Conseil constitutionnel, Décision n° 2013-675 DC du 9 octobre 2013

Le Conseil constitutionnel a rendu le 9 octobre 2013 la décision n° 2013-675 ORG portant sur la loi organique relative à la transparence de la vie publique. Ce texte législatif impose aux responsables publics de déposer des déclarations de situation patrimoniale et d’intérêts auprès d’une autorité administrative indépendante. Saisi par de nombreux parlementaires, le juge devait se prononcer sur la validité de ces nouveaux instruments de contrôle démocratique. Les auteurs de la saisine invoquaient principalement la violation du droit au respect de la vie privée et l’atteinte à la séparation des pouvoirs. La question posée résidait dans la conciliation entre l’exigence de probité des élus et la protection de leurs libertés individuelles fondamentales. Le Conseil valide le principe des déclarations mais censure les mesures disproportionnées touchant l’entourage familial ou restreignant excessivement la liberté professionnelle. L’étude portera d’abord sur l’encadrement des obligations de transparence (I), puis sur la préservation des principes institutionnels et de la liberté d’exercice (II).

I. L’encadrement des obligations de transparence au regard de la vie privée.

A. La validation du contrôle patrimonial au nom de l’intérêt général.

Le juge constitutionnel considère que le renforcement de la probité des responsables publics constitue un objectif d’intérêt général à valeur constitutionnelle. Il estime que « le dépôt de déclarations de situation patrimoniale » contenant des données personnelles ne porte pas une atteinte disproportionnée à la vie privée. Cette solution se justifie par la nature particulière des fonctions parlementaires et la nécessité de prévenir les risques de conflits d’intérêts. La publicité des déclarations d’intérêts et la consultation des déclarations de patrimoine par les électeurs sont ainsi jugées conformes au droit positif. Cette exigence de proportionnalité conduit logiquement le juge à écarter les dispositions portant une atteinte excessive à l’intimité des tiers.

B. La censure des ingérences excessives dans la sphère personnelle des proches.

Le Conseil constitutionnel censure l’obligation de déclarer les activités professionnelles exercées par les enfants et les parents du titulaire d’un mandat électif. Il juge que cette mesure entraîne une « atteinte au droit au respect de la vie privée qui ne peut être regardée comme proportionnée ». Les proches ne participant pas à l’exercice de la souveraineté nationale n’ont pas à subir les contraintes liées à la transparence politique. Le juge invalide également la mention des liens susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts faute de précision suffisante dans la loi. L’annulation de ces mesures protectrices de la vie privée s’accompagne d’une vigilance accrue quant au respect des équilibres institutionnels de la République.

II. La préservation des principes institutionnels et de la liberté d’exercice.

A. La limitation des pouvoirs de la Haute autorité face au Parlement.

La décision encadre les prérogatives de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique afin de respecter le principe de séparation des pouvoirs. Le juge admet que cette autorité administrative puisse adresser des injonctions aux élus pour compléter leurs déclarations de situation patrimoniale. Une réserve d’interprétation stricte interdit cependant à l’administration d’enjoindre un parlementaire de modifier sa déclaration d’intérêts sous peine de sanction pénale. Les dispositions contestées ne sauraient permettre à une autorité administrative d’interférer directement dans la composition des intérêts des membres du Parlement. La sauvegarde de l’indépendance parlementaire impose également de limiter les interdictions professionnelles aux seules nécessités de la prévention des conflits d’intérêts.

B. L’annulation des restrictions professionnelles jugées manifestement disproportionnées.

Le législateur avait instauré une interdiction générale d’exercer toute activité professionnelle nouvelle n’ayant pas débuté avant l’entrée en fonction du parlementaire. Le Conseil constitutionnel censure cette disposition car elle « excède manifestement ce qui est nécessaire pour protéger la liberté de choix de l’électeur ». Une telle interdiction porte une atteinte excessive à la liberté individuelle sans lien direct avec la prévention des conflits d’intérêts réels. Le juge valide en revanche le renforcement du régime des incompatibilités pour les fonctions de direction au sein des entreprises travaillant pour l’État. La décision confirme enfin l’incompatibilité absolue des fonctions de membre du Conseil constitutionnel avec toute autre activité professionnelle ou salariée publique.

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Hassan KOHEN
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