Le Conseil d’État a rendu le 11 avril 2025 une décision précisant la répartition des compétences juridictionnelles concernant les prestations de l’assurance chômage. Une requérante demandait au tribunal administratif de Marseille l’annulation de décisions relatives à l’allocation d’aide au retour à l’emploi. Elle sollicitait également son inscription rétroactive sur la liste des demandeurs d’emploi à compter du mois de septembre 2016. Le président de la neuvième chambre de cette juridiction a rejeté sa demande par une ordonnance prise le 6 mai 2024. La requérante s’est alors pourvue en cassation devant la plus haute juridiction administrative pour obtenir l’annulation de cette ordonnance. Le litige soulevait la question de la compétence du juge administratif pour connaître des contestations portant sur le versement des allocations. La haute assemblée confirme l’incompétence de l’ordre administratif pour les prestations d’assurance chômage et refuse l’admission du surplus des conclusions.
I. La confirmation de l’incompétence administrative en matière de prestations d’assurance chômage
L’analyse de la nature juridique des missions confiées à l’opérateur national justifie cette solution protectrice de la dualité juridictionnelle.
A. L’application littérale du Code du travail relative aux missions de l’institution nationale
Le Conseil d’État rappelle que l’opérateur national assure le service de l’allocation d’assurance pour le compte de l’organisme gestionnaire du régime. Selon l’article L. 5312-12 du code du travail, ces litiges restent soumis au régime contentieux qui leur était applicable auparavant. La jurisprudence souligne que « les litiges relatifs aux prestations servies au titre du régime d’assurance chômage (…) relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire ». Cette solution repose sur l’origine historique de ces prestations autrefois gérées par des associations de droit privé sous tutelle. La haute juridiction écarte ainsi toute velléité d’extension du champ de compétence administrative aux décisions portant sur le versement de ces sommes.
B. Le maintien de l’unité du régime contentieux hérité des anciens organismes gestionnaires
Le juge affirme que « l’aide étant servie au titre du régime d’assurance chômage, (…) il n’appartient qu’à la juridiction judiciaire de connaître d’un tel recours ». Ce principe évite une fragmentation du contentieux social entre les deux ordres de juridiction selon la structure chargée du paiement. La création de l’institution publique nationale n’a pas modifié la nature intrinsèquement privée des rapports entre l’assuré et le régime. La décision du président du tribunal administratif de Marseille est donc validée sur ce point précis par le Conseil d’État. Cette continuité jurisprudentielle assure une sécurité juridique aux usagers devant identifier le juge compétent pour contester leurs allocations.
II. Le contrôle de la régularité des ordonnances et la rigueur de la procédure d’admission
Parallèlement à cette question de compétence, le juge de cassation exerce un contrôle strict sur les conditions de recevabilité des pourvois.
A. L’usage encadré des pouvoirs du président de chambre par le Code de justice administrative
La requérante soutenait que le premier juge avait commis une erreur de droit en statuant par ordonnance au lieu d’une formation collégiale. Elle invoquait les dispositions de l’article R. 222-1 du code de justice administrative pour démontrer l’irrégularité de la procédure suivie. Le Conseil d’État dispose de la faculté de rejeter immédiatement les conclusions ne relevant manifestement pas de la compétence administrative. Cette prérogative permet une gestion efficace du flux des requêtes sans porter atteinte au droit fondamental à un recours effectif. La haute juridiction vérifie simplement si le moyen soulevé présente un caractère sérieux de nature à justifier l’admission du pourvoi.
B. Le rejet des moyens dépourvus de caractère sérieux lors de l’examen préalable du pourvoi
Le Conseil d’État estime que le moyen relatif à l’absence de collégialité « n’est pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ». Cette décision illustre la sévérité du filtrage exercé par le juge de cassation pour écarter les argumentations jugées insuffisantes ou inopérantes. L’admission est systématiquement refusée si le pourvoi est irrecevable ou s’il n’est fondé sur aucun moyen de droit sérieux. Le rejet des conclusions tendant à l’inscription rétroactive confirme la volonté du juge de limiter son contrôle aux questions juridiques essentielles. La décision rendue le 11 avril 2025 scelle ainsi définitivement le sort des prétentions formulées par la requérante dans cette affaire.