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Le Tribunal judiciaire de Paris, ordonnance du 13 juin 2025, statue sur la contestation, par un créancier, d’une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire imposée par la commission de surendettement. La question porte sur les critères de la bonne foi et sur l’existence d’une situation irrémédiablement compromise au sens du code de la consommation.
La débitrice perçoit 1 008,89 euros par mois, dont une retraite modeste et des aides municipales, pour un loyer de 1 088 euros. Le juge retient une capacité significativement négative, au vu des charges évaluées selon l’article R. 731-3. Le créancier invoque la mauvaise foi, en raison d’un arriéré locatif accru et de plusieurs refus de relogement.
La commission a déclaré le dossier recevable le 21 novembre 2024 et a imposé un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire notifié le 16 janvier 2025. Le recours, formé le 28 janvier 2025, est déclaré recevable au regard de l’article R. 741-1. Le juge rappelle que, selon les articles L. 711-1 et L. 741-5, il lui appartient de vérifier la bonne foi et l’impossibilité manifeste d’apurer les dettes exigibles et à échoir.
La question de droit tient à la caractérisation de la mauvaise foi au regard d’un endettement évolutif et de refus de relogement, et à l’existence d’une « situation irrémédiablement compromise » justifiant une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. La juridiction admet la recevabilité du recours, écarte la mauvaise foi, refuse le rétablissement personnel imposé et « renvoye le dossier à la commission lorsque la situation du débiteur n’est pas irrémédiablement compromise ».
I – La bonne foi du débiteur face à l’aggravation de la dette
A – L’aggravation de l’arriéré et la démonstration de la bonne foi
Le juge procède d’abord au calcul normé des charges, en retenant que « il convient d’évaluer les autres charges […] conformément au barème élaboré par la commission ». Ce référentiel, prévu par l’article R. 731-3, assure l’égalité de traitement et objectivise l’absence de capacité de remboursement. En présence d’une capacité négative de 955,11 euros, la juridiction énonce que « l’aggravation de la dette locative n’est pas de nature, à elle-seule, à caractériser la mauvaise foi ». La formule recentre l’analyse sur l’élément intentionnel, exigé par le droit positif, et non sur la seule évolution du passif.
La motivation insiste sur des paiements, même résiduels, attestant d’une démarche de règlement compatible avec la bonne foi. D’où l’affirmation que « Ces efforts de paiement sont exclusifs de la mauvaise foi ». La solution rappelle opportunément que le seul constat d’un déficit structurel, aggravé par un loyer manifestement disproportionné aux ressources, n’aboutit pas ipso facto à l’irrecevabilité pour mauvaise foi, laquelle doit être prouvée par le créancier.
B – Les refus de relogement et la charge probatoire de la mauvaise foi
Le créancier invoquait plusieurs refus de relogement. La juridiction relève que la preuve d’une série de refus imputables au débiteur n’est pas rapportée et que certains motifs apparaissent légitimes au regard de la situation personnelle. Elle souligne que « Ce seul refus ne permet pas de caractériser la mauvaise foi ». La charge probatoire demeure donc sur le créancier, qui doit établir une abstention volontaire et fautive d’assainir la situation.
Cette appréciation circonstanciée s’inscrit dans l’examen in concreto de la conduite du débiteur. L’argument tiré de propositions de logement insuffisamment documentées, ou inadaptées, ne suffit pas. La solution protège l’économie de la procédure de traitement, qui suppose une coopération raisonnable mais n’érige pas en faute chaque refus non déraisonnable, surtout faute d’éléments exacts sur le coût et l’adéquation des offres.
II – L’irrémédiable compromission et le refus du rétablissement personnel
A – La perspective d’amélioration et l’exclusion du rétablissement personnel sans liquidation
Le cadre légal est rappelé avec précision: « un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire peut être imposé ou prononcé lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l’impossibilité manifeste de mettre en œuvre des mesures de traitement et qu’il n’a pas de patrimoine de valeur ». L’article L. 741-6 autorise le juge, en cas de contestation, à orienter vers la solution la plus appropriée à l’état du dossier.
Or la juridiction constate l’absence de suspension antérieure de l’exigibilité et retient des « tentatives de relogement en cours » et l’espoir d’un déblocage de droits à l’aide au logement. Elle en déduit que la situation « n’est pas irrémédiablement compromise ». Ainsi, la négativité de la capacité, si manifeste soit-elle à l’instant, ne clôt pas le débat lorsque des éléments concrets laissent entrevoir une diminution réaliste des charges dans un horizon proche.
B – Le renvoi à la commission et la cohérence procédurale des mesures
La conséquence logique découle du texte: le juge peut « renvoyer le dossier à la commission lorsque la situation du débiteur n’est pas irrémédiablement compromise ». Le refus du rétablissement personnel imposé s’accompagne d’un renvoi pour l’élaboration de nouvelles mesures, adaptées à une situation évolutive et potentiellement assainissable, qu’il s’agisse d’un plan, de délais ou, le cas échéant, d’une suspension.
Cette orientation préserve le caractère subsidiaire et exceptionnel du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, réservé aux cas où toute autre mesure échoue par principe. Elle discipline l’usage du barème de charges et de la capacité, utiles pour diagnostiquer l’urgence, sans figer la solution lorsque des perspectives d’amélioration sont crédibles. La décision concilie ainsi protection du débiteur de bonne foi et sauvegarde de la finalité curative de la procédure.