Tribunal judiciaire de Sarreguemines, le 5 septembre 2025, n°24/01023

Rendu par le juge aux affaires familiales de Sarreguemines le 5 septembre 2025, ce jugement prononce le divorce pour altération définitive du lien conjugal et règle les mesures accessoires. L’affaire oppose des époux mariés en 2013, parents de trois enfants, séparés depuis janvier 2024 selon des déclarations concordantes.

L’assignation a été délivrée sans indication initiale de fondement, puis une ordonnance provisoire de novembre 2024 a fixé la résidence des enfants chez la mère et suspendu la contribution paternelle, en raison d’une situation financière précaire. Devant le juge, chacun a demandé le divorce sur le fondement des articles 237 et 238, la mère sollicitant une pension et un droit de visite médiatisé, le père requérant la dispense de contribution jusqu’à meilleure fortune.

La question portait d’abord sur l’articulation entre l’article 238, alinéa 2, et l’article 1126-1 du code de procédure civile, s’agissant de l’appréciation du délai d’un an lorsque la demande a été introduite sans motifs. Elle concernait ensuite les conditions d’un droit de visite médiatisé et celles d’une dispense de contribution au regard de l’article 371-2.

Le juge retient l’altération définitive du lien conjugal en constatant une séparation d’au moins un an au jour du prononcé, fixe les effets patrimoniaux à la cessation de la cohabitation au 1er janvier 2024, ordonne un droit de visite médiatisé temporaire et dispense le père de contribution jusqu’à retour à meilleure fortune. La répartition des dépens est partagée, en considération du caractère familial du litige.

I. Le prononcé du divorce pour altération et ses effets temporels

A. Appréciation du délai d’un an au jour du jugement

Lorsque la demande initiale n’indique pas de motifs, l’article 238 impose d’apprécier le délai d’un an au prononcé, sous le contrôle de l’article 1126-1 du code de procédure civile. Le juge adopte fidèlement cette grille en relevant que « le délai caractérisant l’altération définitive du lien conjugal sera apprécié au jour du prononcé du divorce ». Il en déduit, après examen des éléments admis par les époux, que « au jour du prononcé du divorce, le 4 septembre 2025, le délai d’un an de séparation requis étant caractérisé, la cessation de la communauté de vie entre les époux est établie ». La solution traduit une lecture rigoureuse du texte, qui sécurise la preuve de la séparation au moment décisif et évite des débats probatoires sur la date d’introduction.

La motivation s’inscrit dans la logique de neutralité de l’article 238, qui détache la preuve du délai de la demande initiale lorsque celle-ci est non motivée. Elle évite ainsi de transformer l’assignation en enjeu stratégique sur le calendrier, tout en rappelant que l’altération se déduit d’une cessation durable de la communauté de vie.

B. Fixation des effets à la cessation de la cohabitation

L’article 262-1 permet, à la demande d’un époux, de fixer les effets du divorce à la date de la cessation de la cohabitation et de la collaboration. Le juge retient la date alléguée et non contestée par les deux époux, en énonçant que « la date des effets du divorce sera fixée au 1er janvier 2024 ». Cette solution respecte l’économie du texte, qui vise à refléter la réalité patrimoniale du couple lorsqu’une séparation de fait avérée a précédé la décision.

Le choix de cette date ne rompt pas l’équilibre des intérêts, dès lors que la séparation est acquise et durable. Il assure une cohérence entre la cause du divorce, appréciée au prononcé, et ses effets patrimoniaux, rattachés à la fin de la vie commune, ce qui limite les distorsions dans la liquidation.

II. Les mesures relatives aux enfants et à la charge d’entretien

A. Encadrement médiatisé des relations personnelles

Le juge statue en considération de l’intérêt des enfants, éclairé par l’article 373-2-11, et veille au maintien des liens avec l’autre parent. Il constate l’accord des parents sur la résidence chez la mère et le confirme, dans la continuité des mesures provisoires. S’agissant des rencontres, il relève qu’« en l’absence d’élément nouveau et au regard de l’accord des parties, conforme à l’intérêt des enfants, il conviendra d’octroyer au père un droit de visite médiatisé ». L’option de la médiation temporaire concilie la continuité des liens et la nécessaire sécurisation du cadre relationnel, dans un contexte exigeant une reprise progressive.

Cette solution se situe à mi-chemin entre un droit ordinaire et une restriction grave. Elle préserve la finalité de l’article 373-2, qui commande le maintien des relations personnelles, tout en organisant un accompagnement adapté. La limitation temporelle décidée favorise une réévaluation ultérieure, en fonction des rapports établis par la structure, ce qui renforce la proportionnalité de la mesure.

B. Dispense de contribution pour impécuniosité avérée

L’article 371-2 impose une contribution proportionnée aux ressources de chacun et aux besoins de l’enfant. Le juge vérifie l’absence d’évolution significative depuis les mesures provisoires et constate une ressource minimale du parent débiteur. Il tranche alors en ces termes: « il conviendra de constater l’impécuniosité […] et de le décharger de toute contribution à l’entretien et l’éducation des enfants ». La formule « jusqu’à retour à une meilleure situation » consacre une dispense provisoire, cohérente avec le principe de proportionnalité et la possible révision.

Cette orientation n’ignore pas l’exigence de prise en charge des besoins des enfants. Elle traduit un équilibre fondé sur les capacités contributives réelles, sans exclure une reprise ultérieure lorsque les ressources évolueront. La mention de l’autorité de la chose jugée et de l’exigence d’un élément nouveau pour toute modification future clarifie enfin le cadre procédural des réévaluations.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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