Tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, le 17 juin 2025, n°25/00185

Rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint‑Paul le 17 juin 2025, le jugement tranche la mise en œuvre d’une clause résolutoire d’un bail d’habitation consécutive à des impayés. Le bail a été conclu le 4 mai 2024, moyennant un loyer mensuel avec provisions pour charges, et un commandement de payer a été délivré le 25 novembre 2024. La dette n’ayant pas été apurée dans le délai, une assignation a suivi le 17 mars 2025 aux fins de constater la résiliation de plein droit, d’ordonner l’expulsion et de fixer l’indemnité d’occupation. La préfecture a été informée le 18 mars 2025 et la CCAPEX saisie le 26 novembre 2024, avant l’assignation. Le défendeur n’a pas comparu à l’audience publique du 20 mai 2025.

Le juge rappelle d’abord le cadre du jugement réputé contradictoire en cas de défaut de comparution. Selon l’arrêt, « L’article 472 du code de procédure civile permet au juge, si le défendeur ne comparaît pas, de statuer sur le fond, dans la mesure où il estime la demande régulière, recevable et bien fondée. » L’office du juge porte ensuite sur la vérification des formalités préalables requises par la loi du 6 juillet 1989 et sur les conditions d’acquisition de la clause résolutoire. La question de droit tient à la réunion des conditions légales de résiliation de plein droit et à la portée des mesures accessoires sollicitées. La solution adopte l’acquisition de la clause résolutoire au 27 janvier 2025, ordonne l’expulsion, fixe l’indemnité d’occupation au montant du loyer et des charges et écarte l’astreinte.

I. La mise en œuvre régulière de la clause résolutoire

A. Les formalités préalables et la recevabilité de l’action

Le prononcé de la résiliation suppose la vérification de deux diligences prévues par la loi du 6 juillet 1989. Le juge constate, en premier lieu, que « Une copie des assignations a été notifiée à la préfecture de la Réunion par la voie électronique le 18 mars 2025, soit plus de 6 semaines avant l’audience, conformément aux dispositions de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989. » En second lieu, il relève que « Par ailleurs, le demandeur justifie avoir saisi les services de la CCAPEX le 26 novembre 2024 soit, dans le délai légal, au moins deux mois avant l’assignation. » Ces deux étapes répondent à l’exigence d’information et de prévention des expulsions, et encadrent le recours judiciaire.

Le juge en déduit la recevabilité des demandes en ces termes brefs : « L’action est donc recevable. » Cette appréciation s’accorde avec l’économie de l’article 24, qui conditionne l’instance à la notification préfectorale et à la saisine de la CCAPEX pour les impayés récurrents. La motivation, sobre, insiste sur la stricte antériorité des diligences par rapport à l’audience et à l’assignation. Elle s’inscrit dans une pratique désormais constante des juridictions civiles chargées de ces contentieux.

B. L’acquisition de la clause résolutoire et ses effets

Le cœur du litige tient à l’acquisition de la clause résolutoire au regard du commandement resté infructueux pendant deux mois. Le jugement rappelle le texte applicable : « L’article 24 I de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 prévoit que « toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux ». » La clause, stipulée au bail, renvoyait à ce délai légal et au montant réclamé par le commandement.

Après avoir vérifié l’absence de régularisation et la durée écoulée, le juge retient la date d’acquisition en ces termes : « de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail sont réunies à la date du 27 janvier 2025. » Les effets en découlent mécaniquement, avec l’ordonnance d’expulsion et la fixation de l’indemnité d’occupation au montant du loyer et des charges. La détermination prorata temporis jusqu’à l’audience et la poursuite mensuelle jusqu’à la restitution des clés traduisent une réparation mesurée du préjudice d’occupation.

II. L’encadrement des mesures accessoires et la proportionnalité

A. L’astreinte écartée et le sort des meubles

La demande d’astreinte attachée à l’expulsion est rejetée au regard des instruments d’exécution et de la logique indemnitaire. Le jugement souligne que l’exécution forcée et l’indemnité d’occupation suffisent à assurer l’effectivité de la décision, au sens du code des procédures civiles d’exécution. La motivation se conclut sans détour : « Ils seront donc donc déboutés de leur demande de ce chef. » L’office du juge préserve ainsi la proportionnalité de la contrainte et évite une double sanction financière.

Le sort des biens éventuellement laissés dans les lieux ne donne pas lieu à décision présente, faute d’éléments concrets. Le juge retient, de manière prudente, que « Il n’y a pas lieu à statuer sur la demande tendant à l’enlèvement des biens laissés dans le logement aux frais et risques du défendeur et que les demandeurs seront libres d’en disposer, eu égard à l’aspect purement hypothétique de cette demande. » Cette réserve respecte le principe dispositif et renvoie, en tant que de besoin, aux voies d’exécution appropriées.

B. Délais, intérêts, frais et exécution provisoire

L’octroi de délais de paiement n’est pas envisageable faute de reprise des loyers avant l’audience, condition légale désormais explicite. Le jugement l’énonce sèchement en raison de la non‑comparution : « Absent à l’audience, le demandeur n’a sollicité par définition aucun délai de paiement. » La référence à la reprise préalable du paiement, rappelée dans les motifs, fonde le refus de tout étalement. La modulation des intérêts confirme l’attention portée à la juste mesure des accessoires de la dette.

Le juge réduit aussi la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, par une motivation d’équité. Il précise que « Il n’apparaît pas équitable de laisser à la charge des demandeurs les frais irrépétibles par eux engagés afin de faire valoir leurs droits en justice, mais il convient de ramener la somme réclamée et non justifiée à de plus justes proportions. » S’agissant des intérêts, la décision tranche avec concision : « Les demandeurs seront déboutés du surplus de leur demande au titre des intérêts. » Enfin, l’autorité du dispositif se trouve renforcée par l’exécution provisoire de droit, expressément affirmée : « Le jugement est de plein droit exécutoire par provision, frais irrépétibles et dépens compris. » L’ensemble dessine une solution cohérente, soucieuse d’efficacité sans excès de contrainte.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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