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Par jugement du 13 juin 2025, le tribunal de proximité de Schiltigheim a été saisi d’une demande de suspension des obligations contractuelles afférentes à deux prêts immobiliers et un prêt personnel. Les emprunteurs invoquaient une chute de revenus liée à une reprise d’activité et produisaient pièces comptables et familiales. La partie défenderesse, régulièrement convoquée, n’a pas comparu. Le litige portait sur l’octroi d’un délai de grâce au titre de l’article L314-20 du code de la consommation, renvoyant aux critères de l’article 1343-5 du code civil, et sur l’étendue des mesures susceptibles d’en résulter, notamment quant aux intérêts et aux primes d’assurance. Le tribunal a accueilli la demande pour vingt-quatre mois, a rappelé l’exclusion des primes d’assurance et a laissé les dépens aux bénéficiaires du délai.
La question posée était double. D’une part, déterminer si la situation économique présentée « compte tenu de la situation du débiteur » justifiait un report « dans la limite de deux années » des « sommes dues » au sens de l’article 1343-5 du code civil. D’autre part, préciser l’assiette des mesures prononcées au regard de l’article L314-20 du code de la consommation, lequel admet que « durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt », tout en ouvrant au juge la faculté d’organiser les modalités de reprise des paiements.
I. Le sens de la décision
A. Les conditions d’octroi du délai de grâce
Le tribunal statue au fond malgré la non-comparution dès lors que, selon l’article 472 du code de procédure civile, « il est néanmoins statué sur le fond », sous réserve d’une demande « régulière, recevable et bien fondée ». L’examen se concentre donc sur l’existence d’une difficulté financière caractérisée, appréciée concrètement au vu des pièces produites.
Le raisonnement s’adosse à l’article 1343-5, dont il fait une application littérale et mesurée. Il rappelle que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues ». La motivation retient des revenus en berne, l’absence de rémunération de l’un des emprunteurs depuis plusieurs mois, l’existence de charges familiales et des arriérés auprès de plusieurs créanciers. Ces éléments objectivent un déséquilibre temporaire, sans remise en cause de la dette, condition cardinale du délai de grâce.
La durée retenue de vingt-quatre mois s’inscrit dans le plafond légal. Elle traduit l’appréciation d’une difficulté non passagère, mais apte à résorption progressive. Le défaut de prétentions adverses ne dispense pas d’un contrôle de proportionnalité, lequel demeure perceptible dans la sélection des pièces pertinentes et la modulation temporelle.
B. L’étendue et les effets des mesures prononcées
Le tribunal articule utilement l’article L314-20 du code de la consommation, qui autorise la suspension de l’« exécution des obligations du débiteur », avec la règle de neutralisation des intérêts. Il souligne que « l’ordonnance peut décider que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt », et que le juge peut déterminer « les modalités de paiement des sommes qui seront exigibles au terme du délai ». La suspension vise ici capital, intérêts et frais, pour chacun des prêts listés, ce qui répond à l’objectif d’efficacité du réaménagement.
Le jugement précise, en revanche, la frontière contractuelle avec l’assurance emprunteur. Il « rappelle que ce délai de grâce n’est pas applicable au remboursement des primes d’assurances », solution conforme à la nature autonome du contrat d’assurance et à la finalité de couverture du risque. La continuité du paiement des primes maintient la garantie, ce qui protège les deux parties sans détourner l’objet du délai de grâce.
La décision constate enfin l’exécution provisoire de droit. Elle se réfère à l’article 514 du code de procédure civile selon lequel « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire », ce qui assure l’effectivité immédiate de la mesure, élément décisif en matière de prévention de l’aggravation des impayés.
II. La valeur et la portée
A. Une motivation équilibrée au regard du droit positif
La solution concilie l’objectif de sauvegarde du débiteur temporairement défaillant avec l’exigence de sécurité du créancier. Le visa croisé des articles L314-20 et 1343-5 en fournit le cadre. Le contrôle des pièces établissant la réalité d’une « situation obérée » évite l’automaticité, tandis que la durée maximale marque la réserve nécessaire. En ce sens, l’option de suspendre capital, intérêts et frais, tout en préservant les primes d’assurance, traduit un équilibre normatif cohérent.
L’absence de comparution adverse n’entraîne pas une faveur irrationnelle. Le juge rappelle le filtre de l’article 472 et motive l’ajustement par indicateurs économiques précis. La mention expresse de la neutralisation possible des intérêts, prévue par L314-20, cadre la portée financière de la suspension sans porter atteinte à l’intégrité de la créance. La charge des dépens supportée par les bénéficiaires du délai souligne, enfin, que l’allègement porte sur l’exécution, non sur la responsabilité procédurale.
B. Des enseignements utiles pour la pratique des réaménagements judiciaires
La clarification de l’assiette du délai de grâce, incluant capital, intérêts et frais, conforte l’usage d’un instrument de stabilisation des situations fragiles avant contentieux plus lourd. La dissociation avec l’assurance emprunteur sécurise la continuité de la couverture et limite les effets collatéraux d’un incident de paiement. Elle éclaire les négociations amiables en fixant une borne claire entre obligations principales et accessoires de garantie.
La référence à la faculté d’ordonner que « durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt » confirme l’outil de prévention de l’aggravation de la dette par capitalisation. La perspective de déterminer, au terme, « les modalités de paiement » ouvre un espace d’adaptation graduée, éventuellement différée, conforme au texte. L’exécution provisoire de droit assure l’impact immédiat de la mesure et limite les risques de déchéance du terme ou de procédures parallèles, tout en laissant subsister, le cas échéant, le contrôle ultérieur par les voies de recours.
Ainsi se dessine une jurisprudence de gestion ordonnée de la difficulté ponctuelle, respectueuse des limites légales et attentive à l’effectivité. Elle rappelle que le délai de grâce est un instrument de respiration contractuelle, non une remise de dette, et qu’il doit rester rigoureusement arrimé aux critères textuels et aux pièces établissant la réalité de la contrainte économique.