Tribunal judiciaire de Strasbourg, le 11 septembre 2025, n°25/00331

Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Strasbourg, ordonnance du 11 septembre 2025, rendue en référé dans un litige locatif d’habitation. Le bail conclu en 2018 a généré des impayés, suivis d’un commandement de payer visant une clause résolutoire et d’une assignation. La défenderesse, régulièrement citée, n’a pas comparu, tandis qu’un diagnostic social et financier était versé et lu à l’audience. Le demandeur sollicitait la constatation de la résiliation de plein droit, l’expulsion, le paiement des arriérés, et une indemnité d’occupation. La question portait sur l’articulation entre clause résolutoire acquise, office du juge des référés, et octroi de délais non suspensifs après reprise du loyer courant. Le juge rappelle d’abord que « Selon l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ». Il retient ensuite l’acquisition de la clause résolutoire, puis accorde des délais de paiement sans suspendre leurs effets, faute de demande expresse.

I. Le référé et l’acquisition de la clause résolutoire

A. Recevabilité et cadre procédural

Le juge vérifie d’abord la recevabilité au regard de la loi de 1989 et constate le respect des formalités préalables par le bailleur. « Les conditions de recevabilité édictées par l’article 24 II et III de la loi du 6 juillet 1989 ont été respectées par le bailleur ». La procédure se déroule en l’absence de la défenderesse, ce qui n’empêche pas le juge de statuer sur le fond en application de l’article 472. « Selon l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ». L’office du juge des référés est également rappelé par la référence à l’article 835, conditionnant l’allocation d’une provision à une obligation non sérieusement contestable. « Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ». Le juge en déduit que « La demande est donc régulière et recevable ».

B. Réalisation de la clause et conséquences

La clause résolutoire stipulée au bail était déclenchée par un commandement de payer demeuré infructueux pendant deux mois, condition ici remplie. « La défenderesse n’ayant pas réglé les sommes visées au commandement dans le délai de deux mois, il y a lieu de constater la résiliation de plein droit du bail à compter du 29/01/2025 ». Le juge tire les conséquences classiques de cette résiliation, à savoir la perte du titre d’occupation, l’indemnité d’occupation et l’expulsion dans les formes légales. L’allocation d’une somme provisionnelle au titre des arriérés procède alors d’une créance établie et non contestée, parfaitement compatible avec l’office du référé.

II. Les délais non suspensifs et leur portée

A. Conditions légales d’octroi

Le dispositif retient les nouveaux critères de l’article 24 V, issus de 2023, subordonnant l’échéancier à la reprise du loyer courant et à une capacité de règlement. « Aux termes des dispositions de l’article 24 V de la loi du 6 juillet 1989, modifiée par la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d’office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu’il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative ». Le juge constate la reprise intégrale du loyer courant et une ressource sociale, puis fixe un échéancier de trente‑six mensualités avec clause d’exigibilité anticipée. L’adhésion du bailleur, signalée à l’audience, conforte la proportionnalité de l’effort demandé et la faisabilité économique au regard des charges familiales.

B. Un échéancier sans suspension

La décision refuse toutefois la suspension des effets de la résiliation, faute de saisine en ce sens par l’une des parties au débat. « En l’absence de demande formée en ce sens, il n’y a pas lieu de statuer sur la suspension des effets de la clause résolutoire insérée au bail ». Ce choix respecte l’économie du texte, qui réserve la suspension à une demande expresse, et distingue clairement l’échéancier, simple modalité d’exécution de la dette. La résiliation demeurant acquise, l’occupation devient précaire, l’indemnité remplace le loyer, et le maintien dans les lieux dépend d’abord du calendrier des mesures d’exécution. La transmission préfectorale, ordonnée conformément à l’article R 412‑2, précise enfin la dimension sociale de l’expulsion et l’articulation avec l’intervention administrative. La solution concilie ainsi sécurité contractuelle et accompagnement, mais laisse, sans suspension, la protection du logement à la merci d’un incident de paiement isolé.

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