Le Conseil d’État a rendu, le 24 juillet 2025, une décision importante concernant la surveillance électronique des activités de pêche maritime. Un arrêté du 27 décembre 2022 impose désormais l’emport d’un système de surveillance aux navires de moins de douze mètres. Les requérants sollicitent l’annulation de cet acte ainsi que du rejet implicite de leur recours gracieux par le ministre. Ils soutiennent que cette obligation porte une atteinte excessive à leurs libertés et méconnaît l’égalité devant les charges publiques. La haute juridiction administrative rejette la requête en validant la conformité des exigences techniques aux impératifs de protection environnementale. Elle doit déterminer si l’imposition d’un suivi technologique aux petits navires respecte les principes de proportionnalité et d’égalité.
I. La légitimation d’une mesure de surveillance au service de l’intérêt général environnemental
A. L’inscription de la mesure dans les objectifs de la politique commune de la pêche
Le juge souligne que « la surveillance des navires de pêche, indispensable au bon fonctionnement » de la politique commune, poursuit un intérêt général. L’arrêté litigieux vise à « réduire les captures accidentelles de petits cétacés » au sein du golfe de Gascogne par un suivi renforcé. Cette mesure met en œuvre l’approche écosystémique afin que les incidences négatives des activités de pêche soient réduites au minimum. L’administration s’appuie sur les objectifs de maintien des populations d’espèces exploitées au-dessus des niveaux de rendement durable. La surveillance satellitaire constitue ainsi l’outil nécessaire pour garantir l’efficacité des mesures de protection spécifiques imposées aux pêcheurs français.
B. La validation de la proportionnalité du dispositif au regard des libertés fondamentales
Les requérants invoquent une atteinte à la liberté du commerce et de l’industrie ainsi qu’à la liberté d’aller et venir. Le Conseil d’État estime que l’obligation n’est pas disproportionnée au regard de la nécessité de protéger l’écosystème marin. Il relève que les activités au chalut ou au filet présentent des risques réels de captures accidentelles justifiant ces contrôles. Les arguments relatifs à la sécurité des navires en raison de la consommation énergétique des balises ne sont étayés par aucun élément. L’atteinte aux libertés professionnelles est donc regardée comme adaptée et nécessaire aux buts de préservation des ressources biologiques vivantes.
II. Le rejet des griefs tirés de l’irrégularité procédurale et de la rupture d’égalité
A. L’exclusion du grief de motivation pour les actes à caractère réglementaire
Le moyen tiré de l’insuffisance de motivation de l’arrêté est écarté car les dispositions litigieuses présentent un caractère réglementaire. L’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration s’applique exclusivement aux décisions administratives individuelles défavorables. Les requérants ne peuvent donc utilement se prévaloir d’un défaut de motivation pour contester une mesure de portée générale. Le Conseil d’État confirme ici une solution classique relative à la distinction entre actes réglementaires et décisions individuelles. Cette règle de procédure limite les exigences formelles pesant sur le pouvoir réglementaire lors de l’édiction de normes générales.
B. L’absence de charge excessive au regard du principe d’égalité devant les charges
La juridiction écarte la rupture de l’égalité devant les charges publiques malgré le coût d’acquisition des équipements de surveillance. L’obligation repose sur des « critères objectifs et rationnels au regard de l’objectif d’intérêt général poursuivi » par l’État. Elle s’applique uniformément à tous les navires concernés sans entraîner de charge excessive se traduisant par une rupture caractérisée. Le juge considère que les coûts supportés par les exploitants sont la conséquence directe de l’exercice de leur activité professionnelle. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté attaqué doivent être rejetées.