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L’accès au traitement du surendettement des particuliers, prévu par les articles L. 711-1 et suivants du code de la consommation, suppose l’établissement d’un passif certain. La vérification des créances, étape procédurale essentielle, illustre la tension entre la protection du débiteur en difficulté et les droits des créanciers. Le jugement rendu le 17 juin 2025 par le Tribunal judiciaire de Versailles offre une illustration significative de cette problématique.
Un particulier, confronté à une situation de surendettement, a saisi la commission de surendettement des Yvelines, laquelle a déclaré sa demande recevable le 22 juillet 2024. L’état détaillé des créances lui a été notifié le 13 septembre 2024. Le 25 septembre 2024, le débiteur a sollicité la vérification de trois créances : celle détenue par une société de recouvrement, celle d’un établissement de crédit et celle d’une caisse d’allocations familiales. La commission a saisi le juge des contentieux de la protection le 15 octobre 2024.
Le tribunal de première instance devait statuer sur la recevabilité de la demande de vérification et sur le bien-fondé des créances contestées. Lors de l’audience du 18 mars 2025, le débiteur a reconnu la créance de l’établissement de crédit. Il a allégué avoir soldé la dette envers la caisse d’allocations familiales sans produire de justificatif. Il a maintenu sa contestation concernant la créance de la société de recouvrement. Les deux derniers créanciers n’ont pas comparu ni adressé d’observations.
La question posée au juge était double. Il lui appartenait de déterminer si la demande de vérification respectait le délai légal de vingt jours prévu par l’article R. 723-8 du code de la consommation. Il devait ensuite apprécier le caractère certain et liquide de chaque créance contestée au regard des pièces produites.
Le tribunal a déclaré la demande de vérification recevable, le délai ayant été respecté. Il a fixé la créance de l’établissement de crédit à 1 100,06 euros, conformément aux pièces produites. En revanche, le juge a écarté du passif les créances de la société de recouvrement et de la caisse d’allocations familiales, faute pour ces créanciers d’avoir justifié de leurs prétentions.
Cette décision invite à examiner les exigences de recevabilité de la vérification des créances dans le contentieux du surendettement (I), avant d’analyser la répartition de la charge probatoire entre débiteur et créanciers (II).
I. La recevabilité de la demande de vérification soumise à un délai strict
Le législateur a encadré la contestation de l’état du passif par un délai impératif de vingt jours (A). L’application de ce délai par le juge versaillais confirme le caractère préfix de cette exigence (B).
A. Un délai légal de vingt jours destiné à accélérer la procédure
L’article R. 723-8 du code de la consommation prévoit que « le débiteur peut contester l’état du passif dressé par la commission dans un délai de vingt jours ». Le texte ajoute qu’ « à l’expiration de ce délai, il ne peut plus formuler une telle demande ». Cette disposition traduit la volonté du législateur de concilier deux impératifs. Il s’agit d’abord de garantir au débiteur un droit de contestation effectif. Il convient ensuite d’assurer une célérité procédurale compatible avec l’urgence sociale du traitement du surendettement.
Le point de départ de ce délai est fixé à la date de notification de l’état des créances au débiteur. L’article L. 723-2 du code de la consommation impose à la commission d’informer le débiteur de cet état. Cette notification conditionne l’opposabilité du passif et déclenche le délai de contestation. La computation du délai obéit aux règles de droit commun des articles 641 et suivants du code de procédure civile.
B. Une appréciation souveraine du juge sur le respect du délai
En l’espèce, le tribunal a constaté que la notification avait été effectuée le 13 septembre 2024 et que la demande de vérification avait été adressée le 25 septembre 2024. Le juge relève que « au regard du délai de 20 jours édicté par les dispositions susvisées, il convient de dire recevable le recours formé ». Le calcul révèle que douze jours se sont écoulés entre la notification et la contestation. La recevabilité ne souffrait donc d’aucune ambiguïté.
Cette vérification du délai par le juge revêt un caractère substantiel. Un dépassement, même d’un jour, emporte irrecevabilité de la demande. Le débiteur se trouverait alors privé de toute possibilité de contester l’état du passif devant le juge. La rigueur de cette règle trouve sa justification dans la nécessité de stabiliser rapidement le périmètre des créances soumises au plan. Les créanciers doivent pouvoir connaître sans délai excessif l’étendue de leurs droits dans la procédure.
L’examen de la recevabilité constitue un préalable nécessaire. Il permet ensuite au juge d’exercer son contrôle sur le fond des créances contestées.
II. La charge de la preuve des créances pesant sur les créanciers défaillants
Le tribunal a rappelé le principe selon lequel le créancier doit justifier de sa prétention (A). L’absence de comparution et de production de pièces emporte exclusion des créances du passif (B).
A. L’application du droit commun de la preuve au contentieux du surendettement
Le juge a fondé son raisonnement sur l’article 1353 du code civil, selon lequel « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ». Cette règle de droit commun trouve pleinement application dans le contentieux de la vérification des créances. Le tribunal précise que la vérification « porte sur le caractère liquide et certain des créances, ainsi que sur le montant des sommes réclamées en principal, intérêts et accessoires ».
La liquidité suppose que la créance soit déterminée ou déterminable en son montant. La certitude implique que son existence ne soit pas sérieusement contestable. Ces caractères doivent être établis par le créancier lui-même. La procédure de surendettement ne dispense pas ce dernier de ses obligations probatoires. L’établissement de crédit qui a comparu a satisfait à cette exigence en produisant l’offre de crédit et le dernier décompte. Le tribunal a pu en conséquence fixer sa créance à 1 100,06 euros.
B. L’exclusion des créances non justifiées par les créanciers non comparants
Le tribunal a écarté du passif les créances de la société de recouvrement et de la caisse d’allocations familiales. Ces créanciers « ne comparaissent pas, sans avoir formé d’observations écrites pour justifier de leur créance ». Le juge en déduit qu’ « il appartient aux créanciers de justifier de leur créance » et prononce leur exclusion.
Cette solution appelle plusieurs observations. Elle ne constitue pas un effacement définitif de la dette. Le tribunal « rappelle que la présente décision ne s’impose pas au juge du fond et que les parties ont la possibilité de saisir celui-ci à l’effet de voir fixer le titre de créance ». La vérification opérée vaut seulement pour les besoins de la procédure de surendettement. Les créanciers conservent la faculté de faire valoir leurs droits devant le juge de droit commun.
La portée de cette décision réside dans sa dimension pratique. L’exclusion du passif prive le créancier de toute mesure de recouvrement pendant la durée d’exécution du plan. Elle allège corrélativement la charge pesant sur le débiteur et facilite l’élaboration d’un plan adapté à ses capacités de remboursement. Cette solution incite les créanciers à une vigilance accrue dans le suivi des procédures de surendettement auxquelles ils sont parties.