Tribunal judiciaire de Paris, le 18 juin 2025, n°25/52474

Rendue par le Tribunal judiciaire de Paris le 18 juin 2025, l’ordonnance de référé commente l’articulation de l’article 145 du code de procédure civile avec la conduite d’une expertise. L’objet du litige tient à l’extension des opérations d’expertise à de nouveaux intervenants, ainsi qu’à la prorogation du délai de dépôt du rapport. Les demandeurs ont assigné au mois d’avril 2025, tandis qu’une précédente ordonnance, en décembre 2024, avait déjà commis un expert avec un avis favorable rendu en mars 2025. Les défenderesses ont émis protestations et réserves. La juridiction rappelle le texte applicable et son office en référé, puis apprécie l’existence d’un motif légitime au regard des pièces communiquées.

La question posée porte sur les conditions permettant de rendre communes des opérations d’expertise à des tiers, au regard de leur place probable dans un futur litige. Elle concerne aussi la faculté de proroger le délai de dépôt du rapport, pour préserver l’efficacité et le caractère contradictoire de l’instruction. La solution est double. D’une part, la juridiction retient un motif légitime, en visa de l’article 145, et étend l’expertise. D’autre part, elle proroge le délai en fixant une clause de caducité en cas de notification tardive à l’expert. Elle énonce ainsi que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées ». Elle ajoute que « une ordonnance ayant désigné un expert peut être rendue commune à des tiers s’il existe un motif légitime qu’ils soient appelés aux opérations d’expertise ». Puis, statuant au dispositif, elle précise encore: « Prorogeons le délai de dépôt du rapport au 06 janvier 2026 » et « Disons que, dans l’hypothèse où la présente décision serait portée à la connaissance de l’expert après le dépôt de son rapport, ses dispositions seront caduques ».

I. Fondement et portée immédiate de l’extension des opérations d’expertise

A. Le critère du motif légitime et la place probable dans le litige
La juridiction s’inscrit dans la lettre de l’article 145 en retenant une exigence de nécessité probatoire encadrée. Elle rappelle que « une ordonnance ayant désigné un expert peut être rendue commune à des tiers s’il existe un motif légitime qu’ils soient appelés aux opérations d’expertise ». Le contrôle porte sur l’utilité de la mesure et sur la vraisemblance de l’implication future des tiers, sans anticiper le fond. L’ordonnance retient, en des termes sobres, que « les pièces versées aux débats caractérisent l’existence d’un motif légitime ». Cette motivation concilie prévention de l’atteinte aux droits des tiers et efficacité probatoire, en évitant toute investigation générale.

B. L’objectif de contradictoire et la neutralité sur le fond du droit
L’extension de l’expertise poursuit un objectif procédural clair, garantir un débat contradictoire complet dès la phase précontentieuse. En ce sens, la communauté des opérations prévient des contestations ultérieures sur l’absence d’implication des intéressés dans les opérations techniques. La formation de référé reste neutre quant au fond et se borne à organiser l’instruction, ce que confirme l’énoncé prudent des motifs. Le juge n’alloue aucune responsabilité, mais prépare la preuve, conformément à l’économie de l’article 145 qui n’autorise pas de préjuger la solution finale.

II. Administration de la mesure et équilibre temporel de l’instruction

A. La prorogation du délai de l’expert au service du contradictoire
La prorogation répond à une nécessité concrète née des mises en cause nouvelles, afin d’assurer l’information utile de l’expert et des parties. La juridiction motive succinctement l’ajustement du calendrier, constatant la nécessité d’absorber les extensions ordonnées. Le dispositif affirme avec clarté: « Prorogeons le délai de dépôt du rapport au 06 janvier 2026 ». Le choix d’une date précise offre une sécurité procédurale et limite le risque de dérive temporelle, tout en permettant la réalisation d’opérations complémentaires si elles s’avèrent indispensables.

B. La clause de caducité et la sécurité des opérations d’expertise
L’économie générale de l’ordonnance se complète par une clause de caducité qui prévient les effets d’une notification tardive. Le dispositif indique: « Disons que, dans l’hypothèse où la présente décision serait portée à la connaissance de l’expert après le dépôt de son rapport, ses dispositions seront caduques ». Cette stipulation préserve la stabilité des opérations déjà accomplies et évite une remise en cause après clôture, sauf à envisager une réouverture selon les voies appropriées. Elle s’articule avec le rappel de l’exécution provisoire, sécurisant l’effectivité de la mesure d’instruction malgré d’éventuelles contestations.

L’ensemble compose une décision mesurée qui met en œuvre l’article 145 sans excéder l’office du juge des référés. Les extraits cités, « s’il existe un motif légitime » et « une ordonnance […] peut être rendue commune à des tiers », illustrent une approche finalisée par l’utilité probatoire. La motivation demeure concise mais suffisante, le contrôle juridictionnel se concentrant sur la réalité du besoin et la cohérence du calendrier d’instruction. L’équilibre obtenu protège le contradictoire, tout en encadrant strictement les effets temporels de la mesure.

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Hassan KOHEN
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