Tribunal judiciaire de Valence, le 19 juin 2025, n°25/00162

La décision du juge des contentieux de la protection de Valence, 19 juin 2025, statue sur une demande en acquisition de clause résolutoire, expulsion et condamnations pécuniaires. Le bail d’habitation conclu en juin 2023 a généré des impayés, suivis d’un commandement visant la clause résolutoire délivré le 17 décembre 2024, puis d’une assignation du 3 mars 2025. Un diagnostic social et financier a été versé, et les locataires ont sollicité des délais et la suspension des effets de la clause, proposition acceptée par le bailleur.

La procédure a respecté les diligences préalables: information du représentant de l’État plus de six semaines avant l’audience, et saisine de la commission de prévention des expulsions deux mois au moins avant l’assignation. À l’audience, la dette, ramenée à 3 210,39 euros, n’a pas été contestée. La juridiction constate l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 18 février 2025, tout en suspendant ses effets sous réserve du respect d’un échéancier sur trente-trois mois, à hauteur de 100 euros mensuels en sus du loyer courant.

La question de droit portait sur les conditions de recevabilité posées par l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, sur la réunion des conditions de la clause résolutoire après un commandement demeuré infructueux, et sur l’office du juge en matière de délais et de suspension des effets de la clause. La juridiction retient la recevabilité, constate l’acquisition, accorde des délais et suspend les effets, en rappelant la réactivation automatique en cas de défaut.

I. Le sens de la décision

A. La vérification méthodique des conditions de recevabilité

La juridiction rappelle d’abord les exigences de l’article 24 II et III de la loi du 6 juillet 1989, relatives à l’information du préfet et à la saisine de la commission départementale. Elle constate l’accomplissement des deux démarches dans les délais légaux, et scelle l’étape procédurale par la formule: « L’action est donc recevable. » L’économie de moyens rédactionnels épouse ici la rigueur du formalisme préventif voulu par le législateur.

Ce contrôle préalable structure la suite du raisonnement, puisqu’il conditionne la possibilité de statuer au fond sur l’acquisition de la clause. La lecture combinée des textes mobilisés et des pièces produites préserve la finalité de prévention des expulsions, tout en ménageant le droit d’agir du bailleur.

B. L’acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences immédiates

Le juge applique ensuite l’article 24 I en retenant la réunion des conditions à l’issue du délai de deux mois suivant le commandement. Il énonce: « Ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire […] étaient réunies à la date du 18 février 2025. »

Ce constat emporte un double effet. D’une part, la qualité d’occupants sans droit ni titre est affirmée à compter de cette date, justifiant l’indemnité d’occupation d’un montant égal au loyer et aux charges. D’autre part, les condamnations pécuniaires suivent, avec intérêts au taux légal, conformément à l’économie du bail d’habitation et à la finalité de réparation.

II. La valeur et la portée de la solution retenue

A. La suspension des effets de la clause et l’office du juge

Le juge se place dans le cadre des articles 24 V et VII, en appréciant la situation des locataires au regard de leur capacité de paiement et de la reprise du flux courant. La décision valorise l’accord intervenu en audience, tout en exerçant son office propre d’aménagement des délais. Elle précise: « Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause résolutoire seront suspendus. »

L’économie du dispositif consacre la clause « curable » par exécution ultérieure, selon la formule désormais classique: « Si les locataires se libèrent dans le délai et selon les modalités fixées, la clause résolutoire sera réputée ne pas avoir joué et le bail ne sera pas résilié. » La solution ménage l’équilibre entre la sanction de l’inexécution et la prévention des expulsions, en conditionnant la pérennité du bail à une discipline de paiement strictement encadrée.

B. Les incidences pratiques: discipline de paiement, dépens et exécution

La décision articule fermeté et pragmatisme en prévoyant la « reprise immédiate » des effets de la clause au premier incident, déclenchant résiliation, expulsion, et indemnité d’occupation jusqu’à restitution des lieux. Cette mécanique de réactivation aligne l’incitation au respect de l’échéancier avec la sécurité juridique du bail.

S’agissant des dépens, l’inclusion du commandement de payer dans la charge des parties succombantes s’inscrit dans le régime des frais légalement requis, en cohérence avec l’office d’une mesure préalable à la clause. Le rappel de l’« exécution provisoire de droit » s’accompagne d’une mise en garde: « En l’espèce, l’exécution provisoire n’étant pas incompatible avec la nature de l’affaire, il n’y a pas lieu de l’écarter. » L’ordonnancement des voies d’exécution demeure donc immédiat, sous la réserve classique des risques et périls du créancier.

La solution, enfin, s’inscrit dans une logique préventive renforcée par la transmission administrative prévue, tout en réaffirmant la centralité de l’article 24 comme pivot d’un traitement gradué des impayés locatifs. Elle confirme la possibilité d’un rétablissement contractuel sous contrôle, sans altérer la force de la clause ni l’exigibilité corrélative des termes courants.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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