Tribunal judiciaire de Toulouse, le 16 juin 2025, n°25/00264

La renonciation volontaire à l’instance constitue un mécanisme procédural permettant à une partie de mettre fin au litige qu’elle a elle-même initié. Le tribunal judiciaire de Toulouse, par une décision du 16 juin 2025, illustre cette faculté offerte au demandeur et ses implications quant à l’extinction du lien d’instance.

Une société commerciale a assigné un particulier devant le tribunal judiciaire de Toulouse par acte introductif du 16 janvier 2025, reçu par la juridiction le 21 janvier suivant. La nature exacte du litige n’apparaît pas dans la décision. À l’audience du 16 juin 2025, la société demanderesse a expressément déclaré se désister de sa demande, manifestant ainsi sa volonté de mettre fin tant à l’instance qu’à son action. Le défendeur, non comparant et non représenté, n’a pas formulé d’opposition.

La juridiction devait déterminer si les conditions du désistement étaient réunies et quelles conséquences en tirer sur le plan procédural.

Le tribunal constate le désistement d’instance et d’action, prononce l’extinction de l’instance et laisse la charge des dépens à la société demanderesse, sauf meilleur accord des parties.

Cette décision invite à examiner successivement les conditions de validité du désistement (I) puis ses effets sur la procédure et les droits des parties (II).

I. Les conditions de validité du désistement

A. La manifestation expresse de la volonté du demandeur

Le désistement procède d’un acte unilatéral par lequel le demandeur renonce à poursuivre la procédure engagée. L’article 394 du code de procédure civile dispose que « le demandeur peut, en toute matière, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance ». Cette faculté appartient exclusivement à celui qui a pris l’initiative du procès.

En l’espèce, le tribunal relève que « la demanderesse a déclaré expressément se désister de sa demande en vue de mettre fin à l’instance ainsi qu’à son action ». Cette formulation révèle une double renonciation. La société abandonne non seulement l’instance en cours mais également son droit d’agir au fond. Le désistement d’action, plus radical que le simple désistement d’instance, emporte renonciation définitive à faire valoir le droit substantiel invoqué.

La déclaration expresse à l’audience garantit la réalité du consentement. Le juge peut ainsi constater sans ambiguïté la volonté du demandeur de renoncer à ses prétentions.

B. L’acceptation implicite par le défendeur

L’article 395 du code de procédure civile subordonne en principe la perfection du désistement à l’acceptation du défendeur lorsque celui-ci a présenté une défense au fond ou une fin de non-recevoir. Cette exigence protège le défendeur qui pourrait avoir intérêt à obtenir une décision sur le fond.

Le tribunal constate que « le défendeur a implicitement accepté ce désistement de par son absence ». L’absence de comparution et de représentation du défendeur vaut acquiescement tacite à la renonciation du demandeur. Cette solution s’explique par l’absence de toute défense formulée par le défendeur, lequel n’avait manifesté aucun intérêt à la poursuite de l’instance.

Le mécanisme de l’acceptation implicite simplifie considérablement le constat du désistement. Il dispense le juge de rechercher un accord exprès lorsque le comportement du défendeur traduit son indifférence au sort de la procédure.

II. Les effets du désistement sur la procédure et les droits des parties

A. L’extinction définitive de l’instance et de l’action

Le désistement produit des effets distincts selon qu’il porte sur l’instance seule ou également sur l’action. Le désistement d’instance, prévu à l’article 385 du code de procédure civile, « emporte, sauf convention contraire, soumission de payer les frais de l’instance éteinte ». Il laisse subsister le droit d’agir et autorise le demandeur à introduire ultérieurement une nouvelle instance.

La présente décision constate un désistement portant à la fois sur l’instance et sur l’action. Le tribunal « dit qu’il met fin à l’instance inscrite au répertoire général ». L’extinction de l’instance dessaisit la juridiction et clôt définitivement la procédure engagée.

Le désistement d’action emporte des conséquences plus graves. La société demanderesse renonce définitivement à invoquer le droit qu’elle prétendait faire valoir. Elle ne pourra plus introduire de nouvelle demande fondée sur les mêmes moyens contre le même défendeur. Cette renonciation s’analyse comme un abandon du droit substantiel lui-même.

B. La charge des dépens et la réserve conventionnelle

L’article 399 du code de procédure civile dispose que le désistant supporte les frais de l’instance éteinte. Cette règle traduit l’idée que celui qui renonce à son action doit assumer les conséquences financières de l’initiative processuelle qu’il a prise.

Le tribunal applique ce principe en décidant que « la S.A.S. conservera la charge des dépens de l’instance éteinte sauf meilleur accord des parties ». La formule « sauf meilleur accord » préserve la liberté contractuelle des parties. Celles-ci demeurent libres de convenir d’une répartition différente des frais.

Cette réserve manifeste le caractère supplétif de la règle de répartition des dépens. Elle permet aux parties de négocier une solution transactionnelle globale incluant la question des frais. Le tribunal, tout en appliquant la règle légale, ménage ainsi la possibilité d’un arrangement amiable ultérieur entre les parties.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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