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Par un jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 13 juin 2025, le juge des contentieux de la protection a statué sur une action en paiement née d’un crédit à la consommation. Un prêt personnel de 9 213,43 euros, au taux débiteur de 4,81 %, avait été consenti pour soixante mensualités. Des impayés sont intervenus, puis une mise en demeure a précédé la résiliation et la déchéance du terme. Le prêteur a assigné le 25 septembre 2024. Le défendeur, régulièrement avisé, n’a pas comparu.
La demande visait la constatation de la déchéance du terme, subsidiairement la résiliation judiciaire, la condamnation au paiement du solde avec intérêts conventionnels, la capitalisation, ainsi qu’une indemnité de procédure. Le juge rappelle d’emblée qu’« il est néanmoins statué sur le fond » en cas de défaut, et qu’il ne fait droit à la demande que si elle est « régulière, recevable et bien fondée ». Il se reconnaît l’office d’appliquer d’office le droit de la consommation, conformément à l’article R. 632-1, selon lequel « le juge peut soulever d’office toutes les dispositions de ce code ». La question juridique portait, d’une part, sur la recevabilité de l’action au regard de la forclusion biennale et l’exigibilité du solde après déchéance du terme, d’autre part, sur la sanction du manquement à l’évaluation préalable de solvabilité et ses effets sur les sommes dues et les accessoires.
Le tribunal déclare l’action recevable en retenant que le premier incident non régularisé remonte au 10 janvier 2023 et que l’assignation du 25 septembre 2024 est intervenue dans le délai. Il admet l’exigibilité du capital après déchéance du terme, mais prononce la déchéance du droit aux intérêts à compter de la conclusion du contrat, faute de vérification de solvabilité par « un nombre suffisant d’informations ». Le défendeur est condamné à payer 7 441,54 euros, avec intérêts au taux légal non majoré à compter de l’assignation. La capitalisation est rejetée au regard de l’article L. 312-38. L’indemnité de procédure est refusée et les dépens mis à la charge du défendeur.
I – Le contrôle de la recevabilité et de l’exigibilité
A – La forclusion biennale et l’office du juge
Le juge retient la recevabilité au regard de l’article R. 312-35, en rappelant que le délai court « à compter du premier incident de paiement non régularisé ». La pièce comptable mentionnant le 10 janvier 2023 comme premier impayé non régularisé fonde l’analyse. L’assignation du 25 septembre 2024 interrompt la forclusion dans les deux ans. L’articulation avec les règles d’imputation des paiements demeure classique et n’appelle pas de débat particulier au vu des données produites.
Ce contrôle est précédé de l’affirmation de l’office du juge en matière de consommation. L’énoncé « le juge peut soulever d’office toutes les dispositions de ce code » assoit la vérification autonome de la régularité d’ordre public. La démarche s’inscrit dans la jurisprudence constante, qui exige un examen effectif, même en cas de défaut. L’économie du litige en est clarifiée.
B – La déchéance du terme et l’exigibilité du capital
Le tribunal rappelle qu’« en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés » (art. L. 312-39). Il vérifie la clause résolutoire et la mise en demeure au regard des articles 1224 et 1225 du code civil, en soulignant l’exigence d’un avertissement préalable clair. Les pièces révèlent l’arrêt des paiements, une demande de règlement en juillet 2023, puis la résiliation de plein droit.
La conséquence est l’exigibilité du capital, sous contrôle du quantum. Le juge récapitule le capital d’origine, les versements antérieurs et postérieurs à la déchéance du terme, et arrête le solde à 7 441,54 euros, sous réserve des paiements ultérieurs. Cette méthode, transparente, est cohérente avec l’article L. 341-8, qui gouvernera immédiatement les accessoires.
II – La sanction du défaut d’évaluation et ses effets financiers
A – La déchéance du droit aux intérêts et l’exigence probatoire
Le cœur du jugement porte sur l’article L. 312-16, selon lequel « avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations ». Le juge souligne que « de simples déclarations non étayées faites par un consommateur ne peuvent, en elles-mêmes, être qualifiées de suffisantes si elles ne sont pas accompagnées de pièces justificatives » (CJUE, 18 déc. 2014, C‑449/13, § 37). La production d’une fiche de dialogue et d’un bulletin de salaire d’avril 2019, pour un contrat conclu en avril 2022, ne satisfait pas à l’exigence temporelle et qualitative.
En conséquence, le tribunal prononce la déchéance du droit aux intérêts à compter de la conclusion. La base normative est l’article L. 341-2, qui attache la sanction au manquement. La solution, fréquente, manifeste une conception exigeante de la vérification de solvabilité, étroitement appuyée sur la directive 2008/48 et la jurisprudence européenne. Elle renforce la diligence attendue, sans excès formaliste.
B – Les conséquences sur les accessoires: taux légal non majoré, absence d’anatocisme
L’article L. 341-8 est rappelé en des termes nets: « en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu ». Le juge en déduit l’imputation des intérêts perçus sur le capital et l’exclusion des indemnités prévues par les articles L. 312-39 et D. 312-16. Il ajoute que « aucune indemnité ni aucun frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur en cas de défaillance » (art. L. 312-38), ce qui interdit la capitalisation au sens de l’article 1343-2 du code civil.
S’agissant des intérêts moratoires, le juge écarte la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier « afin d’assurer l’effet utile de la directive 2008/48/CE ». L’alignement sur l’arrêt CJUE du 27 mars 2014 (C‑565/12) garantit un caractère « effectif et dissuasif » à la déchéance. Le point de départ à l’assignation, retenu ici, préserve l’équilibre sans réintroduire une charge accessoire prohibée par la sanction principale. L’ensemble compose un régime cohérent, fermement dissuasif et lisible pour les acteurs.