Tribunal judiciaire de Paris, le 19 juin 2025, n°25/03966

Now using node v22.15.1 (npm v10.8.2)
Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2
Codex est déjà installé.
Lancement de Codex…
La décision rendue le 19 juin 2025 par le juge des contentieux de la protection à [Localité 7] tranche un litige locatif né d’un congé pour vendre. La bailleresse a délivré un congé le 14 février 2023 pour le 31 août 2023, la locataire s’est maintenue dans les lieux, puis chacune a formé diverses demandes principales et reconventionnelles. L’instance a porté sur la validité du congé, l’expulsion, l’indemnité d’occupation, d’éventuelles sommes au titre de travaux, des dommages-intérêts pour résistance abusive, la réduction du loyer pour indécence, et la régularisation de charges sous réserve de la prescription.

La procédure a été engagée par assignation du 27 novembre 2024, une audience s’est tenue le 28 avril 2025, et le jugement a été prononcé contradictoirement. La bailleresse sollicitait la validation du congé, l’expulsion et une indemnité d’occupation, puis une astreinte et des régularisations de charges et de travaux, avant un désistement partiel. La locataire ne contestait pas la régularité du congé, mais demandait un délai pour partir, des dommages-intérêts pour insalubrité et une réduction de loyer, ainsi que l’écartement de charges antérieures pour prescription. La question de droit principale portait sur les effets d’un congé pour vendre régulièrement délivré et l’articulation des sanctions et délais. La juridiction a validé le congé, ordonné l’expulsion sans astreinte, fixé une indemnité d’occupation au dernier loyer et charges, refusé tout délai supplémentaire, rejeté les demandes au titre de l’indécence et des travaux, écarté la régularisation de charges faute de preuve et pour partie prescrite, et statué sur l’article 700 et l’exécution provisoire.

I. Les effets d’un congé pour vendre régulier sur la fin du bail et l’occupation postérieure

A. Les exigences légales du congé et l’extinction du titre d’occupation

Le juge rappelle les conditions de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, en citant que « le bailleur peut délivrer un congé pour vendre, six mois au moins avant l’échéance du bail ». Il précise encore qu’« A l’expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d’occupation ». La motivation vérifie la date d’échéance reconduite par tacite reconduction, la délivrance du congé plus de six mois avant son terme, et l’offre de vente conforme avec description et mentions requises.

Le dispositif s’appuie sur l’absence de contestation de la régularité et sur l’offre détaillée, puis énonce que « le congé délivré dans les formes et délais légaux requis […] est bien régulier ». L’enchaînement logique s’impose alors, puisque la locataire n’a pas exercé son droit de préemption dans le délai, ce qui emporte la résiliation par l’effet du congé à la date prévue. La solution est classique et directement arrimée au texte, sans extension prétorienne inutile.

B. Les conséquences de l’occupation sans droit ni titre: expulsion, absence d’astreinte et indemnité

Le juge qualifie la situation postérieure en indiquant que « le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation ». L’expulsion est ordonnée selon le régime des commandements, avec rappel des délais légaux du code des procédures civiles d’exécution. Le refus d’astreinte est justifié par la finalité déjà remplie par l’indemnisation, le prononcé ajoutant que « la condamnation au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation […] satisfait déjà l’objectif assigné à l’astreinte ».

S’agissant du quantum, la juridiction retient une indemnité d’occupation « égale au montant des loyers et charges qui aurait été dû si le bail s’était poursuivi », faute d’éléments probants pour une majoration de charges. La figure retenue, adossée à l’appréciation souveraine, reflète une mesure de réparation du préjudice de jouissance, proportionnée et aisément exécutable.

II. Les demandes reconventionnelles et accessoires: rigueur probatoire et bornes temporelles

A. L’obligation de délivrance et la réduction de loyer: exigence de preuve et cohérence temporelle

Le juge rappelle que l’obligation de délivrer un logement décent « est une obligation de résultat et ne nécessite pas de rapporter la preuve d’une faute du bailleur ». Il encadre cependant le contentieux de l’indécence par la nécessité d’alerter, de solliciter des travaux, puis de rapporter la preuve utile du manquement, à défaut de quoi la réduction judiciaire du loyer ne peut prospérer. Le texte de référence est rappelé dans ses termes: « À défaut de mise en conformité, [le locataire peut] obtenir du juge une réduction du loyer ».

La motivation examine les constats sanitaires et les pièces techniques communiquées, retient l’absence d’arrêté d’insalubrité, la réalisation de travaux par le bailleur, l’insuffisance des justificatifs médicaux, et surtout la carence de lien probant entre désordres allégués, temporalité des diligences et quantum sollicité. Dans ces conditions, la demande indemnitaire de grande ampleur, comme la réduction de loyer, sont rejetées pour défaut de preuve du principe et du montant.

B. Les charges récupérables et la prescription triennale: charge de la preuve et rejet des dommages-intérêts

Le juge rappelle l’article 7-1 de la loi de 1989: « Toutes actions dérivant d’un contrat de bail sont prescrites par trois ans ». Il articule l’entrée en vigueur des modifications avec l’article 2222 du code civil, puis fixe le point utile à trois ans avant l’assignation. Cette borne temporelle gouverne la régularisation des charges, sans priver le bailleur de son droit si la justification est produite et tenue à disposition.

La motivation souligne néanmoins l’insuffisance des pièces justificatives et l’absence de ventilation probante par nature et répartition, de sorte que la demande de régularisation échoue en preuve. La décision réaffirme, en transparence, que les provisions sont « régularisables », mais que leur recouvrement exige des documents complets et vérifiables, ce qui fait ici défaut pour les exercices pertinents.

Sur la résistance abusive, la juridiction rappelle qu’« il est de jurisprudence constante que la faute, même non grossière ou dolosive suffit […] à justifier une condamnation » lorsqu’un préjudice en résulte. Elle écarte toutefois la prétention, faute d’éléments établissant une mauvaise foi caractérisée ou un préjudice distinct de l’occupation. La cohérence se retrouve enfin dans le rappel que « l’exécution provisoire est de droit », ce qui parachève une décision opérationnelle et équilibrée.

Cette décision illustre une application ferme des textes protecteurs de la vente avec congé, tout en rappelant l’exigence probatoire attachée aux demandes de décence, de charges et de dommages-intérêts. Elle confirme la méthode, linéaire et pragmatique, qui ordonne d’abord les effets objectifs du congé, puis encadre, preuves en main, les accessoires du litige.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture