9ème chambre du Conseil d’État, le 28 février 2025, n°492549

Le Conseil d’État, par sa décision du 28 février 2025, précise les règles de compétence et de régularité applicables aux litiges de retraite. Un agent public, placé en congé de maladie ordinaire, sollicite son admission à la retraite pour des motifs liés à son invalidité. Deux arrêtés successifs de juillet 2021 prononcent sa mise à la retraite et fixent les modalités de calcul de sa pension de retraite. Le requérant conteste la date d’effet ainsi que l’échelon retenus devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand par deux demandes distinctes mais jointes. Le tribunal administratif rejette ses prétentions par un jugement unique, ce qui conduit l’intéressé à saisir la juridiction de cassation pour obtenir l’annulation. La Haute Assemblée doit alors déterminer le juge compétent et vérifier si les mentions obligatoires figurent bien dans la décision juridictionnelle attaquée. L’examen de cet arrêt impose d’étudier la séparation procédurale des recours avant d’analyser la sanction rigoureuse des vices de forme par le juge.

I. La distinction procédurale entre l’acte de mise à la retraite et le titre de pension

A. L’absence de connexité entre des demandes relevant de voies de recours distinctes

Le juge administratif rappelle que « des demandes distinctes relevant de voies de recours différentes ne sauraient présenter entre elles un lien de connexité ». Cette règle fondamentale interdit qu’une simple mesure d’administration judiciaire modifie les règles de compétence propres à chaque nature de litige administratif. L’arrêté de mise à la retraite relève de la carrière, alors que le titre de pension constitue un litige financier régi par des dispositions spéciales. La jonction des requêtes par les premiers juges n’altère pas l’autonomie des voies de recours ouvertes contre chacune des décisions contestées. La détermination précise du juge compétent pour chaque pan du litige devient l’étape indispensable au respect du droit au recours.

B. La ventilation des compétences juridictionnelles entre l’appel et la cassation

Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand statue en premier et dernier ressort sur les pensions, conformément aux dispositions de l’article R. 811-1 du code. Le litige relatif au titre de pension est donc soumis au Conseil d’État, tandis que le recours contre la mise à la retraite suit l’appel. La juridiction suprême attribue le jugement d’une partie des conclusions à la cour administrative d’appel de Lyon pour respecter les règles de compétence. Cette ventilation procédurale garantit le maintien du double degré de juridiction pour les actes administratifs n’entrant pas dans le champ spécifique des pensions. Si la répartition des compétences assure le respect des procédures, la validité du jugement dépend également du respect des formes solennelles de l’audience.

II. La sanction du vice de forme entachant la régularité de la décision juridictionnelle

A. L’exigence impérative des mentions relatives à la publicité de l’audience

L’annulation du jugement repose sur l’absence de mentions relatives à la publicité de l’audience, principe protecteur énoncé à l’article L. 6 du code. Il ne ressort d’aucune mention que « l’audience tenue par le tribunal administratif a été publique » ou qu’elle s’est poursuivie hors la présence du public. Cette exigence de publicité permet d’assurer la transparence de la justice et constitue une garantie essentielle pour le respect des droits des justiciables. L’omission de cette mention substantielle empêche de vérifier que le juge a respecté les conditions de validité imposées par les textes de procédure. L’examen de la régularité se poursuit par la vérification de la participation effective des membres indispensables de la formation de jugement lors des débats.

B. Le défaut de preuve du respect des garanties procédurales élémentaires

Le juge de cassation relève également que la décision ne prouve pas que « le rapporteur public a été entendu lors de cette audience ». L’article R. 741-2 impose de mentionner l’audition de ce magistrat ou la dispense accordée par le président de la formation de jugement concernée. Faute de ces éléments, la procédure est jugée irrégulière car elle ne permet pas de s’assurer du plein respect des principes du procès équitable. Le Conseil d’État prononce l’annulation partielle du jugement et renvoie l’affaire devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand pour un nouveau jugement. Cette sévérité formelle illustre la volonté du juge supérieur de protéger les formes protectrices du contentieux administratif contre tout relâchement rédactionnel.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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