Tribunal judiciaire de Versailles, le 13 juin 2025, n°24/00671

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Rendu par le Tribunal judiciaire de Versailles le 13 juin 2025, ce jugement tranche un litige de crédit à la consommation consécutif à une défaillance de l’emprunteur. Un prêt personnel avait été consenti en 2022, avec des échéances impayées à compter de janvier 2023, puis une mise en demeure adressée en septembre 2023. Le prêteur a assigné en 2024 pour obtenir la condamnation au capital restant, aux intérêts contractuels, à une indemnité de 8 %, à la capitalisation des intérêts et aux dépens.

La procédure révèle une non-comparution de l’emprunteur, de sorte que le juge statue au fond en vérifiant la régularité et le bien-fondé des prétentions. Le juge rappelle que « Conformément à l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ». Le débat a porté sur la recevabilité de l’action au regard de la forclusion biennale, l’exigibilité du capital par déchéance du terme et le régime des accessoires, notamment clause pénale et capitalisation. La question posée tient à l’articulation des règles d’ordre public du crédit à la consommation avec le droit commun des obligations, spécialement sur le point de départ des délais, la nécessité d’une mise en demeure et l’encadrement des sanctions pécuniaires. Le Tribunal admet la recevabilité, prononce la condamnation au capital majoré des intérêts au taux contractuel à compter de la mise en demeure, réduit la clause pénale à un euro et refuse la capitalisation.

I – Le contrôle de la recevabilité et de l’exigibilité de la créance

A – La forclusion biennale et son point de départ

Le Tribunal rappelle, par une motivation conforme au texte et à la jurisprudence, que « les actions en paiement engagées […] doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ». Il précise ensuite que « Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme ou le premier incident de paiement non régularisé ». Cette définition, désormais classique, permet d’identifier un point de départ objectif, maîtrisé par le prêteur, et cohérent avec les règles d’imputation des paiements.

Le juge en déduit, dans une formule pédagogique, que « le délai de deux ans court à compter du premier incident de paiement non régularisé ». L’assignation intervenant moins de deux ans après l’échéance impayée, la demande est déclarée recevable. La solution s’inscrit dans la ligne constante qui privilégie un calcul simple du délai, tout en ménageant la sécurité juridique des opérations de crédit.

B – La déchéance du terme et l’exigibilité immédiate

Le Tribunal vise la règle cardinale du crédit à la consommation selon laquelle « en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés ». Le mécanisme est toutefois subordonné au respect du droit commun de la résolution. Le juge rappelle que « la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse […] qui ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire ». L’exigence d’une mise en demeure préalable, claire et efficiente, demeure structurante.

L’espèce révèle une cessation des paiements, une interpellation restée vaine et un contrat stipulant la déchéance du terme en cas de défaillance. Le Tribunal constate la réunion des conditions et déclare la dette immédiatement exigible. La solution concilie la protection de l’emprunteur par l’exigence d’une interpellation préalable et la légitime sécurisation du recouvrement pour le prêteur.

II – L’encadrement des accessoires de la dette en matière de crédit à la consommation

A – Modération de la clause pénale et intérêts moratoires

Le juge fixe avec précision le régime des intérêts de retard en retenant que « les intérêts moratoires […] ne peuvent courir avant mise en demeure conformément à l’article 1231-6 du code civil ». Le point de départ est donc rattaché à l’interpellation extrajudiciaire, ce qui répond à une exigence de prévisibilité et d’équité dans l’exécution de bonne foi des obligations.

S’agissant de l’indemnité de 8 %, le Tribunal exerce le pouvoir de modération de la clause pénale. Appréciant le caractère manifestement excessif au regard du préjudice, il énonce qu’« Il convient en conséquence de réduire la somme réclamée à ce titre à hauteur de un euro ». La motivation articule utilement la réparation par les intérêts contractuels et la sanction pécuniaire, afin d’éviter toute double peine économique pour l’emprunteur défaillant.

B – Rejet de la capitalisation des intérêts en crédit à la consommation

Le Tribunal rattache la solution au caractère d’ordre public économique du régime spécial. Il relève que « Cette règle fait obstacle à l’application de la capitalisation des intérêts selon le code civil », en visant l’interdiction générale des frais et indemnités non prévus par les textes spéciaux. La capitalisation ne peut ainsi prospérer lorsque la relation est gouvernée par les articles L. 312-38 et suivants.

En conséquence, la demande est écartée sans détour : « il convient de rejeter la demande de capitalisation des intérêts ». La décision confirme l’étanchéité des dispositifs protecteurs du consommateur, qui priment sur les mécanismes du droit commun lorsque ceux-ci alourdiraient le coût de la défaillance au-delà du cercle strictement autorisé.

La cohérence d’ensemble de la décision tient enfin à l’office du juge en matière d’ordre public de protection. Le Tribunal rappelle utilement que « le juge peut soulever d’office toutes les dispositions de [ce] code », assurant ainsi l’effectivité des normes impératives sans dépendre de l’initiative procédurale des parties. Cette vigilance structure la balance des intérêts entre un recouvrement légitime et la prévention des charges excessives.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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