Tribunal judiciaire de Saint Etienne, le 17 juin 2025, n°25/00820

Par un jugement du 17 juin 2025, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint‑Étienne tranche une action en paiement intentée par une caution subrogée. Les locataires n’ont pas comparu, tandis que le bailleur initial avait été désintéressé par la garantie Visale, puis remplacé par subrogation.

Un bail d’habitation non meublé, conclu en février 2024, prévoyait un loyer de 560 euros et 90 euros de provisions sur charges. À la suite d’impayés, la caution a réglé les arriérés et obtenu une quittance subrogative, avant de délivrer un commandement de payer en septembre 2024. L’assignation de janvier 2025 tendait, notamment, à la constatation d’une clause résolutoire, à l’expulsion et à la condamnation solidaire au paiement. À l’audience de mai 2025, la caution s’est désistée des demandes de résiliation et d’expulsion, ne maintenant que le recouvrement d’un arriéré actualisé à 4 550 euros.

La question posée était celle de l’étendue des droits d’une caution Visale subrogée, en l’absence des défendeurs et sans saisine préalable de la CCAPEX. Le juge a accueilli l’action en paiement et retenu la subrogation sur le fondement de l’article 2309 du code civil. Les intérêts courent au taux légal à compter du jugement; l’indemnité de l’article 700 est refusée, les dépens étant mis in solidum à la charge des débiteurs.

I. L’admission de l’action subrogatoire en paiement

A. L’office du juge en cas de défaut de comparution

Le juge rappelle d’abord l’article 472 du code de procédure civile, selon lequel « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ». Il ajoute que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ». Constatant l’absence des défendeurs, la juridiction précise encore: « En l’espèce, il convient de faire application de l’article précité en raison de l’absence des défendeurs ». L’office du juge se concentre ainsi sur la régularité et le bien‑fondé des prétentions, contrôle que la suite de la motivation met effectivement en œuvre. Ce cadre processuel posé, la décision examine ensuite le titre subrogatoire et l’obligation locative invoqués.

B. La preuve et l’étendue des droits subrogés

La juridiction vise l’article 2309 du code civil, qui énonce que « la caution qui a payé tout ou partie de la dette est subrogée dans les droits qu’avait le créancier contre le débiteur ». Elle rappelle encore l’économie du dispositif Visale tel que stipulé au contrat, selon lequel « la Caution, sera subrogée au Bailleur dans tous ses droits et actions sur les sommes versées par elle ». Le contrat précise enfin: « La subrogation permettra à la Caution d’agir en recouvrement des sommes versées, en constatation de l’acquisition de la clause résolutoire et/ou en résiliation judiciaire du bail, ainsi qu’en fixation de l’indemnité d’occupation ». S’agissant de l’obligation principale, le juge rappelle que « le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables au terme convenu ». La production d’une quittance subrogative, arrêtant l’arriéré à 4 550 euros, emporte preuve du paiement par la caution et, partant, de la subrogation opposable aux débiteurs. Le juge prononce en conséquence la condamnation solidaire, « outre intérêts au taux légal à compter du jour du présent jugement ». Reste à apprécier la valeur et la portée d’une solution recentrée sur le seul recouvrement subrogatoire.

II. Valeur et portée de la solution

A. CCAPEX et cantonnement au seul recouvrement

La décision mentionne l’absence de saisine de la CCAPEX et de notification à la caisse d’allocations familiales, sans en tirer de sanction procédurale. Ce choix s’explique par le désistement sur la résiliation et l’expulsion, le juge indiquant qu’« il n’y a pas lieu de statuer sur celles‑ci ». L’action se cantonne au paiement des sommes avancées, objet propre de la subrogation, sans conditionner le recouvrement à des diligences préalables liées à l’expulsion. Cette approche est conforme à la finalité de Visale, qui organise un recours subrogatoire autonome lorsque la caution a désintéressé le bailleur. Le libellé de la condamnation mentionne des « indemnités d’occupation » sans résiliation judiciairement constatée, signe d’une reprise de la quittance subrogative plus que d’un fondement distinct. Se posent toutefois des questions d’assiette et de temporel de la condamnation, que la décision tranche de manière nuancée.

B. Intérêts, dépens et exécution provisoire

S’agissant des intérêts, le point de départ est fixé au jour du jugement, alors que l’assignation sollicitait des dates antérieures distinctes. Une telle solution s’explique par la nécessité de liquider précisément la créance subrogée, arrêtée par quittance, avant de faire courir les accessoires. Le refus d’allouer une indemnité sur le fondement de l’article 700 est motivé par l’équité, le juge retenant que « l’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile ». Les dépens sont supportés in solidum par les débiteurs, conformément au principe de l’article 696, la décision prévoyant l’inclusion des coûts d’actes. Enfin, l’effectivité du recouvrement est renforcée, la juridiction énonçant que « la présente décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire ». La combinaison de ces éléments circonscrit une solution pragmatique, protectrice du bailleur désintéressé par la caution, sans aggraver inutilement la charge des débiteurs défaillants.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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