Conseil constitutionnel, Décision n° 2007-561 DC du 17 janvier 2008

Le Conseil constitutionnel a rendu, le 17 janvier 2008, une décision majeure portant sur la loi de ratification de l’ordonnance relative au code du travail. Cette décision n° 2007-561 DC examine la validité constitutionnelle d’une refonte globale du droit social opérée par la voie législative déléguée de l’article 38. Les auteurs de la saisine ont sollicité les juges de la rue de Montpensier afin de contester la méthode de recodification adoptée par l’exécutif. Ils invoquaient notamment une atteinte au droit au recours effectif et la méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité de la loi. Les requérants dénonçaient également une violation du principe de codification à droit constant ainsi qu’un empiétement illégitime sur le domaine de la compétence législative.

La question de droit posée aux juges consistait à déterminer si la réorganisation structurelle et rédactionnelle d’un code préexistant pouvait valablement s’affranchir de traditions législatives. Le Conseil constitutionnel devait ainsi arbitrer entre la liberté d’organisation du législateur et le respect des principes fondamentaux régissant les rapports entre les normes.

Le Conseil a déclaré la loi conforme à la Constitution en rejetant l’essentiel des griefs tout en précisant la portée des notions d’indépendance administrative. La solution retenue confirme que la recherche de la clarté normative justifie une modification profonde de l’ordonnancement des textes législatifs. L’examen de cette décision permet d’apprécier la validation d’une codification respectueuse des impératifs de lisibilité (I) et le respect rigoureux de la hiérarchie des normes (II).

I. La validation d’une codification respectueuse des impératifs de lisibilité

A. La consécration de l’objectif d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi

Le Conseil constitutionnel rappelle fermement que « la codification répond à l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi » issu de la Déclaration de 1789. Cette exigence impose que les citoyens disposent d’une connaissance suffisante des normes applicables pour garantir l’exercice effectif de leurs droits et libertés fondamentaux. Les juges soulignent que l’égalité devant la loi et la garantie des droits pourraient devenir illusoires sans une lisibilité optimale des textes en vigueur. L’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité sert de fondement juridique pour apprécier la validité de la structure complexe adoptée pour le nouveau code du travail. Cette approche moderne privilégie la compréhension immédiate du droit par ses destinataires sur le maintien d’une tradition de rédaction parfois devenue obscure.

B. La légitimation technique de la refonte du code du travail

Les juges valident la méthode consistant à scinder les articles longs pour n’exprimer qu’une seule idée directrice par disposition législative nouvellement créée. Ils estiment que cette approche « améliore la lisibilité des dispositions concernées » en séparant clairement les règles de fond des éventuelles procédures de mise en œuvre. Le passage de moins de deux mille articles à plus de trois mille six cents ne constitue pas une source de confusion constitutionnelle. Le Conseil rejette le grief lié à l’éclatement du code en raison du transfert de certaines dispositions spécifiques vers d’autres codes spécialisés. Il juge que le regroupement par blocs homogènes répond à une logique de cohérence qui facilite l’accès à l’information juridique pour les usagers.

II. Le respect rigoureux de la hiérarchie des normes et du domaine de la loi

A. L’encadrement des griefs relatifs à la procédure de ratification

Le Conseil constitutionnel précise qu’un grief tiré de l’excès de pouvoir lors de l’élaboration d’une ordonnance est « inopérant à l’égard d’une loi de ratification ». Dès lors que le législateur adopte la loi de ratification, les dispositions de l’ordonnance acquièrent une pleine valeur législative de manière rétroactive. Ce mécanisme constitutionnel purge les éventuels vices de forme ou d’habilitation qui auraient pu entacher la phase gouvernementale de la création de la norme. Les juges considèrent que le Parlement exerce sa compétence souveraine sans porter atteinte aux principes du procès équitable garantis par les textes fondamentaux. Cette position renforce la sécurité juridique en stabilisant définitivement le statut normatif du code du travail après l’intervention du pouvoir législatif souverain.

B. La sanctuarisation de la répartition des compétences législatives et réglementaires

Le juge constitutionnel vérifie méticuleusement que la nouvelle rédaction ne dénature pas les principes fondamentaux du droit du travail réservés au domaine de la loi. Il rejette l’argument selon lequel l’emploi du présent de l’indicatif dans les articles du code supprimerait le caractère obligatoire des prescriptions imposées. La décision réaffirme solennellement que « l’emploi du présent de l’indicatif ayant valeur impérative », la force contraignante de la loi demeure parfaitement intacte. Une réserve d’interprétation est toutefois formulée concernant la détermination de l’autorité administrative compétente au sein du système d’inspection du travail. Le Conseil précise que si l’indépendance de l’inspection relève de la loi, la désignation de l’autorité chargée des missions relève du pouvoir réglementaire.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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