: la moindre défaillance réactive la clause et autorise les voies d’exécution, y compris l’indemnité d’occupation. L’ensemble compose un régime lisible, combinant la rigueur de la clause et un instrument de sauvegarde finalisé, afin de permettre l’apurement durable sans désorganiser l’exécution du bail.